Luttes, territoires et justice spatiale

Territories of Struggle and Spatial Justice

Ce numéro de Justice Spatiale | Spatial Justice propose d’aborder l’action collective à l’aune des différentes spatialités qu’elle met en jeu et mobilise. Il s’agit en particulier de s’intéresser aux actions collectives ayant vocation à promouvoir davantage de justice. Ce numéro porte l’ambition de saisir comment un espace – dans ses dimensions matérielles, sociales, symboliques et politiques – est aussi produit par des formes d’actions collectives, informelles ou en cours d’institutionnalisation, qu’elles soient autonomes ou hybridées par des interactions avec les pouvoirs publics. L’action collective est ici entendue au sens large de la « politique contestataire » telle que définie par Doug McAdam et al. (1996, p. 1) et saisie dans sa capacité à transformer le(s) territoire(s) et leur(s) gouvernement(s) par les politiques publiques.

The aim of this issue of Justice Spatiale|Spatial Justice is to approach collective action in terms of the different spatialities that it employs and deploys. It focuses in particular on collective action to promote greater justice. It seeks to understand how a space—in its material, symbolic, social and political dimensions—is also produced by forms of collective action, whether informal or in the process of institutionalization, whether autonomous or hybridized by interactions with public authorities. Collective action is understood here in the broad sense of “contentious politics” as defined by Douglas McAdam et al. (1996), and in terms of its capacity to transform territory(ies) and their government(s) through public policies.

Ce faisant, il s’agit de poursuivre une réflexion qui s’affirme dans la littérature scientifique (Auyero, 2005 ; Ripoll, 2008 ; Mahoudeau, 2016) en s’inscrivant dans la géographie de l’action collective. Ce champ a d’abord été structuré dans la géographie anglophone (Miller, 2000 ; Miller et Martin, 2000) et par la sociologie des mouvements sociaux prenant en compte l’espace des mobilisations (Mathieu, 2012 ; Nez, 2016 ; Borras et al., 2018 ; Pailloux et Ripoll, 2019). On observe aujourd’hui une augmentation des ouvrages et numéros de revues visant à étudier ces « formes particulières d’action collective » (Rui, 2010, p. 82) au travers de leur dimension spatiale. Plus spécifiquement, il s’agit de questionner comment ces actions, dont une partie use d’un registre informel, produisent du territoire. Cet appel est initié dans un contexte francophone, marqué par une distinction historique entre sphère publique et sphère privée. Il invite à réfléchir à comment l’action collective contribue à déplacer les lignes de séparation ou à accroître la porosité entre public et privé, d’une part, et entre informel et institutionnel, d’autre part. Nous invitons les auteur·e·s à observer ce « brouillage » au travers de ses dimensions territoriales. Dans bien des aires culturelles, cette porosité des sphères publiques et privées dans le champ, par exemple, de la gouvernance des espaces publics ou de la délégation de missions de services publics ou des programmes « communautaires » n’est plus à démontrer. Les articles proposés se concentreront sur le trouble introduit dans ces spatialités par l’initiation de formes d’actions collectives porteuses d’objectifs en faveur de la justice sociale. Il s’agit de voir comment elles contribuent à des transformations spatiales, sous la forme d’apparition de nouveaux lieux, de transformation de réseaux, de requalification symbolique de nouveaux espaces ou de nouvelles formes de gouvernance territoriale par exemple.

By adopting this focus on the geography of collective action, we are pursuing a line of thought that is becoming increasingly established in the scientific literature (Auyero, 2005; Ripoll, 2008; Mahoudeau, 2016). This field first took shape in English language geography (Miller, 2000; Miller and Martin, 2000) and through the sociology of social movements associated with space (Mathieu, 2012; Nez, 2016; Borras et al, 2018) and activism (Pailloux and Ripoll, 2019). A growing number of books and journal issues now seek to explore these “particular forms of collective action” (Rui, 2010) through their spatial dimension. More specifically, the question is how these actions produce territory. This call emanates from a French language perspective that is partly marked by a historical distinction between the public and private spheres. It invites us to reflect on how collective action contributes to shifting the lines of demarcation or increasing the porosity between public and private, on the one hand, and informal and institutional, on the other. We invite authors to observe this “blurring” through its territorial dimensions. Collective action “shifts the lines” of the relationship between the public and private, institutional and citizen spheres, and the spatial impact of these shifts. Of course, in many cultural areas, this porosity between the public and private spheres as instantiated, for example, in the governance of public spaces or the delegation of public service roles or “community” programs, is no longer in question. We invite authors to focus on the disturbance introduced in these already porous spatialities between private and public by the initiation of forms of justice-related collective action with social justice goals. The aim is to see how they contribute to transformations of space, for example in the emergence of new places, in the transformation of networks, in the symbolic requalification of new spaces, or in new forms of territorial governance.

Pour aborder les transformations du territoire à l’aune de l’action collective, nous proposons aux auteur·e·s de se saisir de la notion d’informalité. Celle-ci permet tout autant d’analyser les modes « non officiels » de gouvernement, les négociations, la « boîte noire » des politiques publiques, que de prendre en compte les pratiques d’actions collectives catégorisées comme illégales, « subalternes » ou « infra-politiques », ici proposées à l’étude. Par leur objet, les formes d’actions collectives contribuent en effet à remettre en cause l’ordre normé et à questionner la limite entre légal et illégal, formel et informel. Leurs modes d’action, en outre, allient fréquemment des pratiques ayant fortement incorporé les contraintes juridiques, et d’autres, plus revendicatives, qui relèvent éventuellement de l’illégalité ou, plus souvent, d’une zone grise (Yiftachel, 2009). Ces actions collectives peuvent ressortir de mobilisations, de luttes « visibles », dans des moments resserrés, comme d’actions du quotidien, sur le long terme, convergeant de manière cohérente et concertée pour gagner de nouvelles légitimités à transformer le territoire (Didier et Philifert, 2019). Ce faisant, il s’agit de promouvoir des approches croisées et ambitionnant de décloisonner la dichotomie entre Nord et Sud, initiées notamment par le courant de l’urbanisme subalterne (Roy, 2005, p. 155) dans le contexte du Sud global et les travaux initiés plus récemment par le collectif Inverses (2016) dans la littérature francophone. Cet appel a donc vocation à explorer combien le territoire, en étant le support et l’enjeu de formes d’actions collectives, se trouve profondément façonné par le croisement de dynamiques informelles et institutionnelles. L’informalité et l’institutionnalisation sont ici entendues comme des notions non exclusives, éminemment poreuses et le plus souvent hybridées (McFarlane, 2012). En examinant notamment comment celles-ci mobilisent des registres concurrents de la justice (et de l’intérêt public ou général) (voir le numéro 12 de la revue JSSJ), il sera fécond de mettre au jour la dimension plurielle, ordinaire et négociée dont fait l’objet la fabrication des territoires (Bayat, 2009).

In order to approach territorial transformations through the lens of collective action, we suggest that the authors employ the notion of informality. This notion allows us to analyze “unofficial” modes of government, negotiations, and the “black box” of public policies, as well as to take into account forms of collective action that are categorized as illegal, “subaltern”, or “infra-political”. In the focus on spatial justice, forms of collective action raise questions about the normative order and the boundaries between the legal and illegal, the formal and informal. Moreover, their modes of action frequently combine practices in which legal constraints are deeply embedded, with other, more conflictual, modes that may be illegal or, more often, in a grey zone between the two (Yiftachel, 2009). These collective actions can emerge from activist movements, from “visible” struggles, in specific moments, as well as over the long term in everyday events, coming together coherently and concertedly to acquire new legitimacy for territorial transformation (Didier and Philifert, 2019). In this exploration, the aim should be to employ cross-cutting approaches that break down the dichotomy between North and South, approaches notably initiated by subaltern urbanism (Roy, 2005, p. 155) in the context of the Global South, and the work initiated later by the Inverses research group (2016) in the French-language literature. The aim of this call for papers is therefore to explore the extent to which territory, as both the medium and the target of forms of collective action, is profoundly shaped by the intersection of informal and institutional dynamics. Informality and institutionalization are understood here as non-exclusive, highly porous and usually hybrid notions (McFarlane, 2012). By examining, in particular, how these draw upon competing registers of justice and the general interest (see Issue 12 of the journal JSSJ), it will be relevant to cast light on the plural, ordinary and negotiated dimension that influences the making of territories (Bayat, 2009).

Par ce numéro, nous souhaitons donc interroger de front la dimension territoriale de l’action collective. Dans le contexte francophone, plus que la notion d’espace, celle de territoire permet d’analyser les enjeux de pouvoir et de domination, en sous-tendant l’existence d’un pouvoir projeté sur l’espace (Faure et Négrier, 2019), notamment celui des pouvoirs publics dans le cas des projets urbains, par exemple. Le territoire peut alors être considéré comme un « outil de praxis politique produit et contesté » (Ince, 2012, p. 1646) et la territorialité comme l’expression spatiale du pouvoir (Storey, 2020). Le territoire est donc un espace géographique socialisé, construit par les pratiques et représentations, et doté d’une profondeur historique, qui combine ainsi des dimensions matérielles, sociales, symboliques, identitaires et politiques (Bonnemaison et Cambrezy, 1997 ; Debarbieux, 1995 ; Di Méo, 1993). Ce terme, qui a connu un tel succès dans la littérature francophone notamment, recouvre parfois le terme de « place » en anglais (Debarbieux, 1999 ; Massey, 1993 ; Harvey, 1989), et parfois celui de « territory », récemment réinvesti dans la sphère anglophone pour la pluralité des spatialités qu’il permet d’aborder (Jackman et al., 2020). Nous invitons donc les auteur·e·s à éclairer cette proposition depuis leur propre contexte académique, culturel et linguistique et à le rendre explicite, pour élargir l’approche aux différentes dimensions spatiales envisageables (lieux, réseaux, espaces vécus, espaces symboliques, etc.) et aux différents contextes de production de connaissances. Ces approches présentent, en outre, un intérêt tout particulier dans le contexte du réétalonnage (Brenner, 2004) de l’action des pouvoirs publics, notamment dans le contexte du roll out, ou réagencement des interventions de l’État néolibéralisé tel que le décrivent Jamie Peck et Adam Tickell (2002). En proposant cette approche territoriale, cet appel entend aussi poursuivre des travaux antérieurs qui visent à étudier l’évolution des mouvements sociaux et leur dimension territoriale. Malgré la grande diversité de ces mouvements (Scott, 1985 ; Fautras, 2015), nous relevons des exigences communes, confortant dans bien des cas l’hypothèse d’une « hyperlocalisation de la question sociale » (Fourcaut, 2002, p. 174) : une plus grande justice sociale, une démocratisation de la politique locale, une critique de l’action étatique et technocratique – également en contextes autoritaires (Geoffray, 2011) –, notamment des politiques d’aménagement, une aspiration à la préservation de l’environnement, une attention accrue aux usages quotidiens et au cadre de vie. Plus récemment, la territorialisation des mouvements sociaux s’est manifestée à travers l’occupation informelle de places dans des contextes urbains (place Tahrir au Caire, place Puerta Del Sol à Madrid, place de la République à Paris, place Taksim à Istanbul, etc.) et de lieux symboliques dans les espaces ruraux ou périurbains (ronds-points).

With this issue, our aim is to question the territorial dimension of collective action. For French speakers, the notion of territory—rather than space—offers a way to analyze issues of power and domination by emphasising the existence of power projected onto space (Faure and Négrier, 2020), instantiated for example by the power of public authorities in the case of urban projects. Territory can therefore be understood as a “produced and contested tool of political praxis” (Ince, 2012, p. 1646) and territoriality as the spatial expression of power (Storey, 2020). The territory is thus a socialized geographical space, constructed by practices and representations, and endowed with historical depth, a space in which material, social, symbolic, identitarian and political dimensions combine (Bonnemaison and Cambrezy, 1997; Debarbieux, 1995; Di Méo, 1993). This term, which is widespread in the French-language literature, sometimes equates to “place” in English (Debarbieux, 1999; Massey, 1993; Harvey, 1989), and sometimes to “territory”, a term that has recently been adopted in English language scholarship because of the multiplicity of spatialities that it is able to address (Jackman et al., 2020). We invite contributing authors to tackle this proposal explicitly from their own academic, cultural and linguistic perspectives, in order to broaden the approach to the different spatial dimensions that can be encompassed (places, networks, lived spaces, symbolic spaces, etc.) and to the different contexts of knowledge production. These approaches are, moreover, of particular interest in the light of the rescaling (Brenner, 2004) of state action, especially in the context of the “roll-out” of neoliberalized state forms since the 1990s, as described by Jamie Peck and Adam Tickell (2002). By proposing this territorial approach, this call also seeks to align itself with—and to pursue—previous studies of the evolution of social movements and the role of territory within them. Despite the great diversity of these movements (Scott, 1985; Fautras, 2015), we identify a commonality of demands, which in many cases support the hypothesis of a “hyperlocalization of the social question” (Fourcaut, 2002): greater social justice, a democratization of local politics, a critique of state and technocratic action—including in authoritarian contexts (Geoffray, 2011)—in particular with respect to planning policies, an aspiration to protect the environment, increased attention to everyday uses and the living environment. More recently, the territorialization of social movements has been manifested through the informal occupation of city squares (Tahrir Square in Cairo, Puerta Del Sol Square in Madrid, Place de la République in Paris, Taksim Square in Istanbul, etc.) and of symbolic spaces in rural or peri-urban areas (traffic circles).

Les articles devront donc proposer des analyses centrées sur des actions collectives qui s’ancrent au sein de combats contre des formes d’injustices et s’intéresser à leurs dimensions territoriales. Il s’agira notamment d’étudier comment s’expriment les tensions et circulations entre informalité et institutionnalisation de ces dynamiques contestataires. Ces actions collectives et les territoires produits devront être examinés pour saisir les tensions et circulations entre informalité et institutionnalisation. es injustices qui font l’objet de contestations collectives peuvent être d’ordre divers : inégalités spatialisées, privation d’accès à un espace, domination exprimée spatialement, défaut de redistribution ou de reconnaissance dans la relation au territoire (Young, 1990).

The papers should therefore offer analyses that focus on collective actions that are anchored within struggles against forms of injustice, and explore their territorial component. In particular, they should explore how the tensions and interchanges between informality and institutionalization are expressed in these protest dynamics. The injustices targeted by collective protest can be of various kinds: spatialized inequalities, deprivation of access to a space, spatially expressed domination, lack of redistribution or recognition in the relationship to the territory (Young, 1990).

Trois propositions d’articulation entre territoire, action collective et justice sont ainsi suggérées.

Three proposals for linking territory, collective action and justice are thus suggested.

1. Action collective et dynamiques territoriales : l’interface entre pouvoirs publics et mobilisations

1. Collective action and territorial dynamics: the interface between public powers and mobilizations

Le territoire, comme espace de vie et comme étendue au sein de laquelle s’exercent des pouvoirs (Raffestin, 1980), est bien sûr l’objet d’enjeux multiples de domination. Il peut ainsi renvoyer au cadre d’expression d’une communauté nationale, comme aux espaces du quotidien (Scott, 1985) : la rue, le quartier, le village ou la ville, par exemple, constituent autant d’échelles d’appartenance qui donnent lieu à des mobilisations et à des luttes comme formes d’actions collectives organisées autour d’une contestation d’un pouvoir exercé par une institution (publique ou privée). Outre cette dimension scalaire dépendante des inscriptions, appartenances, attachements ou identités, le territoire peut également faire l’objet d’une approche thématique, justifiant en quelque sorte sa constitution comme territoire de lutte. Ainsi, la ZAD de Notre-Dame-des-Landes s’est-elle articulée autour de la sauvegarde de terres cultivables et cultivées, pour la défense de ces activités agricoles et des personnes qui y résidaient. De même, les mobilisations contre les mécanismes de gentrification, comme à Poble Sec à Barcelone ou à Jackson Heights à New York, se réclament parfois d’une préservation de territoires mixtes et historiquement accueillants. Cette construction informelle du territoire objet d’action collective se construit en réponse aux transformations – d’origine institutionnelle ou non – dont il fait l’objet et qui sont porteuses de formes d’injustices, auxquelles l’action collective entend s’opposer. Les auteur·e·s sont ainsi invité·e·s à réfléchir à la dimension construite du territoire objet de lutte et à examiner dans quelle mesure les actions collectives créent des dynamiques territoriales au croisement entre pouvoirs publics et société civile.

The territory as a living space and an area within which powers are exercised (Raffestin, 1980) is, of course, a locus of multiple domination issues. It can refer, for example, to a frame for the expression of a national community, or simply to the spaces of everyday life (Scott, 1985): the street, the neighbourhood, the village or the city, for example, constitute different scales of belonging that generate movements and struggles as forms of collective action organized around opposition to power exercised by an institution (public or private). In addition to this scalar dimension, which depends on embeddedness, belonging, attachments or identities, the territory can also be approached thematically, in a way justifying its construction as an object—rather than simply the spatial medium—of struggle. For example, the objective of the occupation of the Notre-Dame-des-Landes ZAD (Zone to Defend) was to safeguard cultivable and cultivated land, and hence to defend both the agricultural activities and the people living on that land. Similarly, some movements against gentrification mechanisms, such as those in Poble Sec in Barcelona or Jackson Heights in New York, claim to be acting in protection of mixed and historically welcoming territories. This informal construction of the territory as an object of collective action emerges in response to the transformations—institutional or otherwise—perpetrated on it, which are the vehicles of forms of injustice that collective action seeks to oppose. Authors are thus invited to reflect on the constructed dimension of the territory as an object of struggle. Papers may also examine how collective action generates territorial dynamics at the interface between public authorities and civil society.

2. Les territoires des actions collectives : des espaces du proche et des espaces relationnels

2. The places of collective action: spaces of proximity and relational spaces

Les luttes relatives à des projets d’aménagement ou d’infrastructure prennent souvent naissance dans des réseaux d’interconnaissance qui peuvent être implantés à l’échelle d’un quartier, d’un bassin de vie ou dans un contexte informel. Comme l’a montré McAdam (1982), les liens de proximité et les communautés préexistantes jouent en effet un rôle essentiel dans le déclenchement de mouvements sociaux (Lichterman, 1996). Les registres affectifs et les émotions liées au proche constituent également des ressorts de l’engagement individuel et collectif (Traïni, 2015 ; Dechézelles et Olive, 2016), et les associations peuvent être à l’origine de la construction de liens sociaux territorialisés (Vermeersch, 2006) dont l’informalité apparaît comme un mode de gouvernement. Les auteur·e·s sont donc invité·e·s à saisir comment les liens unissant les membres des mobilisations étudiées prennent corps au sein d’un espace défini, dans quels lieux et à quelle(s) échelle(s).

Struggles relating to urban or infrastructure projects often originate in acquaintanceship networks, which can be established at the scale of a neighbourhood, a population centre, or an informal entity. As McAdam (1982) has shown, proximity networks and pre-existing communities play an essential role in triggering social movements (Lichterman, 1996). Affective registers and interpersonal emotions are also sources of individual and collective engagement (Traïni, 2015; Dechézelles and Olive, 2016), and civil society organizations can construct territorialized social networks (Vermeersch, 2006) whose informality resembles a mode of government. Authors are therefore invited to explore how the bonds between the members of the movements studied form within a territory, where they operate, and at what scale(s).

En s’intéressant aux réseaux d’acteur·trice·s de ces actions collectives, les auteur·e·s pourront ainsi proposer une analyse des mobilisations qui s’intéresse à la dimension relationnelle de l’espace et des lieux où elles prennent forme.

By focusing on the networks of actors in these collective movements, authors will be able to propose an analysis of collective actions that focuses on the relational dimension of the places where they take shape.

3. Une lecture géographique des lieux de l’action collective, entre formel et informel

3. A geographical reading of the places of collective action, between formal and informal

Plus pragmatiquement, au travers des pratiques spatiales issues de ces luttes, se fait jour une géographie spécifique, hybridant espaces publics et privés, lieux de l’institution – « officiels » – et lieux de rencontre plus informels – « du quotidien ». Plus encore, il s’agit de ne pas se limiter à l’insurgent urbanism (Hou, 2010 ; Maziviero, 2016) et d’appréhender aussi combien des lieux qualifiés de « privés » peuvent être porteurs d’actions collectives jusqu’à en devenir une condition, une modalité d’action voire un symbole du territoire tel que projeté, imaginé et symbolisé par la mobilisation. La dimension territoriale à appréhender ici doit donc être saisie dans toute sa complexité et son épaisseur, considérant que le territoire est le fruit d’une articulation de pratiques spatiales quotidiennes, de règles de fonctionnement institutionnelles, d’appropriations matérielles ou encore de constructions symboliques.

More pragmatically, through the spatial practices resulting from these collective actions, a specific geography emerges, a hybrid of public and private spaces, “official” institutional places, and more informal “everyday” meeting places. Moreover, this perspective is not necessarily restricted to insurgent urbanism (Hou, 2010; Maziviero, 2016) but can explore the extent to which places described as private can be the vehicles of collective action, to the point of becoming a condition, a modality of action, or even a symbol of the place as projected, imagined and symbolized by the activist movement. The territorial dimension examined here must therefore be grasped in all its complexity and depth, on the understanding that places are the product of connections between daily spatial practices, institutional rules of operation, material appropriations, or even symbolic constructions.

 

 

Consignes aux auteur·e·s

Instructions to authors

Nous invitons les contributions à s’inscrire au sein de l’un de ces trois axes. L’appel est ouvert à des auteur·e·s de disciplines autres que la géographie (urbanisme, anthropologie, science politique, histoire, sociologie…) dès lors que la question territoriale est centrale à l’approche proposée. Le traitement de cas d’études internationaux sera également bienvenu. Il est suggéré aux auteur·e·s de présenter des contributions appuyées sur un travail empirique éclairé par un cadre théorique clairement énoncé.

Authors are asked to align their contributions with one of these three threads. The call is open to authors from disciplines other than geography (urbanism, anthropology, political science, history, sociology…) provided that the territorial question is central to the approach proposed. Proposals that draw on international case studies are also welcome. It is suggested that authors present contributions based on empirical work informed by a clearly stated theoretical framework.

Justice Spatiale | Spatial Justice est une revue bilingue à comité de lecture. Les articles peuvent être soumis en français ou en anglais. Les articles peuvent être basés sur une étude de cas ou offrir une perspective plus théorique. La revue utilise une évaluation en double aveugle et tous les articles seront évalués par deux évaluateurs anonymes. Les articles soumis en français doivent compter au maximum 7 000 mots, bibliographie comprise. Veuillez respecter le modèle d’article de JSSJ disponible en ligne sur le site de la revue : http://www.jssj.org/recommandations-aux-auteurs/.

Justice Spatiale | Spatial Justice is a bilingual peer-reviewed journal. Articles can be submitted in French or English. Papers may be based on a case study or offer a more theoretical perspective. The journal uses double-blind review and all articles will be assessed by two anonymous reviewers. Articles sent in English should be limited to a maximum of 6,000 words including bibliography. Please follow the JSSJ article template available online at http://www.jssj.org/recommandations-aux-auteurs/.

Des contributions illustrées par des éléments visuels (photos, cartographies, schémas spatialisés…) seront également les bienvenues.

Contributions illustrated by visual elements (photos, maps, spatial diagrams…) are also welcome.

Les auteur·e·s qui s’interrogent sur la pertinence de leurs propositions peuvent contacter les coordinateur·rice·s du numéro. Les auteur·e·s qui le souhaitent sont invité·e·s à faire parvenir des propositions d’article avant le 22 octobre 2021. Les auteur·e·s doivent envoyer leur article complet aux coordinateur·rice·s du numéro avant le 1er décembre 2021.

Authors uncertain about the relevance of their proposals can contact the individuals responsible for the topic. Authors can submit proposals for papers before October 22, 2021. Authors should send their complete articles to the coordinators of the special issue before December 1st, 2021.

 

 

Contacts : Judicaelle DIETRICH judicaelle.dietrich@univ-lyon3.fr, Élise ROCHE elise.roche@insa-lyon.fr et Thomas ZANETTI thomas.zanetti@univ-lyon3.fr

Contacts: Judicaëlle DIETRICH judicaelle.dietrich@univ-lyon3.fr, Élise ROCHE elise.roche@insa-lyon.fr and Thomas ZANETTI thomas.zanetti@univ-lyon3.fr

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Bibliographie

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