Information géographique numérique et justice spatiale : les promesses du « partage »

Sharing Platforms in Digital Geographic Information and Spatial Justice: Everything it Promises?

Introduction

Introduction

 

 

Nous proposons dans cet article une contribution aux débats sur les liens entre algorithmisation du monde et justice spatiale, par une analyse critique des effets politiques de la circulation de l’information géographique numérique. Celle-ci constitue la « matière » alimentant un nombre croissant d’algorithmes guidant notre quotidien et les politiques publiques affectant nos territoires (aide au déplacement, prospective territoriale, etc.). Il est donc particulièrement nécessaire de décrypter ses modalités de production, ses flux, ses conséquences en termes de justice, notamment spatiale.

In this article, we contribute to the debates on the links between the world’s algorithmisation and spatial justice, by offering a critical analysis of the political effects of the circulation of digital geographic information. This type of information contributes to the increasing number of algorithms guiding our daily life and the public policies affecting our territories (improvement of mobility, territorial forecasting, etc.). Therefore it is particularly important to understand its production methods, its flows as well as its consequences in terms of justice, and spatial justice in particular.

Longtemps, la formation de bases de données territorialisées n’a été l’affaire que d’un seul acteur. De la naissance des premiers cadastres à l’institutionnalisation de la statistique publique dans l’Europe des XVIe-XIXe siècles, l’État, seul, avait l’intérêt et les moyens de collecter sur de vastes espaces des données sur les populations et les ressources. L’État, seul, était en capacité de standardiser ces données, de les structurer dans des archives lui permettant de rendre « lisible » (Scott, 1998) son territoire sur toute son extension. Dans ce contexte, les débats liant information géographique et justice spatiale s’organisaient autour de deux lectures antagonistes de ce monopole étatique. Aux approches critiques de la construction informationnelle de l’État et à ses effets en termes de contrôle des populations (Foucault 1975) s’opposait une vision positive liant la démocratisation de l’action publique à la formation de bases de données spatialement exhaustives, permettant de traiter chaque citoyen de façon équitable en fonction de ses revenus, sa position dans l’espace, la taille de sa propriété[1]. Sous cet « Ancien Régime » informationnel, caractérisé par une capitalisation asymétrique de l’information en faveur de l’État et au détriment des autres acteurs sociaux (Lascoumes et Le Galès, 2004), la question centrale est donc celle des effets politiques et sociaux d’une activité de collecte et de systématisation de données sur les territoires, notamment des effets liés au changement d’échelle de l’action publique permise par la transformation de données locales dans des bases « nationales ».

For a long time, the creation of territorialised databases involved only one actor. From the birth of the first land registries to the institutionalisation of public statistics in 16th– to 19th-century Europe, the State alone had reason and means to collect data on populations and resources over vast areas. The State alone had the capacity to standardise, organise and archive the collected data, thereby making the full extent of the national territory “legible” (Scott, 1998). In this context, the debates linking geographic information to spatial justice were organised around two antagonistic readings of the State’s monopoly. The critical approaches of the State’s informational build-up and its effects in terms of population monitoring (Foucault 1975), were in direct opposition to a positive vision linking the democratisation of public action to the creation of spatially exhaustive databases, making it possible to deal with every citizens fairly according to income, geographical position and property size[1]. Under this Ancien Regime informational system, characterised by an asymmetrical capitalisation of information in favour of the State but to the detriment of other social actors (Lascoumes and Le Galès, 2004), the central issue was that of the political and social effects of collecting and systematising data on territories, and the effects linked to a change in the scale of public action allowed by the transformation of local data into “national” databases.

Avec la transition numérique –numérisation croissante des données et essor d’Internet- qui affecte la production de l’information géographique à partir des années 1990, les termes du débat se trouvent modifiés. Des représentations structurées de l’espace, alternatives à celles de l’État, peuvent émerger et se pérenniser sur Internet, comme autant de revendications d’une plus grande justice dans la prise en compte des particularités locales des populations (observatoires militants), mais aussi comme expression de stratégies privées déconnectées des agendas gouvernementaux (cas des GAFAM[2]). Simultanément, la transition numérique ouvre de nouvelles possibilités à l’État de poursuivre sa tentative multiséculaire de systématisation de ses bases de données territoriales, en faisant d’Internet un nouveau gisement où trouver de quoi compléter les manques d’information sur certaines portions ou dimensions des territoires. De plus en plus de bases de données publiques poursuivent ainsi leur expansion en s’alimentant partiellement de données issues des sciences participatives, des données produites volontairement par des citoyens, ou encore de bases supranationales produites par des agences ne répondant pas directement aux gouvernements. De cette façon, la transition numérique est porteuse de promesses antagonistes en termes de justice spatiale, celle d’un accroissement de l’égalité de traitement spatial des citoyens, et celle de possibilités croissantes pour ceux-ci de signaler leurs singularités locales et leurs différences dans l’espace d’Internet.

With the digital transition, i.e. the increasing digitisation of data and the rapid expansion of the Internet, which has been affecting the production of geographic information since the 1990s, there has been a shift in the debate. Structured representations of space, as an alternative to those of the State, can emerge and become long-lasting on the Internet, thereby satisfying any claim for greater justice in taking into account the local particularities of populations (activist observatories), but also expressing private strategies disconnected from governmental agendas (as do GAFAM[2]). Simultaneously, the digital transition opens new possibilities for the State to pursue its multi-secular attempts at systematising its territorial databases, by treating the Internet as a new pool to find what is necessary to complete missing information on certain portions or dimensions of its territories. As such, an increasing number of public databases are pursuing their expansion by feeding partially on data stemming from participative sciences, from data produced voluntarily by citizens, or still from supranational databases produced by agencies not accounting directly accountable to governments. In this way, the digital transition is antagonistic in terms of spatial justice, promising both an increase in the equality of the spatial processing of citizens, and the growing possibilities for citizens to point out their local particularities and differences on the Internet.

La complexité actuelle de ce que l’on appelle « information géographique numérique » suppose d’observer de nouvelles dimensions des effets d’information sur la société, notamment de comprendre comment la transition numérique ré-agence les champs croisés de la contrainte et de l’émancipation. Nous proposons ici d’aborder ce ré-agencement sous l’angle de l’idéologie qui nous semble présider à ses grandes évolutions : celle du « partage ». Les années 2000 sont celles de la multiplication des acteurs en capacité de produire, d’interpréter et de gérer de l’information géographique, grâce au Web, à l’information géographique volontaire (Goodchild, 2007)[3], à la démocratisation des outils de géolocalisation et de traitement SIG. Compétences et capacités techniques sont alors redistribuées (Lin, 2015), tandis que se multiplient les sources de données. Dans ce contexte de complexification croissante de la nature et des flux de l’information géographique, la question de savoir avec qui l’on va partager l’information que l’on produit est aujourd’hui prioritaire, autant sinon plus que celle de savoir quel type d’information on va produire. D’où le foisonnement d’expressions comme infrastructure de données, plateforme de données, régie de données, portail open data, smart data center, etc. qui traduisent la multiplication de dispositifs organisant de nouvelles circulations de l’information (géographique). Aujourd’hui, n’est légitime que celui qui partage, et ce terme est désormais le fruit de stratégies multiples et souvent contradictoires (de la part de l’État, de collectivités territoriales, de grandes multinationales, de petits bureaux d’étude, de militants locaux…) mais toutes pragmatiques, qui instrumentalisent le discours du partage pour négocier leur présence dans le champ de l’information et affirmer leur rôle dans les territoires. Par ailleurs, le « partage » est une idéologie à bien des égards contradictoire car porteuse de projets sociétaux divergents, assimilée à la transparence publique pour les uns, ou bien vue essentiellement sous un angle instrumental pour les autres, permettant de pallier les insuffisances de l’État en favorisant la participation citoyenne à la gestion des territoires (Gautreau et Noucher, 2013).

The current complexity of what is called “digital geographic information”, calls for observing new dimensions concerning the effects information has on society, and especially for understanding how the digital transition is re-structuring the transversal fields of constraint and emancipation. In this publication, we propose to tackle this re-structuring from the point of view of the “sharing” ideology which, it seems to us, governs the major evolutions of digital transition. The 2000s are the years of the multiplication of actors able to produce, interpret and manage geographic information, thanks to the Web, volunteered geographic information (Goodchild, 2007)[3], the democratisation of geolocation technologies. With these come the redistribution of skills and technical capacities (Lin, 2015), and the multiplication of data sources. In this context where the nature and flow of geographic information is increasingly becoming more complex, today’s priorities lie in knowing with whom the information produced is going to be shared and, as importantly if not more, what type of information is going to be produced. Hence the profusion of expressions such as data infrastructure, data platform, data governance, open data portal, smart data centre etc., all conveying the multiplication of systems organising new (geographic) information circulation. Today, as a result of multiple and often contradictory – although pragmatic – strategies (from the State, local authorities, large multinational firms, small consultancies, local militants, etc.), only those who share information are legitimate. These strategies exploit the discourse on sharing to negotiate their presence in the field of information, and to assert their role in the territories. Moreover, the “sharing” ideology is in many respects contradictory, in that it involves divergent societal projects likened to public transparency for some, or seen essentially from an instrumental angle for the others, making it possible to compensate for the State’s shortcomings by favouring citizens’ participation to the management of territories (Gautreau and Noucher, 2013).

Ainsi que le souligne Mol (2008) à propos de l’environnement, l’information cesse d’être une simple ressource qui alimente des politiques publiques pour devenir un véritable champ qui « restructure les processus, les institutions et les pratiques ».

As highlighted by Mol (2008) concerning the environment, information ceases to be a mere resource sustaining public policies to become a real field that “restructures processes, institutions and practices”.

Porteur de valeurs positives et a priori démocratiques, le « partage » doit donc être décrypté, dans ses formes (coalitions d’acteurs, dispositifs techniques, …) et surtout dans ses effets en termes de modification des rapports de pouvoirs entre les acteurs liés par ces nouveaux flux d’information géographique. Cet article tente donc de mettre en œuvre ce décryptage en croisant quatre situations nationales (Argentine, Bolivie, Brésil, France) où se développent des dispositifs emblématiques de ce nouveau paradigme informationnel, « l’Infrastructure de Données Géographiques » ou IDG. Nées dans les années 1990, les IDG sont des institutions où se négocient les informations à partager entre acteurs d’un territoire, les modalités de ce partage, et jusqu’au mode de production des données : elles associent à une forte composante technique (plateforme d’échange de données en ligne) un véritable réseau d’acteurs territorialisés qui organisent des flux d’information géographique. Notre analyse portera sur les implications en termes de justice spatiale du déploiement de ces dispositifs. Après avoir défini notre objet d’étude et notre grille de lecture dans une première partie, nous analyserons successivement les implications des IDG en termes d’accès citoyen à l’information, en termes d’homogénéité de la couverture des territoires par l’information, puis en termes d’équité dans l’expression des particularismes locaux.

Where “sharing” involves positive and a priori democratic values, its forms (coalitions of actors, technical systems etc.) need to be understood, and especially its effects in terms of the modification of power relations between actors connected through the new flow of geographic information. This article tries to implement this by comparing cases from four countries (Argentina, Bolivia, Brazil and France), where systems symbolising this new informational paradigm – Spatial Data Infrastructures or SDIs – are being developed. Born in the 1990s, SDIs are institutions where information to be shared between territorial actors, sharing methods and even data production methods are negotiated: they associate a strong technical component (online data exchange platform) with a real network of territorialised actors organising flows of geographic information. Our analysis will focus on what the deployment of these systems will imply in terms of spatial justice. After defining our subject and framework in the first section, we will analyse successively the implications of SDIs in terms of citizens’ access to information, in terms of the homogeneity of the territorial coverage of information, and in terms of equity in the expression of local particularisms.

 

 

 1. Partage de l’information géographique et justice : une grille de lecture

1. Sharing Geographic Information and Justice: A Conceptual Framework

 

 

Souvent réduites à de simples sites web permettant de consulter les données cartographiques d’un territoire à travers un géoportail et de les télécharger via un géocatalogue, les infrastructures de données géographiques sont, en fait, de véritables institutions où se joue une partie des évolutions majeures affectant le régime actuel de production et de circulation de l’information géographique. Fortement pilotées par les autorités publiques, mais s’adressant à l’ensemble de la société, elles permettent d’observer la recomposition des rapports de pouvoir autour de l’État dans ce domaine. La volonté de faciliter l’accès sur un même territoire à des données et des services géographiques issus de fournisseurs différents a conduit, depuis les années 1990, au développement croissant d’IDG nationales (Crompvoets et al., 2004) puis à leur déclinaison à tous les échelons territoriaux (Masser, 2010). Elles rassemblent aujourd’hui les données, les réseaux informatiques, les normes et standards, les accords organisationnels et les ressources humaines nécessaires pour faciliter et coordonner le partage, l’accès et la gestion des données géographiques (Rajabifard et al., 2003). Les IDG sont désormais au cœur de l’écosystème des données en libre accès dans la mesure où elles structurent depuis maintenant plusieurs années les données géographiques institutionnelles qui constituent une part essentielle des données publiques libérées (Noucher et Gautreau, 2013).

Often reduced to mere websites where the mapping data of a territory can be consulted through a geoportal and downloaded via a catalogue service, spatial data infrastructures are the seat of major evolutions affecting the current production and circulation system of geographic information. While they are very much managed by governments, they are intended for society as a whole, making it possible to observe the reconstitution of power relations around the State in this field. The will on the same territory to facilitate access to geographic data and services emanating from different suppliers has, since the 1990s, led to an increase in the development of national SDIs (Crompvoets et al., 2004), and to their being made available at all territorial levels (Masser, 2010). Today, SDIs bring together the data, computer networks, norms and standards, organisational agreements as well as human resources required to facilitate and co-ordinate spatial data sharing, access and management (Rajabifard et al., 2003). SDIs are from now on at the centre of the open data ecosystem, insofar as they have been structuring, for several years already, the institutional spatial data which constitutes an essential part of open data (Noucher and Gautreau, 2013).

Malgré la diversité des expériences d’IDG, plusieurs traits les caractérisent et les rassemblent. Ce sont avant tout des institutions, plus ou moins stabilisées, au sein desquelles s’établissent, entre divers acteurs, des règles de partage de l’information géographique, sous forme de protocoles ou de chartes. La formation de « groupes de travail », animés par l’IDG et ouverts à de très nombreux acteurs intéressés par l’information géographique (sur les standards de données, sur les protocoles informatiques, sur les questions de droits, sur les applications métiers….) est quasiment systématique au sein des IDG et témoigne de leur caractère d’institution. Pour vivre, ensuite, celles-ci doivent convaincre leurs partenaires de fournir des données régulièrement à la plateforme, rompant les réticences et les volontés de capitalisation individualiste de l’information : elles doivent donc enrôler ces partenaires à long terme, et dépensent une forte énergie dans ce but. Enfin, toute IDG implique une coordination de niveaux territoriaux différents, organisant la mise en cohérence de données collectées pour différents objectifs, à des échelles disparates, et gérées par des administrations ou acteurs allant du local au national, par exemple. Ces trois caractéristiques, nous le verrons, sont capitales pour saisir les implications des IDG en termes de justice spatiale.

Despite the diversity of SDI experiences, they are characterised and brought together by several traits. They are above all more or less stabilised institutions, within which rules for spatial data sharing are established between various actors in the form of protocols or charters. The creation of workgroups within each SDI, open to many actors interested in geographic information (on data standards, computer protocols, legal issues, business applications etc.), is almost systematic and testifies to the institutional nature of theses SDIs. In order to live on, SDIs must convince their partners to supply the platform with data on a regular basis, thereby putting an end to the reluctance expressed by some to share information, and the desire expressed by others to capitalise on information to personal ends. SDIs must therefore enrol these partners in the long term, and spend a lot of energy to that end. Finally, any SDI involves co-ordinating different territorial levels, organising the coherence of data gathered for different objectives, on disparate scales, and managed by administrations or actors ranging from local to national levels for example. As we shall see, these three characteristics are absolutely essential in grasping the implications of SDIs in terms of spatial justice.

Le « partage » mis en œuvre au sein des IDG recouvre un continuum de pratiques qui va de la mutualisation, mise en commun de capacités de production de données entre institutions mais dans un cercle fermé de membres, vers l’échange, flux bidirectionnel entre institutions, et enfin vers l’ouverture ou Open Data, diffusion au-delà du cadre institutionnel public. Quelle que soit la pratique considérée, toute IDG investit par ailleurs lourdement dans l’interopérabilité : pour pouvoir échanger facilement leurs données, ou pour les besoins croissants de communication à distance et la nécessité d’être « repéré » sur le Web et indexé par des moteurs de recherche, les IDG adoptent des normes internationales afin de rendre leurs systèmes interopérables, leur permettant de communiquer avec d’autres systèmes d’information.

The sharing process implemented within SDIs covers a continuum of practices ranging from mutualisation, i.e. sharing data production capacities between institutions that are members of a closed group, to exchange, i.e. bidirectional flow between institutions, and finally to open data, i.e. dissemination beyond the public institutional framework. Irrespective of the practice considered, any SDI invests heavily in interoperability: in order to exchange data easily or to meet growing needs in distance communication and the need to be “spotted” on the Web and indexed by search engines, SDIs adopt international standards so as to make their systems interoperable, allowing them to communicate with other information systems.

Souvent intuitivement classé parmi les facteurs de démocratisation de nos sociétés contemporaines parce que favorisant un accès universel, le « partage » doit donc faire l’objet d’une clarification sémantique ainsi que d’une approche circonspecte et rigoureuse, nombre de processus d’échange ou de mutualisation s’opérant de fait par fermeture explicite à certaines catégories de la population.

Where “sharing” is often intuitively classified among the democratisation factors of our contemporary societies because it favours universal access, it must therefore be the subject of semantic clarification as well as a cautious and rigorous approach, since many exchange or mutualisation processes operate de facto by being explicitly off-limits for certain categories of the population.

Nos études de cas portent sur des IDG de quatre pays sud-américains et de France[4], permettant de croiser des expériences menées dans des contextes politiques et informationnels très contrastés, enrichissant ainsi leurs enseignements en termes de justice spatiale. Similaires dans leurs caractéristiques techniques générales, ces IDG diffèrent par leur trajectoire de formation. L’IDG argentine (IDERA) naît en 2007 (figure 1) à l’initiative de fonctionnaires dispersés dans différentes administrations fédérales et fédérées du pays désirant formaliser leurs échanges officieux et créer une base nationale. Son réseau de membres est aujourd’hui très actif, finalement coordonné par l’Institut Géographique National, mais le faible appui financier du niveau fédéral fait reposer l’ensemble sur l’activité quasi bénévole de quelques dizaines de personnes, et explique qu’aucune donnée ne soit encore en ligne[5]. Absence de données en ligne ne voulant pas dire inexistence de l’institution, l’IDERA anime tous les ans des ateliers dans les provinces, fréquentés par des centaines de participants, formés aux notions et protocoles de l’IDG et sensibilisés aux questions (légales, techniques) du partage. En Bolivie, c’est à l’initiative d’une petite équipe proche de la vice-présidence et financée par la coopération internationale que nait en 2012 l’IDG GeoBolivia, dans un logique bien plus « top-down ». L’objectif est alors de doter le gouvernement d’Evo Morales de données de référence pour tout le territoire national afin de mettre en œuvre ses politiques de développement et de redistribution sociale (Lerch, 2013). Après des débuts difficiles où l’enrôlement des partenaires se résolvait par la voie forte (intimations à partager leurs données formulées depuis le sommet de l’Etat), GeoBolivia commence à articuler un réseau réduit d’organisations publiques sous forme de sous-systèmes connectés à l’IDG, ou « nœuds ». Particularité bolivienne, l’IDG fonctionne hors de la sphère de l’Institut Géographique Militaire, avec lequel les tensions sont fortes. Elle a cependant acquis une certaine notoriété parmi les principales administrations publiques, et anime régulièrement des formations à la gestion des données géographiques numériques. Au Brésil, la création de l’IDG nationale en 2008 répond elle aussi à une logique « top-down », mais fortement pilotée par l’Institut Brésilien de Géographie et de Statistique, qui coordonne les groupes de travail initiaux[6] ayant permis d’aboutir à la formulation d’un plan d’action pluriannuel. A l’origine du projet, la volonté de créer un répertoire national des données cartographiques durant les années 1990, évoluant vers un projet d’IDG suite au constat de la numérisation croissante des données. L’INDE rassemble aujourd’hui essentiellement des partenaires de niveau fédéral, et une forte quantité de données est disponible (figure 1). En Europe, la directive INSPIRE (2007/2/CE)[7] vise au déploiement d’une infrastructure de données géographiques dans la Communauté européenne en s’appuyant sur les IDG des États membres. En France, le Conseil national de l’information géographique (CNIG) assure la coordination entre l’infrastructure nationale (dont le déploiement est assuré par deux acteurs historiques de la cartographie : l’Institut Géographique National et le Bureau de Recherches Géologiques et Minières) depuis 2005 et la myriade d’infrastructures thématiques (sur le sol, sur l’eau, sur le littoral…) ou infranationales (départementales, régionales, transfrontalières…) qui voit le jour depuis. L’échelon régional occupe une place centrale dans ce dispositif. Relais entre les données locales et les standards nationaux, les IDG régionales ont un rôle d’animation (fédération, formation, coordination) important. En janvier 2016, on dénombre ainsi 16 IDG thématiques d’échelon national et 29 IDG régionales.

Our case studies concern the SDIs of three South American countries and France[4], thereby making it possible to compare experiences conducted in very different political and informational contexts, and enriching the lessons drawn from these in terms of spatial justice. Although their general technical characteristics are similar, SDIs differ in the way they were created. The Argentinian SDI (IDERA) was born in 2007 (Figure 1) on the initiative of civil servants scattered in different federal and federated administrations of the country, and who wanted to formalise their unofficial exchanges by creating a national database. Today, the IDERA network, which ended up being co-ordinated by the National Geographic Institute, is very active. However, the low financial support given at federal level means that all activities rely on the quasi-voluntary activity of a few dozen people. It also explains why no data is online as yet[5], which does not mean that the institution does not exist: every year, the IDERA organises workshops in the provinces, which are attended by hundreds of participants who are trained in SDI notions and protocols, and are made aware of the legal and technical issues of sharing. In Bolivia, in 2012, it was on the initiative of a small team close to the vice-president and financed by international cooperation, that the SDI GeoBolivia was born, based more on a “top-down” approach. The objective was then to endow Evo Morales’ government with reference data for the entire national territory, with a view to implementing his development and social redistribution policies (Lerch, 2013). After difficult beginnings where partners had to be enrolled by summons from the State, GeoBolivia began to structure a reduced network of public organisations in the form of subsystems connected to the SDI. However, the SDI acquired notoriety among the main public administrations, and regularly organises training sessions in spatial data management. In Brazil, in 2008, a national SDI was also created to meet a “top-down” logic, but it was run mainly by the Brazilian Institute of Geography and Statistics, which coordinates the initial workgroups[6] that led to formulating a long-term action plan. The project stemmed from the desire to create a national mapping data repository during the 1990s, and evolved into an SDI project after it was found that data was becoming increasingly digitised. Today, the INDE gathers mainly federal partners, and a high quantity of data is available (Figure 1). In Europe, the INSPIRE Directive (2007/2/CE)[7] has been aiming at deploying a Spatial Data Infrastructure in the European Community by relying on the SDIs of member States. In France, the National Council for Geographic Information (CNIG) ensures coordination between the national infrastructure – deployed since 2005 by the National Geographic Institute (IGN) and the French Geological Survey (BRGM) -, and the myriad of thematic (soil, water, coast etc.) or infra-national (departmental, regional, cross-border etc.) infrastructures that have seen the light since then. The regional scale is central in this system. As relays between local data and national standards, regional SDIs play an important organising role (federation, training and coordination). In January 2016, France counted 16 thematic SDIs at national level and 29 at regional level.

Seront également évoqués dans cet article des systèmes nationaux d’information sur la biodiversité (SIB), très proches des IDG dans leur configuration et gérant eux aussi des données géographiques, plus simples généralement car correspondant à des points d’observation de taxons végétaux ou animaux[8]. Le Système National de Données Biologique argentin est activé en 2009 par le projet du Ministère des Sciences et Technologies de créer de grandes bases de données et des instruments pour les politiques scientifiques et technologiques. Il s’agit en fait de la formalisation et de l’institutionnalisation d’un réseau d’échange de données entre scientifiques et musées, appuyée techniquement par le Global Biodiversity Information Facility (Gbif), un consortium international animant une IDG sur la biodiversité mondiale, dont le SNDB est devenu un nœud avec près de 500.000 données en ligne en 2014. Au Brésil, le Système d’information sur la biodiversité Brésilienne (SibBr) naît en 2011 d’une initiative du Ministère de la Science, de la technologie et de l’innovation, du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (volet technique) et du Fond Mondial pour l’Environnement (financement). Il offre en 2015 plus de 3 millions de données en ligne sur le territoire brésilien. La Bolivie ne compte, elle, aucun SIB actif. En France, le Système d’Information sur la Nature et le Paysage naît en 2005. Il est piloté depuis le Ministère en charge de l’écologie, qui a pour mission de coordonner l’ensemble des acteurs produisant des données de biodiversité en France, depuis les instances nationales jusqu’aux naturalistes amateurs. Sa plateforme centrale est animée par le Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) dans le cadre de l’Inventaire National du Patrimoine Naturel. Bien que le système global ne soit pas encore totalement implémenté d’un point de vue informatique, 35 millions de données sont actuellement disponibles en ligne.

In this article, we will also bring up national biodiversity information systems (BIS), very close to SDIs as far as configuration and geographic data management are concerned, although BISs are generally simpler in that they correspond to sites where vegetal or animal taxa[8] are observed. Argentina’s National Biological Data System was activated in 2009, through a project from the Ministry of Science and Technology aimed at creating large databases and instruments for scientific and technological policies. In actual fact, it consisted in the formalisation and institutionalisation of a data exchange network between scientists and museums, technically supported by the Global Biodiversity Information Facility (GBIF) – an international consortium in charge of an SDI on global biodiversity, and of which the National Biological Data System has become a node with close to 500 000 records online in 2014. In Brazil, the Brazilian Biodiversity Information System (SibBr) came into being in 2011, following an initiative by the Ministry of Science, Technology and Innovation, the United Nations Environment Programme (technical section) and the Global Environment Fund (financing). In 2015, it had more than 3 million online records on offer for the Brazilian territory. As to Bolivia, it does not have any active BIS. In France, the Information System on Nature and Landscape (SINP) saw the light in 2005. It has since been managed by the Ministry in charge of Ecology, which is tasked with co-ordinating all biodiversity data-producing actors in France, from national authorities to amateur naturalists. The central platform of the SINP is organised by the National Museum of Natural History (MNHN) within the framework of the National Inventory of Natural Heritage (INPN). Although the global system is not yet fully implemented from a computing point of view, 35 million records are currently available online.

 

 

Figure 1. Evolution de la montée en charge de quatre IDG nationales et date de leur création[9].

Figure 1. Evolution of the Scalability of Four National SDIs and Date of Creation[9]

figure1

L’argumentaire développé ci-dessous s’appuie sur un suivi longitudinal et pluridimensionnel des IDG présentées, combinant exploration et fouille des données disponibles dans ces plateformes, observation des groupes de travail ou séminaires d’animation, analyse des rapports et documents officiels produit en leur sein, et nombreux entretiens auprès de leurs responsables et gestionnaires des quatre pays, depuis 2011[10]. Ces analyses croisées ont cherché à reconstituer les trajectoires de formation des IDG (choix institutionnels et organisationnels, coordination entre acteurs), à cerner les motivations au partage des initiateurs des projets et de leurs partenaires, à formaliser quantitativement et qualitativement les données ouvertes.

The argument developed below relies on the longitudinal as well as multidimensional follow-up of the SDIs introduced, combining the exploration and search for data available in these platforms, observation of workgroups or leadership seminars, analyses of official reports and documents produced within SDIs, and many interviews with SDI officials and managers in the four countries since 2011[10]. These cross-analyses sought to show how SDIs were created (institutional and organisational choices, co-ordination between actors), to understand what motivated project initiators and their partners to share information, as well as to quantitatively and qualitatively formalise open data.

Notre grille de lecture du lien entre information géographique telle qu’elle est disponible dans les IDG et justice s’articule autour de trois dimensions informationnelles de la justice spatiale. Tout d’abord, l’accès à l’information géographique peut être considéré comme un moyen d’exercice de la citoyenneté, de différents droits, dans la perspective du « droit à l’information » en plein essor depuis la fin des années 1990, tant en Europe qu’en Amérique du sud. L’accès est la moins géographique des trois dimensions informationnelles de la justice spatiale, mais permet d’interroger l’inégale répartition sociale du droit à l’information. La couverture de l’information géographique est une seconde dimension qui interroge principalement l’égalité de traitement spatial des citoyens par l’Etat, notamment face au risque. Elle permet d’interroger les effets de l’incomplétude de l’information géographique sur un territoire donné en termes de capacité des pouvoirs publics à hiérarchiser ses actions de prévention et d’intervention post-crise. Elle offre également la possibilité d’analyser les conséquences de l’homogénéité/hétérogénéité des informations fournies par les pouvoirs publics sur la capacité des citoyens à comparer leur situation locale avec celles d’autres lieux, et à protester contre des situations d’inégal accès à des services ou d’inégale exposition à des nuisances. Enfin, ce que nous nommerons la polyvalence institutionnelle de l’information constitue une troisième dimension qui permet d’interroger la capacité des IDG à être utilisées par une gamme très large de groupes sociaux afin d’exprimer leur singularité spatiale, donc à constituer un instrument d’équité au service de l’expression de manières différentes de voir le monde. Cette dimension permet d’interroger tout particulièrement les effets de standardisation de l’information sur la réduction ou au contraire la multiplication des modes de représentation de l’espace que l’on peut transmettre avec elle.

Our conceptual framework, addressing the issue of the link between geographic information available in SDIs and justice, is structured around three informational dimensions of spatial justice. First, access to geographic information can be considered as a means of exercising citizenship as well as different rights, in the perspective of “the right to information” which has been expanding rapidly since the end of the 1990s, in Europe as well as in South America. Although access is the least geographic of the three informational dimensions of spatial justice, it questions the unequal social distribution of the right to information. Geographic information coverage is the second dimension, which questions mainly the equality of the spatial treatment of citizens by the State, particularly in the face of environmental risks. It questions the consequences of incomplete geographic information on a given territory, in terms of the authorities prioritising prevention and post-crisis intervention actions. It also offers the possibility of analysing the consequences of information homogeneity/heterogeneity as supplied by the authorities, on the ability of citizens to compare their local situation with that of other places, and to protest against situations where access to services or exposition to pollution is unequal. Finally, what we will designate as the institutional polyvalence of information, constitutes the third dimension which questions the capacity of SDIs to be used by a very wide range of social groups in the expression of their spatial singularity, and therefore to constitute an instrument of equity to be used in expressing different ways of seeing the world. This dimension questions especially the effects of information standardisation on the reduction or, on the contrary, the multiplication of spatial representation methods that can be transmitted.

Nous analyserons donc successivement les IDG au prisme de ces trois dimensions de l’accès, de la couverture, puis de la polyvalence institutionnelle. Pour chacune de ces dimensions, nous nous intéresserons aux potentialités liées aux dimensions techniques des IDG, aux discours des acteurs sur leurs objectifs, ainsi qu’aux pratiques (modes de gestion de l’information et de négociation du partage) au sein des collectifs qu’elles animent.

We will analyse SDIs successively through the prism of these three dimensions of access, coverage and institutional polyvalence. For each one of these dimensions, we will take an interest in the potentialities linked to SDI technical dimensions, to the discourse of actors on their objectives, as well as to the practices (information management and sharing negotiation methods) within the collectives they organise.

 

 

2. Accès à l’information géographique et citoyenneté

2. Access to Geographic Information and Citizenship

 

 

En première analyse, les IDG semblent matérialiser un droit d’accès citoyen à l’information qui se structure et s’affirme au tournant du XXIè siècle, dans un nombre croissant de systèmes juridiques nationaux et internationaux. Il est donc tentant de les concevoir comme l’une des briques –techniques- d’une démocratie informationnelle en devenir. Cette matérialisation simplifie et universalise théoriquement l’accès à certaines données publiques, grâce à un partage par l’ouverture (open data), dans un processus qui n’est cependant pas dénué d’ambiguïtés, tant sur ses liens à la question de la « transparence » que de la portée réelle de cette universalisation de l’accès.

On first analysis, SDIs seem to materialise a citizen’s right of access to information, which became structured and established at the turn of the 21st century in an increasing number of national and international legal systems. It is tempting to think of them as one of the technical building elements of a constantly evolving informational democracy. Theoretically, this materialisation simplifies and universalises access to certain public data, thanks to open data, in a process which, however, is not devoid of ambiguity as far as its links to the issue of transparency and to the actual impact of access universalisation are concerned.

 

 

2.1. Le partage en ligne ou l’anti-boîte noire algorithmique

2.1. Sharing Platforms or Anti-Algorithmic Black Boxes

C’est tout d’abord du fait de leurs configurations techniques que les plateformes publiques de partage de l’information géographique s’inscrivent dans une logique de transparence par « l’ouverture ». Elles peuvent être décrites simplement comme des dispositifs de référencement, qui établissent des « géocatalogues » indexant les informations géographiques existantes dans les différentes institutions qui participent au réseau, permettant aux usagers de repérer lors de leur recherche par mots-clés les données les intéressant. Le succès et l’attractivité de ces initiatives reposent ainsi sur une multiplicité de démarches d’explicitation du contenu des bases, en particulier par le remplissage de « métadonnées » qui décrivent et permettent de tracer l’origine des données (auteurs, date et méthode de création…). On est dans ce cas aux antipodes d’une démarche consistant à former des « boîtes noires » masquant les algorithmes à l’origine des résultats consultables par l’usager. Bien au contraire, les plateformes de partage d’information géographique que nous étudions sont censées œuvrer pour le renforcement de la transparence de l’action de l’État en rendant accessible son patrimoine immatériel.

First of all, it is because of their technical configurations that public geographic information sharing platforms are part of a transparency principle underlain by “openness”. They can be described simply as referencing systems establishing metadata catalogue that, in turn, index geographic information existing in the different institutions taking part in the network, and enable users during their search by key-words to find data of interest. The success and appeal of these initiatives depend on the multiplicity of approaches for clarifying the database content, particularly by filling in “metadata” describing and tracing the origin of data (authors, date and method of creation etc.). In this case, this approach differs from those that create “black boxes” concealing the algorithms behind the results that can be consulted by users. On the contrary, the geographic information sharing platforms under study are supposed to work towards reinforcing the transparency of the State’s actions, by making its intangible heritage accessible.

Ce faisant, ces plateformes s’inscrivent dans une logique inverse à celle du « big data », ce dernier consistant à exploiter toute donnée accessible. Même si les infrastructures de données géographiques ont vocation à intégrer toute donnée relative à une thématique ou un territoire spécifié, elles procèdent avant tout à une sélection selon des objectifs explicites (aide à la décision, etc). Le volume, la variété et la vélocité des métadonnées collectées dans les IDG étudiées montrent d’ailleurs qu’elles constituent des corpus qui, à bien des égards, se différencient des « big data »[11] . Ainsi, ces dispositifs sont encore largement des systèmes pré-algorithmiques, dont l’alimentation reste très artisanale et parcimonieuse, ce dont témoigne le soin apporté par des équipes réduites à la mise en forme et à la documentation de quelques jeux de données vérifiés et corrigés lors de leur intégration à la plateforme[12]. Ils s’inscrivent moins dans une logique de « transparence » de l’action publique visant à donner accès à l’intégralité des informations possédées par l’État, que dans une démarche de service public, dont le but est de fournir un ensemble limité de ressources, documentées de telle façon que l’usager sache précisément ce qu’il peut ou ne peut pas faire de celles-ci. Bien que cette démarche générale d’explicitation n’interdise pas certaines restrictions d’accès, cet idéal reste prégnant dans les discours des membres des IDG, et motive en grande partie leur adhésion à ces initiatives.

In so doing, these platforms become part of a principle which is the opposite of the “big data” principle that consists in exploiting any accessible data. Even if spatial data infrastructures are meant to integrate any data relating to a specified thematic or territory, they proceed above all to make a selection according to explicit objectives (aid to decision etc.). In fact, the volume, variety and velocity of metadata gathered in the SDIs under study, show that they constitute corpuses that, in many respects, differ from “big data”[11]. These systems are still mainly pre-algorithmic and feeding information into them remains very artisanal and parsimonious, as shown by the care with which reduced teams input and document small sets of data which are verified and corrected during their integration into the platform[12]. They are less part of a logic underlying the “transparency” of public action aiming at making all information possessed by the State accessible, than of a public service approach aiming at supplying a limited set of resources, documented in such a way that users know precisely what they can or cannot do with them. Although this general clarifying approach does not prevent certain restrictions of access, this ideal remains meaningful in the discourses of SDI members and largely motivates their adherence to such initiatives.

 

 

2.2. Partage et droit d’accès à l’information : concomitance fortuite ou lien génétique ?

2.2. Sharing and the Right of Access to Information: Fortuitous Concomitance or Genetic Link?

On peut cependant légitimement s’interroger sur le rapport entre ces configurations techniques et les motivations au partage des groupes à l’origine de la création des infrastructures de données géographiques, notamment l’importance accordée au droit d’accès à l’information pour les citoyens dans leur volonté de partage. Dans les divers terrains étudiés, la simultanéité entre la promulgation de législations en faveur d’un droit à l’information lato sensu ou à l’environnement en particulier- et la mise en place de dispositifs de partage de l’information géographique pourrait laisser penser qu’il existe un lien génétique entre les deux processus (tableau 1). L’IDG française « Géoportail » a été créée dans le but spécifique d’appuyer les politiques environnementales de l’U.E. en constituant le « nœud » national d’une infrastructure informationnelle communautaire définie par la directive INSPIRE. Les plateformes sud-américaines sont lancées entre 2007 et 2012, quelques années après ou concomitamment à l’adoption de textes juridiques spécifiques sur le droit à l’information. Les IDG constituent dans le champ environnemental les principales expressions de la « transparence active » en matière de droit à l’information, qui implique la diffusion d’information par l’État indépendamment de demandes spécifiques de citoyens, la réponse au cas par cas à ces demandes constituant elle la « transparence passive ».

However, we can legitimately question the relationship between the technical configurations and the motivations to share of the groups behind the creation of spatial data infrastructures, and particularly the importance given to the right of access to information for citizens willing to share. In the various fields studied, the simultaneity between the promulgation of legislations in favour of a right to information lato sensu or to the environment in particular, and the establishment of systems for sharing geographic information, could make one think that there is a genetic link between the two processes (Tableau 1). French SDI Géoportail was created with the specific purpose of supporting EU environmental policies, by setting up the national “node” of informational community infrastructure defined by the INSPIRE Directive. The South American platforms were launched between 2007 and 2012, a few years later or concomitantly to the adoption of specific laws on the right to information. In the environmental field, SDIs constitute the main expressions of “active transparency” as regards the right to information, which implies the dissemination of information by the State independently from specific requests by citizens, where meeting these requests on a case-by-case basis constitutes “passive transparency”.

Il n’est cependant pas évident que ces plateformes constituent une réponse spécifique à ces évolutions juridiques. Les modes de justification officiels de leur création permettent de conclure que l’accès citoyen à l’information constitue une motivation secondaire. La première version du projet de loi visant à instituer l’IDG nationale argentine la présente par exemple comme un outil ayant avant tout pour objectif de faciliter les « prises de décision » de la part de l’État[13]. De façon similaire, les textes officiels construisant l’IDG bolivienne la présentent comme jouant « un rôle stratégique pour la gestion des différentes institutions de l’Etat Plurinational de Bolivie », l’information géographique étant pour l’Etat « d’une importance vitale pour son organisation, sa planification et la prise de décision adéquate et opportune », sans mention aucune à l’accès citoyen[14]. De la même façon, le décret de fondation de l’IDG nationale brésilienne en 2008 ne mentionne aucunement ce droit, et formule trois raisons pour la création de la plateforme : le « développement du pays, la diffusion des normes cartographiques de l’État, la réduction des dépenses publiques liées à la duplication de jeux de données par les administrations ». Les objectifs du Système National de Données Biologiques argentin correspondent à la consolidation d’un outil à destination des scientifiques, et ne mentionnent qu’à la marge le droit d’accès pour l’ensemble des citoyens[15]. En Europe, le préambule de la Directive INSPIRE propose, pour contextualiser et justifier sa mise en œuvre, un argumentaire organisé autour de 35 items dont un seul (n°26) fait référence à la nécessité de « faciliter l’accès aux données géographiques au-delà des frontières administratives et nationales ». Cette ouverture au « public » est alors proposée non dans une perspective d’accès facilité aux citoyens mais « en vue de favoriser le développement de valeur ajoutée par des tiers »[16].

Yet the fact that these platforms constitute a specific response to legal evolutions is not obvious. The official methods justifying their creation lead to the conclusion that citizens’ access to information constitutes a secondary motivation. The first version of the bill aiming at establishing the Argentinian national SDI introduces it, for example, as a tool meant above all to facilitate “decision making” by the State[13]. Similarly, legislations on the Bolivian SDI introduce it as playing a “strategic role in the management of the different institutions of the Plurinational State of Bolivia”, geographic information being “of vital importance for the organisation, planning as well as adequate and opportune decision making” of the State, with no mention whatsoever of citizens’ access[14]. Likewise, the decree for the foundation of the Brazilian national SDI in 2008, does not make any mention of this right, and formulates three reasons for the creation of the platform: the “country’s development, the diffusion of the State’s mapping standards, [and] the reduction of public expenses linked to the duplication of datasets by administrations”. The objectives of Argentina’s National Biological Data System correspond to the consolidation of a tool meant for scientists, and only marginally mention the right of access for all citizens[15]. In Europe, the preamble of the INSPIRE Directive contextualises and justifies its implementation with an argument organised around 35 items. Only one (item n°26) makes reference to the need to “facilitate access to geographic data beyond administrative and national borders”. In this instance, opening up to the “public” is not proposed with a view to facilitating access to citizens, but “with a view to favouring third party value-added development”[16].

 

 

Tableau 1. Comparaison des dates de création de plateformes de partage et de promulgation des principaux textes légaux en faveur d’un droit à l’information environnementale

Table 1 – Comparison of platforms creation and the adoption of legislation on the Right to environmental information

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Seul fait exception à ce tableau le Système d’Information sur la Nature et le Paysage, dont le préambule à son protocole (2013) mentionne explicitement l’accès « au plus grand nombre » comme un objectif central, se référant spécifiquement à Aarhus, INSPIRE et d’autres textes incluant des éléments sur le droit à l’information[17]. On peut estimer que c’est l’importance des naturalistes amateurs (associations) dans les réseaux de l’information sur la biodiversité qui explique cette priorisation de l’accès citoyen relativement aux autres dispositifs analysés, dont les réseaux sont plutôt composés d’experts.

The only exception in Table 1 is the protocol (2013) of the French Information System on Nature and Landscape, in that its preamble explicitly mentions access “to the greatest number” as a central objective, referring specifically to Aarhus, INSPIRE and other legislations encompassing elements on the right to information[17]. It seems that the high number of amateur naturalist associations, in the French biodiversity information networks, is what explains the prioritisation of citizens’ access, compared to the other systems which have networks composed of experts instead.

On a donc là un paradoxe fort du « partage » de l’information géographique : bien que favorisant concrètement, effectivement, un meilleur accès citoyen, ces dispositifs ne semblent pas portés par un projet directement enraciné dans une volonté d’extension des droits à l’information, directement référé aux évolutions juridiques. Nous explorerons plus avant les raisons de cet apparent paradoxe.

In this light, there is a strong paradox as far as geographic information sharing is concerned: although concretely they do favour better access for citizens, these systems do not seem to result from a legal evolution whereby rights are extended to information. We will explore the reasons for this apparent paradox further.

 

 

2.3. Partager signifie parfois exclure

2.3. Sometimes Sharing Means Excluding

L’essor du partage en ligne des données géographiques masque des processus souvent paradoxaux et contradictoires : si globalement l’accès à l’information est amplifié pour la société, celui-ci se différencie selon les niveaux territoriaux et les différents acteurs de ce partage.

The fact that sharing geographic data online developed rapidly, has also resulted in the concealment of often paradoxical and contradictory processes: while, globally, access to information is amplified for society, it becomes differentiated according to the territorial levels and the different actors sharing.

La construction des IDG met en relation différents niveaux territoriaux qui, malgré leur articulation institutionnelle par la création de protocole d’échanges, peuvent conserver des logiques différentes en termes de diffusion des données. En règle générale, plus on descend en hiérarchie dans les niveaux administratifs, plus les restrictions d’accès aux plateformes sont fortes. Cela tient en partie à la variation des formes de l’échange entre les partenaires et l’échelle territoriale. Les plateformes nationales tirent leur légitimité de leur capacité à offrir l’accès à un maximum de données à tous, sans identification des usagers (ouverture). A contrario, les IDG régionales fondent leur légitimité sur l’identification claire des acteurs d’un réseau, et fonctionnent plus volontiers selon une logique de fermeture autour de ce réseau, cantonné à un échange de données. Une enquête que nous avons mené à l’été 2015 sur 44 IDG françaises[18] révèle ainsi que 60% d’entre-elles imposent l’identification des utilisateurs et la signature d’une charte pour l’accès à des fonctions « avancées ». Les pratiques entre les échelons nationaux et régionaux sont cependant fortement différenciées et même inversées : un quart seulement des plateformes nationales exigent la signature d’une charte contre trois quarts des plateformes régionales.

Building SDIs links different territorial levels that, despite their institutional structuring through the creation of exchange protocols, can maintain different approaches in terms of data diffusion. As a general rule, the lower the level in the administrative hierarchy, the higher the restrictions in accessing a platform. This is partly due to the variation in the exchange forms between partners and the territorial scale. National platforms draw their legitimacy from their capacity to give access to a maximum of data to everyone, without users having to identify themselves (open network). A contrario, regional SDIs base their legitimacy on the fact that the actors of a network are clearly identified, and operate more easily using a closed network approach, limited to data exchange. In this regard, we conducted a survey on 44 French SDIs[18] in the summer of 2015, and found that 60% of them required users to identify themselves and sign a charter before being able to access “advanced” functions. However, practices between national and regional levels are highly differentiated and even reversed: only one quarter of national platforms require signing a charter against three quarters of regional platforms.

Face aux coûts d’animation et de maintenance des infrastructures numériques locales, certaines plateformes s’étant « ouvertes » au cours des années 2000 sont actuellement tentées, en France du moins, de rétablir des systèmes différenciés d’accès favorisant d’abord les contributeurs à la plateforme, voire ceux prêts à payer pour accéder aux données. Le mouvement vers l’open data n’est pas, de toute évidence, un processus sans retour en arrière, et la multiplication des péages qui marque pour certains la « fin » de l’Internet comme réseau ouvert (Beaude, 2014) affecte également le champ public. Ces nouvelles enclosures informationnelles ne semblent pas encore affecter les IDG sud-américaines, certes beaucoup plus récentes que leurs homologues françaises.

Confronted with the cost of organising and maintaining local digital infrastructures, platforms which opened up during the 2000s are currently tempted, in France at least, to restore differentiated access favouring those who contribute to platforms, or even those who are prepared to pay to access data. The open data movement is not, quite evidently, a process with no return, and the multiplication of tolls which, for some, marks the “end” of Internet as an open network (Beaude, 2014), is also affecting the public field. These new informational enclosures do not yet seem to affect South American SDIs, which are admittedly far more recent than their French counterparts.

Ces nouvelles enclosures apparaissent également à la faveur de tensions inhérentes aux grandes plateformes de partage, auxquelles participent de nombreux acteurs dont les agendas et les intérêts divergent. La structuration du Système d’Information sur la Nature et le Paysage (SINP) en France s’est heurtée à la crainte des contributeurs de perdre le contrôle des données qu’ils connecteraient à la plateforme nationale. Un consensus a finalement émergé afin de donner le droit à ces contributeurs de décider de l’échelle de restitution de leurs données : par défaut, toute donnée intégrée au SINP ne sera restituée pour le public que dans une maille de 10 x 10 kilomètres de côté, ce « floutage géographique » permettant de ne pas divulguer la localisation exacte d’espèces perçues comme sensibles par les producteurs de la donnée. A tout moment, ces producteurs pourront modifier ce floutage et diffuser ces données à leur précision maximale[19]. On voit bien dans ce dernier cas comment la volonté de la coordination nationale de maintenir l’intérêt pour la plateforme de la part de contributeurs volontaires (et donc susceptibles de quitter le projet) a conduit à une segmentation de ses publics, avec des effets évidents en termes de justice spatiale. Tandis que le grand public n’aura accès, sur ces portions du territoire, qu’à des informations agrégées dans une maille de 10 kilomètres de côté, seuls certains acteurs de la plateforme, dont l’État, pourront disposer de l’intégralité des données à leur précision maximale. Ce cas est emblématique des contraintes des projets de partage : afin d’assurer l’enrôlement des contributeurs au système, on leur consent des droits différenciés à restreindre l’accès à leurs données.

These new enclosures also appear thanks to the tensions inherent to major sharing platforms, to which many actors whose agendas and interests diverge participate. The structuring of the Information System on Nature and Landscape (SINP), in France, came up against the contributors’ fear of losing control over the data they connect to the national platform. A consensus was finally reached, allowing contributors to decide the scale at which their data could be restored: by default, any data integrated into the SINP was to be restored to the public using a 10 km² grid only. This “spatial fuzziness” prevents the exact location of species, perceived as sensitive by data producers, from being revealed. These producers can, at any time, modify the fuzziness level and circulate the data with maximum precision[19]. In the last case, we can see how the national co-ordinating body wanting to maintain an interest in the platform on behalf of voluntary contributors (who are therefore likely to leave the project), has led to its publics being segmented, with obvious effects in terms of spatial justice. While the wider public will only have access to information on sections of the territory incorporated in a 10 km² grid, only specific platform actors, including the State, will have access to all available data with maximum precision. This case is symbolic as far as constraints in sharing projects are concerned: in order to ensure that system contributors will be involved, they are granted differentiated rights to restrict access to their own data.

Il apparaît donc clairement que l’accroissement des possibilités d’accès à l’information géographique –et donc de l’exercice de la citoyenneté qui y est associé- est aujourd’hui certain, mais qu’il s’avère être un effet collatéral d’un processus semblant viser autre chose que les droits citoyens. Cet accroissement relèverait donc surtout d’un « effet d’instrument » (Lascoumes et Le Galès, 2004) et non d’une politique cohérente en faveur de la transparence de l’État. Quant aux inégalités d’accès à l’information, fondatrices d’inégalités sociales et spatiales plus profondes, elles s’atténuent plutôt que de disparaître, tout en se recomposant : le gradient d’accès décroît ainsi sensiblement au fur et à mesure qu’un acteur social est éloigné du « cœur » du dispositif de partage.

While it clearly appears that, today, there is a definite increase in geographic information access potential – and therefore in the exercise of citizenship associated with it, it turns out to be the collateral effect of a process which is seemingly aiming at something other than citizens’ rights. This increase relates especially to an “instrument effect” (Lascoumes and Le Galès, 2004), not to a coherent policy in favour of State transparency. As to the inequalities of information access underlying deeper social and spatial inequalities, they subside rather than disappear, while restructuring themselves: the lesser is the social proximity to the core of the data sharing system, the lower is its accessibility.

 

 

3. Couverture de l’information géographique, égalité et risque

3. Geographic Information Coverage, Equality and Risk

 

 

Au-delà des questions d’accès, c’est en termes de « couverture » que peuvent être analysés les rapports entre information géographique numérique et justice spatiale. Contribuant à rassembler des patrimoines cartographiques dispersés, et à générer de nouveaux référentiels cartographiques[20], les IDG participent théoriquement à parfaire la couverture informationnelle des territoires sous leur ressort, en augmentant le nombre de données et en les homogénéisant ; elles seraient donc un instrument en faveur de l’égalité des citoyens quant au niveau d’information concernant leurs espaces. Mais qu’en est-il dans les différents cas étudiés ici ?

The relationship between digital geographic information and spatial justice can be analysed in terms of “coverage”, beyond access issues. Where SDIs contribute to gathering together scattered cartographic heritage and generating new mapping reference systems[20], they theoretically contribute to perfecting the informational coverage of the territories under their jurisdiction, by increasing the quantity of data and homogenising it. As such, SDIs are instruments in favour of citizen equality, as far as the level of information on their spaces is concerned. But what about our different case studies?

 

 

3.1. De l’archipel au continent : standardisation et interopérabilité

3.1. From Archipelago to Continent: Standardisation and Interoperability

Les IDG sont porteuses –dans le domaine de l’information géographique- d’une vague de fond technique permettant progressivement de combiner des jeux de données de taille croissante, couvrant chaque fois mieux les territoires et réduisant l’hétérogénéité des formats de données. Elles participent activement à une tendance à standardiser les informations géographiques et les outils qui permettent de les gérer. La circulation des équipes participant au montage de ces IDG parmi de nombreuses instances territoriales[21], contribuent à l’homogénéisation des formats de données et à l’adoption de logiciels communs. L’un des grands enjeux pour le succès et la pérennité d’une plateforme étant d’être visible sur l’Internet national et international, la tendance est à l’adoption de standards d’interopérabilité permettant que les données d’une IDG soient consultables sur d’autres IDG, éventuellement installées dans d’autres pays, grâce aux « services web ». Le montage simultané de nombreuses IDG et leur interconnexion à l’échelle de la planète permettent ainsi la constitution rapide d’une masse croissante d’informations qui, bien que dispersées sur différents serveurs, peuvent aisément être rassemblées par un usager et traitées simultanément. Standardisation et interopérabilité permettent alors de connecter spatialement (formant « continent ») des jeux de données qui ne pouvaient « dialoguer » auparavant, et qui évoluaient indépendamment les uns des autres (formant « archipel »).

In the field of geographic information, SDIs are a groundswell of technicality progressively making it possible to combine datasets growing in size, each time offering better coverage on the territories and reducing the heterogeneity of data formats. They actively take part in the tendency to standardise geographic information and the tools to manage such information. The circulation of the teams taking part in the organisation of SDIs, among many territorial authorities[21], contributes to the homogenisation of data formats and the adoption of shared software. Where one of the main issues for the success and continuity of a platform is to be visible on Internet, the tendency is to adopt interoperability standards, so that the data of a specific SDI can be consulted on other SDIs potentially set up in other countries, thanks to “web services”. Setting up and interconnecting many SDIs at the same time worldwide, leads to the rapid constitution of a growing mass of information that, although scattered onto different servers, can easily be gathered by users and dealt with simultaneously. Standardisation and interoperability then make it possible to spatially connect (“continent”) datasets that could not “interact” before, and that were evolving independently from one another (“archipelago”).

Dans le domaine environnemental en particulier, où la nature des processus en jeu exige souvent des analyses transfrontalières, indépendantes des périmètres administratifs, la possibilité de constituer des jeux de données ad hoc provenant d’institutions et de territoires disparates constitue un changement important lié à ces évolutions techniques. Ce vaste mouvement permet également de démocratiser les possibilités de changer d’échelle de réflexion pour un acteur[22], en créant des bases sur de vastes territoires à partir de la concaténation de plusieurs jeux de données produits par des acteurs différents et à de plus grandes échelles. Dans le domaine spécifique de la biodiversité enfin, la numérisation et mise en ligne de collections rassemblées à l’époque coloniale et déposées dans les musées européens et nord-américains permet leur rapatriement virtuel dans les territoires où les spécimens ont été collectés, et leur intégration à des bases nationales[23].

In the environmental domain in particular, where the nature of the processes at play often require cross-border analyses that are independent of administrative perimeters, the potential for putting together ad hoc datasets originating from disparate institutions and territories, represents an important change linked to these technical evolutions. This vast movement also makes it possible to democratise the possibility for stakeholders to think on a different scale[22], by creating databases on vast territories from the concatenation of several datasets produced by different actors and on larger scales. Finally, in the specific domain of biodiversity, the digitisation and on-lining of collections gathered during colonial times and left in European and North American museums, leads to their virtual repatriation in the territories where the specimens were gathered, and to their integration into national databases[23].

Standardisation et interopérabilité jouent donc théoriquement en faveur d’un double mouvement : celui d’une démocratisation du monopole étatique permettant de « lire » les territoires à des échelles supérieures au niveau local, mais également de penser ces territoires à des échelles supranationales ou transfrontalières. Dans les deux cas, les implications en termes de justice spatiale sont claires : tant l’État que les citoyens sont en capacité de mieux comparer des lieux, donc de détecter des différences de développement ou encore d’exposition aux risques, offrant par là des pistes afin de corriger ces écarts.

Theoretically, standardisation and interoperability work in favour of a double movement: that of the democratisation of the State monopoly making it possible to “read” the territories on scales higher than the local one, and also to conceptualize these territories on supranational or cross-border scales. In both cases, the implications in terms of spatial justice are clear: the State as much as citizens are able to better compare places, and therefore to detect differences in the development or still in the exposure to risks, thereby offering leads with a view to correcting these gaps.

 

 

3.2. En quoi les IDG ont-elles un impact sur l’égalité de traitement informationnel des citoyens ?

3.2. How Do SDIs Impact on the Equality of Citizens’ Informational Treatment?

L'analyse de la couverture territoriale des données mises en partage dans les infrastructures nationales étudiées (figure 2) amène à questionner l'un des arguments récurrents de justification de la mise en œuvre de ces plateformes : celui de l'équitable traitement des territoires par les autorités publiques qui se manifesterait par une couverture homogène. Argument souvent avancé en contrepoids des initiatives des multinationales, comme Google Maps, qui concentreraient leurs efforts uniquement sur les zones à forts enjeux commerciaux[24]. L'extraction des emprises des données géographiques indexées dans les infrastructures bolivienne, brésilienne et française permet de s'interroger sur ce que serait une couverture plus "juste" du territoire. Ainsi, la densité de données brute (collection n°1) ou pour 1000 km2 (collection n°2) met en évidence de forts contrastes : Altiplano/Oriente ou ouest/est en Bolivie (a) et au Brésil (b), et dans/hors de la « diagonale du vide » en France (c). Ramené à 1000 habitants (collection n°3), les contrastes sont moins saisissants mais permettent de souligner la déconnexion entre densité de population (collection n°4) et densité de données : le bassin amazonien de Bolivie - départements de Pando (d) et Beni (e) - et la frange sud-est de l’Amazonie brésilienne (g) sont mieux couverts que des aires urbaines importantes comme Cochabamba (f) en Bolivie ou les aires métropolitaines de Rio (h) et São Paulo (i) au Brésil. De même en France, les départements des Deux-Sèvres à la Lozère (j) semblent mieux couverts proportionnellement à leur nombre d'habitants que ceux de l'Ile-de-France (k). Ce petit exercice permet donc de souligner que l'inégale répartition de l'information et ses discontinuités spatiales demeurent au sein des IDG nationales. Il tend même à se renforcer avec la montée en puissance des IDG. En effet si à leur lancement ces plateformes se concentrent sur les grands référentiels cartographiques disposant d'une couverture exhaustive, leur montée en charge les conduit à démultiplier les partenariats divers (enrôlement) et à intégrer progressivement des productions cartographiques locales, renforçant un "effet de patchwork". C'est là un autre effet paradoxal de ces plateformes de partage : plus les IDG gagnent en maturité, plus elles cherchent à tendre vers l'exhaustivité organisationnelle en nouant des partenariats avec l'ensemble des acteurs de la sphère publique et plus la couverture spatiale de leurs données apparait alors hétérogène.

An analysis of the territorial coverage of the data up for sharing in the national infrastructures under study (Figure 2), brings one to question one of the recurrent arguments justifying the implementation of these platforms: that of the equitable treatment of territories by governments in the form of homogenous coverage. This argument is often put forward to counterbalance the initiatives of multinationals, such as Google Maps, which only focus on areas with high commercial stakes[24]. The extraction of indexed spatial data in the Bolivian, Brazilian and French infrastructures makes it possible to question what a more “equitable” coverage of the territory would be like. As such, the density of raw data (collection n°1) or for 1000 km² (collection n°2) reveals high contrasts: Altiplano/Oriente or West/East in Bolivia (a) and Brazil (b), and in/outside the major area of low population densities in France (c). Brought down to 1000 inhabitants (collection n°3), contrasts are less striking but make it possible to show the disconnection between population density (collection n°4) and data density: the Amazonian Basin of Bolivia – Districts of Pando (d) and Beni (e) – and the South-East fringe of the Brazilian Amazon (g) have better coverage than major urban areas such as Cochabamba (f) in Bolivia, or the metropolitan areas of Rio (h) and São Paulo (i) in Brazil. Likewise, in France, the départements of Deux-Sèvres up to Lozère (j) seem to have better coverage proportionally to their number of inhabitants than those of Ile-de-France (k). This comparison shows that the distribution of information and its spatial discontinuities remain unequal within national SDIs. It even tends to show a reinforcement with the rise of SDIs. Indeed, when they are launched, these platforms focus on large mapping reference systems benefitting from exhaustive coverage. Parallel to the increase in the amount of data they store, SDIs enroll more and more partners and progressively integrate local cartographic productions, giving rise to a “patchwork effect”. This is another side-effect of sharing platforms: the more SDIs gain in maturity, the more they seek to strive towards organisational exhaustiveness by forming partnerships with all actors of the public sphere, and the more the spatial coverage of their data appears heterogeneous.

 

 

Figure 2. Couverture territoriale des données géographiques cataloguées dans trois Infrastructures de Données Géographiques.

Figure 2. Territorial Coverage of Metadatas in Three Spatial Data Infrastructures.

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3.3. Couverture, souveraineté et Etat développeur

3.3. Coverage, Sovereignty and the development State

C’est sans doute moins dans leur capacité à renforcer l’égalité de traitement informationnel des citoyens que dans leur capacité à renforcer la légitimité de l’État comme acteur souverain du développement territorial que se situent aujourd’hui les principaux enjeux des IDG en termes de justice spatiale. En Amérique du sud du moins, le développement de plateformes en ligne de données géographiques s’inscrit dans une volonté de réduire les zones hors d’atteintes des politiques publiques parce que mal cartographiées, en reconstruisant les capacités informationnelles de l’État. Suite au démantèlement des agences nationales chargées de produire des cartographies nationales des territoires et des ressources durant le « roll back » néolibéral des années 1980-90, la production de données géographiques a été externalisée et dispersée auprès d’une myriade d’acteurs : ONG, coopération internationale, consultants privés… La logique inhérente au « Nouvel esprit du capitalisme » (Boltanski et Chiapello, 1999) fragmente les politiques publiques nationales en « projets » circonscrits dans le temps et l’espace, sans articulation entre eux, qui commencent chacun à produire des données géographiques ad hoc, souvent redondantes, et qui restent aux mains de leurs auteurs une fois le projet bouclé (Lerch, 2014). Les IDG nationales sont explicitement construites au cours de la décennie 2000 pour « rassembler » ce patrimoine largement financé par l’argent public mais circulant sous le manteau dans des réseaux interpersonnels privés, ou immobilisé dans des serveurs de l’administration. C’est en Bolivie qu’est le plus clairement formulé cet objectif de construction d’une « gouvernementalité post-néolibérale » par une nouvelle politique de l’information géographique fondée sur le partage en ligne (Lerch, 2013). Dans la pratique, l’équipe de l’IDG bolivienne a fortement appuyé les équipes gouvernementales afin de construire une vision géographique plus homogène du territoire national, permettant notamment de planifier les infrastructures nécessaires aux politiques redistributives du gouvernement Morales (versement des retraites sur l’ensemble du territoire). En continuité avec les analyses liant développement d’institutions cartographiques et construction ou défense de la souveraineté de l’État (Anderson, 1983; Craib, 2000), on peut affirmer que l’État bolivien a cherché au travers son IDG à réunifier les représentations de son territoire et son environnement (Gautreau, 2016).

In terms of spatial justice, the main SDI issues today stand probably less in their capacity to reinforce the equality of informational treatment of citizens, than in the reinforcement of the legitimacy of the State as sovereign actor of territorial development. In South America at least, the development of online spatial data platforms is part of a will to reduce areas beyond the reach of public policies due to the fact they are badly mapped, by rebuilding the informational capacities of the State. Following the dismantling of national agencies in charge of producing maps of national territories and resources during the neoliberal “roll back” of the 1980s-1990s, the production of spatial data was outsourced and scattered amongst a myriad of actors: NGOs, international institutions, private consultants… The principle inherent to the “new spirit of capitalism” (Boltanski and Chiapello, 1999) divides national public policies into “projects” confined to time and space, with no articulation between them, each starting to produce ad hoc and often redundant spatial data and remaining in the hands of their authors once the project is completed (Lerch, 2014). National SDIs were created explicitly during the 2000s to “gather together” a heritage that was mainly financed by public funds, but circulating clandestinely in private interpersonal networks, or immobilised in government servers. It is in Bolivia that this objective of building “post-neoliberal governmentality” by means of a new geographic information policy based on online sharing (Lerch, 2013) is the most clearly formulated. In practice, the Bolivian SDI team gave a lot of support to government teams with a view to building a more homogenous geographic vision of the national territory, making it possible in particular to plan the infrastructures needed by the redistributive policies of the Morales government (payment of pensions over the entire territory). In continuity with the analyses connecting the development of mapping institutions to the construction or defence of the State’s sovereignty (Anderson, 1983; Craib, 2000), we can assert that the Bolivian State sought, through its SDI, to reunify the representations of its territory and environment (Gautreau, 2016).

Sur un autre plan, géopolitique celui-là, le développement des IDG contribue à réaffirmer une souveraineté « informationnelle », dans le domaine de l’environnement tout particulièrement. Au Brésil, l’investissement dans l’IDG nationale et dans le Système d’information sur la biodiversité brésilienne (Sibbr) s’inscrit en continuité avec la politique d’émancipation du pays de sa dépendance des fournisseurs internationaux (nord-américains) de données géographiques, qui l’a conduit dès les années 1990 à se doter de satellites propres d’observation de la terre (programme C-bers en partenariat avec la Chine).

At the geopolitical level, the development of SDIs contributes to reasserting “informational” sovereignty, in the environmental field in particular. In Brazil, investing in the national SDI and in the Information System on Brazilian Biodiversity (SIBBR), is part of the country’s policy of emancipation from international (and particularly North American) suppliers of spatial data, which led it as early as the 1990s to endow itself with satellites specifically for observing Earth (C-bers programme in partnership with China).

En France, l’argument de la souveraineté informationnelle est également repris, depuis peu, par les opérateurs historiques. Ainsi, confronté à l’émergence de nouveaux producteurs de données (des multinationales comme Google aux communautés issues du libre comme OpenStreetMap) et à une baisse de 30% des recettes liées aux données depuis 2009, l’Institut Géographique National (IGN) revoit progressivement son modèle économique et son directeur général, Pascal Berteaud, affirmait dans une interview à un journal professionnel en 2014[25] : « les données d’autorité restent un instrument de souveraineté ». Il positionne de fait l’Institut comme le garant d’un traitement homogène du territoire national et renvoie dos à dos les géants du web et les tenants de l’économie collaborative[26]. En France, il semble donc que la pression concurrentielle et les tensions budgétaires soient autant, si ce n’est plus, à l’origine de ces initiatives qu’un besoin de réappropriation des ressources informationnelles du pays.

In France, the informational sovereignty argument has also been used again recently by historical institutions. Confronted with the emergence of new data producers (i.e. from multinationals like Google to communities stemming from the OpenStreetMap project), and with a 30% sales decrease since 2009, the National Geographic Institute (IGN) has been reviewing its economic model progressively. In this regard, Director General Pascal Berteaud, in an interview for a professional journal in 2014[25], asserted that “government data remains an instrument of sovereignty”. By saying this, he established that the Institute guarantees the homogenous treatment of the national territory, thereby dismissing Web giants and supporters of collaborative economy[26]. In France, it seems that competitive pressure and budget tensions are as much, if not more, the cause of these initiatives as the need for re-appropriating the country’s informational resources.

En somme, nous voyons bien ici comment le « partage » est un nouvel instrument de politique publique, avant que d’être un outil au service d’une démocratie informationnelle. Les effets en termes de justice spatiale de ces institutions varient donc en fonction du regard que l’on porte sur le renforcement de l’État grâce aux IDG : dans une Amérique du sud qui se revendique « post-néolibérale », ce dernier peut être perçu comme le vecteur d’une démocratisation ample de la société (le cas bolivien est emblématique à ce titre), à laquelle participe l’amélioration de la couverture informationnelle du territoire. En France, certains secteurs peuvent au contraire y voir l’expression d’un pouvoir excessif, ayant des effets d’occultation de modes différents de pratiquer et de penser le territoire : c’est notamment le cas de certaines associations de naturalistes amateurs et de certains chercheurs, qui voient dans la gestation du SINP un outil d’imposition de représentations trop normées de l’environnement français, au détriment d’expressions plus locales et diversifiée (Alphandéry et al., 2012; Alphandéry and Fortier, 2012). Au-delà des enjeux de couverture de l’information géographique, c’est donc bien également la question de la diversité des représentations du territoire au sein des IDG qui est posée.

In short, we can clearly see here how “sharing” has become a new instrument of public policy, before being a tool at the service of informational democracy. The effects in terms of spatial justice of these institutions, vary according to the outlook one has on the reinforcement of the State thanks to SDIs: in South America which claims to be “post-neoliberal”, the State can be perceived as the vector of the extensive democratisation of society (the case of Bolivia is symbolic in this regard), which is reinforced by the improvement of the territory’s informational coverage. In France, certain sectors, on the contrary, see in it the expression of excessive power, resulting in the eclipse of different modes of practising and conceiving the territory: this is particularly the case of certain amateur naturalist associations and researchers, who see in the preparation of the SINP a tool for imposing excessively normed representations of the French environment, to the detriment of more local and diversified expressions (Alphandéry et al., 2012; Alphandéry and Fortier, 2012). Beyond issues relating to geographic information coverage, the issue of the diversity of territorial representations within SDIs is also being raised.

 

 

4. Polyvalence institutionnelle, information géographique et équité

4. Institutional Polyvalence, Geographic Information and Equity

 

 

Après avoir analysé le rappport entre information géographique numérique et justice spatiale en termes d’accès, puis de couverture informationnelle, il nous reste à examiner les enjeux liés à polyvalence des dispositifs étudiés ici (les IDG). Cette polyvalence de réfèreà leur capacité à être utilisés par une gamme très large de groupes sociaux afin d’exprimer leur singularité spatiale, donc à constituer un instrument d’équité au service de l’expression de manières différentes de voir le monde.

After analysing the relation between digital geographic information and spatial justice in terms of access and informational coverage, we still need to examine issues related to the polyvalence of the systems being studied (SDIs). ‘Polyvalence’ refers to their capacity to be used by a very wide range of social groups in order to express their spatial singularity, and therefore to represent an instrument of equity at the service of expressing different ways of seeing the world.

 

 

4.1. Quelle diversité des représentations de l’espace dans les IDG ?

4.1. What is the Diversity of Representations of Space in SDIs?

Une première façon de répondre à cette question est d’analyser le contenu des IDG. L’étude des organismes associés aux données diffusées par les IDG nationales permet ainsi de souligner la relativement faible diversité des contributeurs de ces plateformes (figure 3). Le cas français illustre la très large majorité des données représentées par l’État (90%) dont près de 70% en provenance des services déconcentrés (il s’agit en particulier des directions départementales des impôts qui gèrent le plan cadastral). Il est à noter que les acteurs de la recherche et les ONG sont aujourd’hui quasi inexistants en France et au Brésil. Dans ce dernier pays, ce constat est renforcé puisque les données proviennent exclusivement des services de l’État fédéral (93%) ou d’un état fédéré voire de plusieurs états fédérés (comme c’est le cas du SIPAM - Sistema de Proteção da Amazonia - qui couvre toute l’Amazonie légale). Par ailleurs, l'essentiel des contacts (80%) relève de l'Institut Brésilien de Géorgaphie et Statistique, symbole d’une IDG nationale très centralisée et, à ce jour, uniquement fondée sur des données du pouvoir central. La Bolivie se distingue par une moindre part des données de niveau national (59%), une part notable de la coopération étrangère (25%) et une participation des ONG, Universités et institutions privées à hauteur de 7%. On peut cependant estimer que cette situation correspond moins à l’institutionnalisation de la participation d’acteurs diversifiés dans l’IDG qu’à un héritage : une part essentielle des données géographiques produites dans les années 1990-2000 l’ont été par la coopération internationale et les ONG (Lerch, 2013), l’Etat ayant abandonné ses prérogatives en la matière. GeoBolivia a donc intégré cet héritage, sans que cela signifie l’établissement de partenariats avec ces acteurs extra-étatiques, qui ne sont d’ailleurs plus les mêmes aujourd’hui.

One way of answering this question is to analyse the content of SDIs. The study of organisations associated with data disseminated by national SDIs, makes it possible to highlight the relatively low diversity of platform contributors (Figure 3). The French case illustrates the very large majority of data represented by the State (90%), of which close to 70% come from decentralised services (the various Government tax authorities in particular, which manage the cadastral map). Of note is the fact that, today in France and Brazil, the Academics and NGOs are almost non-existent. In Brazil, this finding is reinforced since data comes exclusively from the services of the Federal State (93%) or from one or even several federated States (as is the case for the SIPAM – Sistema de Proteção da Amazonia – which covers the entire Legal Amazon). Moreover, most contacts (80%) come under the Brazilian Institute of Geography and Statistics, a symbol of a highly centralised national SDI and, to this day, based only on data coming from the central government. Bolivia can be distinguished by a smaller part of national level data (59%), a notable part of foreign co-operation (25%) and up to 7% of participation from NGOs, universities and private institutions. However, we can estimate that this situation corresponds less to the institutionalisation of the participation of diversified actors in SDIs, than to a legacy: most of the spatial data in the 1990s-2000s was produced thanks to international co-operation and NGOs (Lerch, 2013), the State having abandoned all prerogatives in this regard. Where GeoBolivia integrated this legacy, it did not mean the establishment of partnerships with extra-governmental actors, which in fact are no longer the same today.

 

 

Figure 3. Fréquence d'apparition par type d'organisation dans les métadonnées des géocatalogues bolivien, brésilien et français, en 2014.

Figure 3. Frequency of mention by Type of Organisation in the Metadata of Bolivian, Brazilian and French SDIs in 2014

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Outre cette faible inclusion de représentations non étatiques, les pratiques sociales liées à l’usage des plateformes étudiées montrent que leur potentiel d’amélioration de la justice spatiale à l’échelle nationale ou internationale est encore sous-utilisé. Le droit à l’information environnementale est porteur d’une vision avant tout locale des effets de l’information en termes de justice : la plupart des textes latino-américains sont inspirés de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement, dont l’article 10 stipule la nécessité de favoriser l’accès à l’information pour les citoyens afin d’améliorer leur participation aux décisions publiques et leur possibilités de recours en justice en cas d’atteintes à leur santé et à leur cadre de vie. L’important, dans ce corpus juridique, est d’accéder aux informations sur le lieu où l’on vit, où l’on est exposé à d’éventuels risques. L’article 10 de la Déclaration de Rio ne prévoit pas que cet accès permette les comparaisons entre lieux et la détection d’injustices de traitement entre territoires. En théorie, les plateformes de partage de l’information géographique permettent de comparer des situations territoriales entre elles, d’exposer des inégalités, donc de porter une vision relationnelle, comparative, de la justice spatiale. Mais dans les faits, elles sont peu voire pas du tout utilisées dans cette perspective. En Amérique latine, c’est hors de ces plateformes publiques que se structurent des bases de données visant à dépasser le niveau local dans une perspective de dénonciations d’injustices spatiales fondées sur la comparaison entre les lieux. Les sites militants dédiés aux conflits environnementaux, miniers notamment, procèdent à un travail de localisation et systématisation des informations permettant la mesure territoriale (nombre de cas, répartition sur une carte régionale) de processus qui se matérialisent localement, afin de porter une vision globale et comparative entre les territoires[27]. En Guyane française, les travaux de cartographie participative menés par le Parc Amazonien de Guyane (PAG) nécessitent un important travail de formatage pour apparaître dans GéoGuyane la plateforme régionale de données qui alimente l’infrastructure nationale (Noucher, 2016).

In addition to this low inclusion of non-governmental representations, social practices linked to platform usage show that their potential for improving spatial justice on the national or international scale is still underutilised. The right to environmental information involves a local vision of the effects of information in terms of justice: most Latin-American texts are inspired by the Rio Declaration on Environment and Development, of which Article 10 stipulates the need to favour citizens’ access to information, so as to improve their participation in public decisions, as well as their potential for instituting proceedings in case of an attack on their health and living environment. What is important, in this legal corpus, is to access information on one’s place of residence, where one is exposed to potential risks. Article 10 of the Rio Declaration does not anticipate that this access will enable comparisons between places nor the detection of injustice of treatment between territories. Theoretically, geographic information sharing platforms make it possible to compare territorial situations, expose inequalities as well as bring a relational and comparative vision of spatial justice. But, in reality, they are little or even not used at all in this perspective. In Latin America, databases are structured outside public platforms, going beyond the local level to denounce spatial injustice based on comparisons between places. Militant websites dedicated to environmental conflicts – mining conflicts in particular – work on locating and systematising information, making it possible to carry out the territorial measure (number of cases, distribution on a regional map) of processes materialising locally, in order to bring a global and comparative vision between territories[27]. In French Guyana, participative mapping work conducted by the Guyana Amazonian Park (PAG), needs considerable formatting to appear in GéoGuyane, the regional data platform that feeds the national infrastructure (Noucher, in press).

Dans les faits, participer à une IDG suppose, de normaliser ses données afin qu’elles puissent être prises en compte par le système : c’est particulièrement le cas des naturalistes amateurs en France, dont seule une partie des savoirs est prise en compte par les SINP (Alphandéry and Fortier, 2011). L’ouverture officielle des IDG à des contributeurs de la société civile, de l’Académie ou du secteur privé reste encore confidentielle et frileuse, à l’instar de l’IDERA argentine qui n’a pas encore tranché sur l’inclusion des universités comme partenaires potentiels du réseau. A bien des égards, la polyvalence de ces dispositifs semble faible, et bien qu’ils puissent théoriquement accueillir une grande diversité de représentations du territoire, ils semblent au contraire opérer un filtrage et une normalisation de ces représentations, voire opérer une forme d’acculturation au sens de Serge Gruzinski (1987)[28]. Malgré de fortes potentialités, les IDG restent donc des outils de diffusion de représentations univoques du territoire, où les représentations alternatives à celles de l’État ont du mal à se frayer un chemin.

In practice, contributing to an SDI supposes the normalisation of one’s data in order for it to be taken into account by the system: this is especially true of amateur naturalists in France, whose knowledge is only partly taken into account by SINPs (Alphandéry and Fortier, 2011). The official opening up of SDIs to contributors from civil society, academia or the private sector is still confidential and overcautious, like Argentina’s IDERA that still has not decided whether or not to include universities as potential network partners. In many respects, the polyvalence of these systems seems weak, and although theoretically they can host a great diversity of territorial representations, they seem, on the contrary, to be filtering and normalising these representations, and even operating a form of acculturation as understood by Serge Gruzinski (1987)[28]. Despite strong potentialities, SDIs remain tools for the dissemination of univocal representations of the territory, where representations other than those of the State have difficulty in working their way in.

 

 

4.2. Si ce n’est pour les citoyens, pour qui et pourquoi créer des IDG ?

4.2. If Not for Citizens, Then for Whom and for What Reasons Are SDIs Created?

Cette faible polyvalence, qui s’ajoute au constat de mentions rares aux questions de droit d’accès citoyen à l’information dans les textes fondateurs des IDG (cf. seconde section), incite à interroger les motivations au partage des acteurs qui les animent. Au travers des entretiens menés, il apparaît que la mention du « partage » est avant tout une façon innovante de mobiliser les administrations publiques et de les forcer à échanger leurs données. Il est aujourd’hui éthiquement difficile, dans l’administration, de justifier son opposition à cet échange à l’ouverture des données hors de la sphère de l’État. En mobilisant la notion de « partage », les échelons supérieurs de l’administration désamorcent certaines réticences des échelons inférieurs à communiquer leurs données : en plaçant dans l’espace médiatique d’Internet les nouvelles valeurs de l’administration publique -est efficace et légitime celui qui « libère » ses données- on force la main aux récalcitrants… et la logique d’exposition sur le Web permet de signaler les mauvais joueurs. La logique de fond du « partage » tel que l’État le pratique est donc celle d’une actualisation de son administration, d’une amélioration de ses capacités à produire des connaissances spatiales, et non d’accroître ses capacités à traiter de façon plus juste ses citoyens.

This weak polyvalence, in addition to the fact that issues concerning citizens’ right of access to information in SDI legislations (cf. second section) are rarely mentioned, prompts us to question why the actors behind SDIs actually want to share data. Through interviews, it appears that “sharing” is above all an innovative way of mobilising public administrations, and compelling them to exchange their data. Ethically speaking, it is difficult today for an administration to justify its opposition to open data outside of the State. By mobilising the notion of “sharing”, the higher ranks of the administration defuse the reluctance shown by the lower ranks in communicating their data: by placing on the Internet the new values of the public administration – where that which frees its data is efficient and legitimate – one forces the hand of the recalcitrant… and the exposure principle on the Web reveals bad losers. The principle behind “sharing”, as practiced by the State, is about updating its administration and improving its capacities to produce spatial knowledge, not about increasing its capacities to treat citizens more fairly.

Présenté comme porteur de multiples vertus, le « partage » des données s’impose en fait comme une contrainte aux acteurs publics, souvent forcés de « partager » pour continuer à exister dans un système d’acteurs. Dans certains champs, refuser de mettre en ligne ses données équivaut à se condamner à disparaître des espaces qui comptent politiquement. A titre d’exemple, les instances où se négocie le partage -groupes de travail des IDG- sont perçues, souvent à raison, comme les lieux où s’élaborent les normes qui deviendront dominantes dans le futur. Nombre d’acteurs peu motivés par le partage y participent malgré tout, en faisant le pari qu’il faut influencer de l’intérieur la production de normes qui vont de toute manière finir par les affecter.

Introduced as a carrier of many virtues, data “sharing” is in fact a constraint to public actors who are often compelled to “share” in order to continue existing in a system of actors. In certain fields, refusing to put data online equates to condemning oneself to disappear from spaces that matter politically. As an example, the bodies where sharing is negotiated, i.e. SDI workgroups, are perceived – often rightly so – as places where ultimately dominant standards are elaborated. Many actors who are little motivated to share still take part in the process, for if they are going to end up being affected by standards, they might as well try to influence their production from inside.

A une autre échelle, mais pour des raisons similaires, on note que les États absents des grandes bases de données internationales en ligne finissent par s’y connecter, faisant le constat qu’il « faut » y être présent. C’est le cas du Brésil, qui a fini après des années de résistance par adhérer en 2013 au GBIF, la plateforme majeure de données géographiques sur la biodiversité : sa diplomatie avait longtemps craint un usage malveillant de ses collections naturalistes une fois celles-ci ouvertes à tous. Le « trou » d’informations, nettement visible depuis l’interface en ligne du GBIF, desservait plus qu’il ne protégeait l’image et les ambitions politiques de ce pays mégadivers à peser sur les discussions mondiales quant au pilotage des changements environnementaux.

On another scale, and for similar reasons, we notice that States that are absents from major international online databases end up connecting to these, realising that they “must” be present. This is the case of Brazil that, after years of reluctance, ended up becoming a member of the GBIF in 2013, the major spatial data platform on biodiversity: Brazil’s diplomacy had for a long time feared that the country’s naturalist collections would be used for criminal purposes once they had become open to all. The information “gap” on Brazilian territory, clearly visible from the online GBIF interface, harmed more than protected the image and political ambitions of this megadiverse country in influencing global discussions on the management of environmental change.

 

 

Conclusion

Conclusion

 

 

Malgré de fortes disparités dans la maturité des dispositifs de partage présentés ici, il semble se dessiner une convergence vers des systèmes similaires, fortement pilotés par l’administration centrale et finalement peu ouverts à de nouveaux contributeurs. Les dispositifs observés constituent pour la plupart des constructions « top-down », pilotées par les niveaux centraux et offrant in fine peu de marges de manœuvre aux échelons inférieurs. On peut ainsi faire l’hypothèse que des deux « promesses » antagonistes signalées en introduction, celle d’un accroissement de l’égalité de traitement spatial des citoyens va vraisemblablement prendre le pas sur la seconde, celle de possibilités croissantes pour les citoyens de signaler leurs singularités locales et leurs différences dans l’espace d’Internet.

Despite the high disparities found in the maturity of the sharing systems introduced here, it seems that a convergence towards similar systems is emerging, strongly managed by central governments and, in the end, not very open to new contributors. Most systems observed constitute “top-down” constructions, run by central levels and in fine offering little room for manoeuvre to the lower ranks. As such, we can hypothesise that, out of the two antagonistic “promises” pointed out in the introduction, the increasing equality of the spatial treatment of citizens is very likely to supplant the growing possibilities for citizens to point out their local particularities and differences on Internet.

Au vu de cette situation, on peut donc se demander si ces dispositifs ne constituent pas principalement une reconduction par d’autres moyens de l’entreprise séculaire de « lisibilisation » de la société par l’État Moderne (Scott, 1998), celui-ci renforçant in fine son pouvoir au détriment des acteurs avec lesquels il interagit, tout en les enrôlant dans la constitution des bases de données. Nos exemples démontreraient alors, s’il en était encore besoin, que les technologies de l’information sont « plus propices aux continuités qu’aux changements radicaux » dans les rapports sociaux (Mol, 2008)[29].

In the light of this situation, we can wonder whether these systems do not constitute mainly a renewal by other means of the age-old undertaking to improve the “legibility” of society by the Modern State (Scott, 1998), the latter in the end reinforcing its power to the detriment of actors it would interact with, while enrolling them to create databases. Our examples show that information technologies are “more suitable to continuity than to radical change” with regards social relations (Mol, 2008)[29].

A bien des égards, le partage en ligne des données géographiques semble pourtant marquer une rupture majeure du paradigme liant l’État et ses administrés par le biais de l’information. En se prêtant au partage, l’État cesse de capitaliser de façon asymétrique l’information géographique qu’il collecte, réduisant d’autant le pouvoir qu’il pouvait tirer de cette situation, lequel « s’est effectué pendant longtemps par le prélèvement et la centralisation d’informations qui guident les décisions politiques, mais qui restent un bien retenu par les autorités publiques » (Lascoumes et Le Galès, 2004, p. 25). Le travail séculaire de l’État moderne pour constituer des bases de données géographiques devient un travail collectif et partiellement externalisé. La montée en généralité grâce à la systématisation de l’information sur des espaces de plus en plus grands, l’établissement d’analyses globales par réunion d’informations fragmentaires, ou encore la réduction de la dépendance aux fournisseurs locaux d’information (Gautreau et Garavaglia, 2012) sont facilitées par l’organisation de flux de données, ou encore l’animation de collectifs d’acteurs étatiques, associatifs et privés qui travaillent de concert à enrichir les bases de données publiques. Ces dispositifs sont ainsi emblématiques du « deuxième âge de la démocratie », où « la définition du bien commun ne relève plus du seul monopole des gouvernants légitimes » (Lascoumes et Le Galès, 2004, p. 24).

In many respects, sharing spatial data online seems to indicate a major break in the paradigm linking the State and its citizens through information. By going along with sharing, the State ceases to accumulate asymmetrically the geographic information gathered by it, thereby reducing the power it could get out of the situation, a power that “was obtained for a long time by the collection and centralisation of information guiding political decisions but remaining an asset retained by governments” (Lascoumes and Le Galès, 2004, p. 25). The age-old work of the modern State to constitute geographic databases becomes collective and partially externalised. The rise in generality thanks to the systematisation of information on increasingly larger areas, the establishment of global analyses by combining fragmentary data or, still, the reduction of dependence upon local information suppliers (Gautreau and Garavaglia, 2012), are facilitated by organising data flows or, still, the leadership of collectives of actors related to the State, associations and the private sector working together to enrich public databases. These systems are symbolic of the “second age of democracy”, where “the definition of common good no longer relates to the sole monopoly of legitimate rulers” (Lascoumes and Le Galès, 2004, p. 24).

Nos cas d’étude permettent cependant d’affirmer que le partage des données géographiques ne contribue pas à une perte de pouvoir de l’État, mais fait évoluer les modes de légitimation de celui-ci, en tant que garant d’une forme de justice spatiale du fait de son nouveau rôle dans les flux d’information. A bien des égards, nous avons également vu que l’ouverture des données peut représenter une nouvelle forme de contrôle, forçant au partage sans coercition. C’est sans doute plutôt à un niveau géopolitique qu’il faut chercher aujourd’hui les changements opérés par ce « partage » dans les rapports de pouvoir entre territoire, dotant les États émergents et en développement de nouveaux outils pour reconstruire des politiques nationales souveraines, réduisant le « colonialisme électronique » et la « dépendance culturelle et informationnelle » dénoncés par McPhail (2006).

However, our case studies make it possible to assert that sharing spatial data does not contribute to a loss of power by the State, but makes changes to the legitimation modes of the State as warrent of a form of spatial justice, due to its new role in information flows. In many respects, we have also seen that open data can represent a new form of control, by compelling actors to share without coercion. Today, it is probably more at the geopolitical level that we must look for changes operated by “sharing” in power relations between territory, endowing emerging and developing States with new tools to rebuild sovereign national policies, reducing “electronic colonialism” as well as cultural and informational dependency, as denounced by McPhail (2006).

 

 

A propos des auteurs : Pierre Gautreau, Maître de Conférences, Université Panthéon Sorbonne, UMR PRODIG, Matthieur Noucher, Chargé de recherche, CNRS, UMR PASSAGES

About the authors: Pierre Gautreau, Senior Lecturer, Université Panthéon Sorbonne, UMR PRODIG, Matthieu Noucher, Researcher, CNRS, UMR PASSAGES

Pour citer cet article : « Information géographique numérique et justice spatiale : les promesses du « partage », justice spatiale | spatial justice, n°10, Juillet 2016, http://www.jssj.org/

To quote this article: “Sharing Platforms in Digital Geographic Information and Spatial Justice: Everything it Promises?”, justice spatiale | spatial justice, n°10, July 2016, http://www.jssj.org/

 

 

[1] C’est l’argument de fond des fonctionnaires qui élaborent les cadastres, face à des propriétaires souvent réticents (Kain and Baigent, 1992; Touzerie, 2007).

[1] This is the main argument of civil servants who elaborate land registries, when they are confronted with frequently reticent land owners (Kain and Baigent, 1992; Touzerie, 2007).

[2] L’acronyme désigne les cinq grandes firmes américaines qui dominent le marché du numérique : Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft. On peut souligner qu’elles ont toutes investi massivement dans le développement de technologies liées à la géolocalisation.

[2] This acronym designates the five large American firms dominating the digital market, i.e. Google, Apple, Facebook, Amazon and Microsoft. Of note is the fact that all of them have invested massively in the development of geolocation technologies.

[3] L’information géographique volontaire caractérise les contenus géolocalisés produits, enrichis et mis à jour par le grand public. Elle offre ainsi un cadre unificateur à un ensemble de pratiques variées qui s’opèrent en dehors de la sphère professionnelle de la cartographie ou de la géomatique.

[3] Volunteered geographic information characterises geo-located contents that are produced, enriched and updated by the wider public. It offers a unifying framework to a set of varying practices occurring outside the professional sphere of cartography or geomatics.

[4] Infraestructura de Datos Espaciales del Estado Plurinacional de Bolivia (http://geo.gob.bo), Infraestrutura Nacional de Dados Espaciais brésilienne (www.inde.gov.br), Infrestructura de Datos Espaciales de la República Argentina (www.idera.gob.ar) L’Infrastructure nationale de données géographiques en France est composée du géoportail (http://www.geoportail.gouv.fr/) et du géocatalogue (http://www.geocatalogue.fr/).

[4] The Infraestructura de Datos Espaciales del Estado Plurinacional de Bolivia (http://geo.gob.bo), the Brazilian Infraestrutura Nacional de Dados Espaciais (www.inde.gov.br), the Infrestructura de Datos Espaciales de la República Argentina (www.idera.gob.ar). The French Infrastructure nationale de données géographiques is made up of the geoportal (http://www.geoportail.gouv.fr/) and the catalogue service (http://www.geocatalogue.fr/).

[5] Les membres les plus actifs du réseau et qui contribuent directement à l’implémentation technique de l’IDERA ne reçoivent pas de rémunération pour cela, et s’y emploient souvent hors des horaires de travail.

[5] The most active members of the network who contribute directly to the technical implementation of the IDERA, do not receive any remuneration in this regard, and often work on it in their spare time.

[6] 115 personnes appartenant à 23 institutions, dont des entreprises privées d’imagerie aérienne, participent à ces discussions initiales.

[6] 115 people from 23 institutions, including private aerial photography companies, took part in these initial discussions.

[8] Sistema Nacional de Datos Biológicos de la República Argentina (www.sndb.mincyt.gob.ar), Sistema de Informação sobre a Biodiversidade Brasileira (www.sibbr.gov.br). Le système d’information bolivien sur la biodiversité est inactif et sans interface web (février 2014). Système d’information sur la nature et le paysage (http://www.naturefrance.fr/).

[8] Sistema Nacional de Datos Biológicos de la República Argentina (www.sndb.mincyt.gob.ar), Sistema de Informação sobre a Biodiversidade Brasileira (www.sibbr.gov.br). The Bolivian information system on biodiversity is not active and does not have a Web interface (February 2014). The Information System on Nature and Landscape (http://www.naturefrance.fr/).

[9] Evolution évaluée à partir du nombre de fiches de métadonnées contenues dans les catalogues de chacune des IDG. Les auteurs remercient Julie Pierson pour son travail de collecte informatique.

[9] Evolution assessed from the number of metadata files contained in the catalogue service of each SDI. The authors would like to thank Julie Pierson for her web scraping work.

[10] Pour l’Amérique du Sud, 45 entretiens ont été menés entre 2011 et 2015 dans les villes de La Paz, Santa Cruz, Cochabamba (Bolivie), Buenos Aires, Salta, Santa Fé, Rosario, La Plata (Argentine), Rio de Janeiro, Porto Alegre et Brasília (Brésil). En France, des observations complètes ou participantes ont été menées depuis 2005 par la participation régulière aux rencontres annuelles des IDG (AFIGEO), aux séminaires INSPIRE (CNIG) ou aux travaux de différents groupes de travail. Le projet de recherche GÉOBS (2015-2017) poursuit ces investigations par l’analyse de la gouvernance, des contenus et usages des IDG françaises. Une enquête en ligne a été menée durant l’été 2015 auprès des responsables des 44 IDG nationales et régionales françaises. Des fouilles de données et des entretiens sont également en cours.

[10] Concerning South America, 45 interviews were conducted between 2011 and 2015 in the cities of La Paz, Santa Cruz, Cochabamba (Bolivie), Buenos Aires, Salta, Santa Fé, Rosario, La Plata (Argentine), Rio de Janeiro, Porto Alegre and Brasília (Brazil). In France, complete or participative observations have been conducted since 2005 through regular participation in yearly SDI meetings (AFIGEO), in INSPIRE seminars (CNIG) or in the works of different workgroups. The research project entitled GEOBS (2015-2017) is currently pursuing these investigations by analysing the governance, contents and uses of French SDIs. An online survey was conducted in the summer of 2015 with officials from the 44 French national and regional SDIs. Data searches and interviews are also ongoing.

[11] Volume (taille des corpus de données), variété (diversité des contenus), vélocité (fréquence de mise à jour) sont les trois dimensions (3V) identifiées par le rapport Gartner (Douglas, 2001) pour décrire, a minima, les « big data » ou « mégadonnées ». En ce qui concerne notre corpus d’IDG, le volume y est réduit (cf figure 1), la vélocité également (les métadonnées sont rarement actualisées et lorsque c’est le cas, à un rythme annuel), et la variété limitée, du moins dans les cas des IDG nationales française et brésilienne, où les données sont circonscrites aux compétences des autorités publiques (cf figure 3 dans cet article).

[11] Volume (size of data corpuses), variety (diversity of contents), velocity (how often they are updated) are the three dimensions (3V) identified by the Gartner Report (Douglas, 2001) to describe “big data” or “megadata” at least. Concerning our SDI corpus, its volume is reduced (cf. Figure 1), as is its velocity (metadata are rarely updated and when they are, it is on an annual basis), while its variety is limited, at least in the case of the French and Brazilian national SDIs where data is restricted to the jurisdiction of governments (cf. Figure 3 in this article).

[12] Le nombre relativement faible des métadonnées du géocatalogue bolivien tient à cette volonté de décrire très précisément chacune des données partagées, qui suppose parfois de longues semaines de recherches pour retrouver l’auteur, l’origine, les formes de production de chaque donnée. En Argentine, l’IDG nationale n’a encore aucune donnée en ligne car c’est à une équipe de quelques personnes qu’échoit la tâche de recenser les données à partager et de rédiger avec soin les métadonnées. En France, la multiplication des guides et des formations sur le catalogage des données géographiques témoigne des compétences nécessaires pour créer des métadonnées normées.

[12] The relatively low quantity of metadata in the Bolivian catalogue service is due to the fact that all data shared must be described very precisely, which sometimes takes many weeks of research to find the author, origin and production forms of each datum. In Argentina, the national SDI has not yet made data available online, due to the fact that the team in charge of making an inventory of the data to be shared, and carefully drafting the metadata, is made up of a few people only. In France, the multiplication of guides and training sessions on cataloguing geographic data is a testimony of the skills required to create standardised metadata.

[13] Document préliminaire, « Projet de loi nationale/fédérale d’Infrastructure de Données géographiques », consulté sur le site de l’IDERA en avril 2015. Ce n’est que dans un document de moindre hiérarchie, l’acte de création de l’IDERA, que l’on évoque des questions d’accès, mais toujours articulées à l’objectif centrale d’amélioration de la prise de decisión publique: [l’IDERA est] “un outil nécessaire pour améliorer l’accès des organismes de gouvernement, des entités universitaires et de recherche, du public en général, à l’information géoréférencée » ; il est prévu que celle-ci « soit d’une aide efficace pour les différents niveaux de gouvernement et pour les citoyens dans leur vie quotidienne, améliorant leur qualité de vie, contribuant au progrès et au développement social, économique et environnemental ». L’IDG argentine devra « démocratiser l’accès à l’information en accord avec les politiques de données de chaque institution, et constituer un outil incontournable pour l’identification de politiques (sic) et la prise de décision à tous les niveaux de l’Etat » (“Acta acuerdo para la conformación de la plataforma de trabajo de la infraestructura de datos espaciales de la República Argentina, firmada en Santa Fe el 6 de agosto del 2010).

[13] Preliminary document, “National/Federal Bill on Spatial Data Infrastructure”, consulted on the IDERA website in April 2015. Access issues are only brought up in the founding act of the IDERA (a document of lesser rank), and always around the central objective of improving public decision making: [the IDERA is] “a tool needed to improve the access of government agencies, academic and research entities and the public in general to georeferenced information”; the IDERA is expected to “assist the different levels of government efficiently and help citizens in their daily lives, improving their quality of life, contributing to progress as well as to social, economic and environmental development”. Argentina’s SDI will need to “democratise access to information in accordance with the data policies of each institution, and to constitute a major tool for identifying policies (sic) and decision making at all government levels” (“Acta acuerdo para la conformación de la plataforma de trabajo de la infraestructura de datos espaciales de la República Argentina, firmada en Santa Fé el 6 de agosto del 2010).

[14] Textes de référence respectifs : « De los datos fundamentales de la infraestructura de datos del Estado Plurinacional de Bolivia » (resolución 01/2015), « Del documento base para la producción del información geográfica en el Estado Plurinacional de Bolivia » (resolución 04/2015).

[14] Respective reference texts: “De los datos fundamentales de la infraestructura de datos del Estado Plurinacional de Bolivia » (resolución 01/2015), « Del documento base para la producción del información geográfica en el Estado Plurinacional de Bolivia” (resolución 04/2015).

[15] Sur son site web (consulté en avril 2015) sont mentionnés comme objectifs : « promouvoir l’échange d’information biotique grâce à un réseau national de données, analyser et implémenter des politiques communes de qualité et distribution des données ; augmenter et améliorer l’accessibilité de l’information en actualisant celle-ci ; doter les données biologiques produites dans le pays d’une projection internationale par leur diffusion sur des réseaux virtuels ; renforcer les conditions pour une bonne conservation des collections et leur bonne gestion ; offrir des connaissances minimales de la biodiversité au public en général, selon des normes et des procédés définis ; contribuer à la formation de ressources humaines par des programmes communs ».

[15] On the website of the National Biological Data System (consulted in April 2015), the following objectives are mentioned: “promoting the exchange of biotic information thanks to a national data network, analysing and implementing shared data quality and distribution policies; increasing and improving information accessibility by updating information; ensuring the international impact of the biological data produced in the country by spreading such data on virtual networks; reinforcing the conditions for the good conservation and management of collections; offering minimum knowledge on biodiversity to the public in general and according to defined standards and procedures; contributing to human resource training via shared programmes”.

[17] « Cette connaissance doit permettre d'élaborer, suivre et évaluer les politiques de préservation, de restauration ou de protection de la biodiversité. Elle doit également permettre d'éclairer les choix publics ou privés en matière d’aménagement du territoire. La connaissance environnementale doit être rendue accessible au plus grand nombre comme le prévoient la convention d'AARHUS du 25 juin 1998 ratifiée par la France, la convention européenne du paysage et la directive 2007/2/CE INSPIRE du 14 mars 2007. Le Code de l’environnement (Article L124-1 et suivants et article L127-1 et suivants) rend obligatoire la mise à disposition de l'information environnementale publique » Protocole du SINP, préambule (Annexe a la circulaire devl1311244c du 15 mai 2013).

[17] “This knowledge must make it possible to elaborate, monitor and assess biodiversity conservation, restoration or protection policies. It must also make it possible to throw light on public or private choices as regards town and country planning. Environmental knowledge must be made accessible to the greatest number as provided for by the Aarhus Convention dated 25 June 1998 and ratified by France, the European Landscape Convention and the 2007/2/CE INSPIRE Directory dated 14 March 2007. The Code of Environment (Article L124-1 et seqq. and Article L127-1 et seqq.) makes it compulsory for public environmental information to be made available” SINP Protocol, preamble (Appendix to circular devl1311244c dated 15 May 2013).

[18] Enquête menée auprès de 15 IDG françaises d’échelon national et 29 d’échelon régional (Maulpoix et al., 2016).

[18] Survey conducted with 15 French national SDIs and 29 regional SDIs (Maulpoix et al., 2016).

[19] Compte-rendu de la Réunion nationale de concertation sur les modalités de diffusion des données par la plateforme nationale (22 octobre 2015). Consulté en janvier 2016 sur le site www.naturefrance.fr.

[19] Minutes of the National meeting on data distribution methods by the national platform (22 October 2015). Consulted in January 2016 on www.naturefrance.fr.

[20] Un « référentiel cartographique » peut se définir comme une donnée géographique de référence, couvrant de manière exhaustive le territoire, relevant de la responsabilité d’une structure publique clairement identifiée, et auxquelles les utilisateurs accordent un niveau de confiance élevé, lié à la légitimité de l’organisme responsable.

[20] A “mapping referential” can be defined as reference geographic data exhaustively covering the territory, which is the responsibility of a clearly identified public structure, and in which users place a lot of trust, thereby reflecting the legitimacy of the agency in charge.

[21] En France, le réseau des IDG régionales a constitué un groupe de travail au sein de l’AFIGEO (Association française pour l’information géographique) qui représente le pays au sein de la fondation EUROGI (European Umbrella Organisation for Geographic Information), elle-même membre fondateur de l’association internationale GSDI (Global Spatial Data Infrastructure).

[21] In France, the regional SDI network formed a workgroup within the French Association for Geographic Information (AFIGEO) which represents the country within the European Umbrella Organisation for Geographic Information (EUROGI), itself a founding member of the Global Spatial Data Infrastructure (GSDI).

[22] Une possibilité autrefois réservé à l’Etat, qui possédait seul une capacité à générer des bases de données lui permettant de changer d’échelle dans ses analyses (voir les analyses de Scott, 1998, chapitre 1, à ce sujet).

[22] A possibility that, in the past, was reserved for the State that was the only entity with the capacity to generate databases allowing it to change scales when carrying out analyses (in this regard, cf. Scott’s analyses, 1998, Chapter 1).

[23] Entre autres exemples, une collaboration entre le Centre de Référence en Information Environnementale (CRIA) du Brésil et des institutions françaises dépositaires des plantes collectées par Auguste Prouvençal de Saint-Hilaire au Brésil entre 1816 et 1822 a permis de numériser ces spécimens puis de constituer l’Herbier Virtuel Auguste de Saint-Hilaire (http://hvsh.cria.org.br/).

[23] An example, among others, is the collaboration between Brazil’s Centre for Reference in Environmental Information (CRIA) and French institutions that were depositories for plants gathered by Auguste Prouvençal de Saint-Hilaire in Brazil, between 1816 and 1822, and that led to the digitisation of these specimens and to the creation of the Virtual Herbarium Auguste de Saint-Hilaire (http://hvsh.cria.org.br/).

[24] La fiche de présentation du Géoportail de l’IGN sur Wikipédia stipule ainsi : « Le Géoportail couvre l'ensemble du territoire français selon le principe d'égalité et de satisfaction de l'intérêt général tandis que Google Maps couvre le monde entier avec des résolutions variant en fonction de l'intérêt du lieu. » https://fr.wikipedia.org/wiki/Géoportail_(France)

[24] The introduction page of the IGN’s Géoportail on Wikipedia stipulates the following: “The Géoportail covers the entire French territory in accordance with the principle of equality and satisfaction in the general interest while Google Maps covers the entire world with resolutions varying according to the importance of the site.” https://fr.wikipedia.org/wiki/Géoportail_(France)

[26] Cette dernière est d’ailleurs dénoncée par les syndicats de l’IGN, dans un communiqué du 24/09/2014 comme une forme exacerbée de néo-libéralisme : « OpenStreetMap est une organisation à but non lucratif anglaise fondée par un certain Steve Coast pour tirer parti du GPS et des bases de données existantes et s’affranchir ainsi des services nationaux de cartographie – la frontière entre la liberté du collaboratif et l’ultralibéralisme est ténue ».

[26] This has in fact been denounced by the IGN Unions, in a communiqué dated 24/09/2014, as an exacerbated form of neo-liberalism: “OpenStreetMap is an English non-profit organisation founded by a Steve Coast to take advantage of GPS and existing databases, and freeing oneself from national mapping services – the boundary between collaborative freedom and ultraliberalism is subtle”.

[27]regantestacagua.blogspot.com, celendinlibre.blogspot.com, mapaconflictominero.org.ar, conflictosmineros.net, mineriacontaminante.zocial.com.ar, minesandcommunities.org, olca.cl.

[27] regantestacagua.blogspot.com, celendinlibre.blogspot.com, mapaconflictominero.org.ar, conflictosmineros.net, mineriacontaminante.zocial.com.ar, minesandcommunities.org, olca.cl.

[28] Dans son article « Colonial Indian Maps in Sixteenth-Century Mexico », l’auteur montre comment l’imposition de modes cartographiques européens par l’Empire Espagnol au Nouveau-Mexique a marginalisé les représentations cartographiques de la noblesse Nahuatl, mais également acculturé les vaincus à l’usage de représentations du territoire différentes des leurs.

[28] In his article entitled “Colonial Indian Maps in Sixteenth-Century Mexico”, the author shows how the Spanish Empire imposing European mapping methods in New-Mexico, marginalised the maps of the Nahuatl nobility, and helped the vanquished adapt to using representations of the territory that were different from theirs.

[29] « When the importance of information, knowledge and information technology increases in society, the main consequences are not cultivating wisdom and free access […]. Information technology has been shaped, developed and used in conformity with the dominant social and political interests. And although these interests cannot determine all details of information technology structures, outcomes and effects, they push for continuity rather than for radical change » (p 37).

[29] “When the importance of information, knowledge and information technology increases in society, the main consequences are not cultivating wisdom and free access […]. Information technology has been shaped, developed and used in conformity with the dominant social and political interests. And although these interests cannot determine all details of information technology structures, outcomes and effects, they push for continuity rather than for radical change” (p 37).

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