Quand l’autonomie locale rencontre la justice spatiale : l’action citoyenne dans les zones urbaines de la ville de Kotka

Local Autonomy Meets Spatial Justice: Civil-Action in Urban Kotka

Introduction et enquête

Introduction and enquiry

Le but des politiques de cohésion est d’œuvrer en faveur d’un développement économique durable, équitablement réparti dans l’espace, et d’améliorer la qualité de vie d’un territoire donné (UE, État ou région). Elles sont plus efficaces, estime-t-on, quand elles sont déployées au plus près du niveau local et des citoyens. C’est à cette hypothèse que s’attelle cet article, suite à une recherche effectuée sur une initiative – c’est-à-dire  l’action locale de la société civile à Kotka – qui doit sa « complexité » au fait d’être emboîtée dans des politiques de cohésion multi-niveaux. Plus précisément, ce travail pose la question suivante : dans quelle mesure attribuer une plus grande autonomie à la « localité » et aux acteurs locaux peut-il contribuer à rendre les politiques de cohésion plus efficaces en matière de justice spatiale ?[1].

Cohesion policies aim at spatially balanced and sustainable economic development and improved quality of life across a particular territory (of the EU, a country or a region). They are deemed more effective when their deployment is brought closer to the local level and the citizens. On a general level, this paper investigates this assumption based on research conducted about a complex “initiative”, a civil-society based local action in Kotka intriguingly embedded in multi-level cohesion policies. More specifically, present study contributes to the understanding of whether, and especially, how greater autonomy of the “locality” and local actors can result in more effectiveness of cohesion policies in delivering better spatial justice[1].

L’« autonomie » du niveau local dépend non seulement des pouvoirs que le droit lui confère, mais aussi de sa propre capacité (ou celle de ses acteurs) à formuler et à poursuivre une stratégie de développement local fondée sur le lieu. A Kotka, ville moyenne du sud-est de la Finlande, l’initiative étudiée a abouti successivement à la création de deux projets citoyens, portant chacun sur la mobilisation de groupes d’habitants vulnérables. Elle témoigne ainsi d’une focale locale et d’une approche « par le bas ». Toutefois, en raison de sa dépendance à des ressources extérieures, c’est-à-dire à des financements européens, cette action citoyenne a été habilitée et contrôlée « par le haut », en fonction des intérêts, des priorités et des structures déployés au niveau européen, national ou régional. Cet emboîtement dans des structures multi-niveaux s’avère dès lors être un bon terrain d’étude. Il permet en effet d’appréhender les implications et la dynamique des forces de l’autonomie, mais aussi les multiples significations et dimensions du « local ». Quels sont les facteurs qui limitent potentiellement, ou au contraire étendent, le rôle de l’initiative en faveur d’une plus grande autonomie du niveau local, c’est-à-dire de sa faculté à faire face aux injustices sociales et/ou spatiales ? Quelles sont les dimensions et les définitions du « local » qui émergent à travers la logique d’intervention de cette initiative ? C’est à ces questions que cet article souhaite apporter des éléments de compréhension.

The “autonomy” of the local level depends both on its powers granted by law as well as on its own (stakeholders’) capacities to formulate and pursue a place-based strategy for local development. The initiative studied in Kotka, a medium-sized city in Southeast Finland, giving rise to two consecutive grassroots projects targeting the activation of various vulnerable groups of residents, is local in its focus and “bottom-up” in its main approach. However, due to its reliance on external resources, i.e. EU funds, this grassroots action has been both enabled and controlled “from above” by European, national and regional interests, priorities and structures. Such embeddedness in multi-level structures provides a good ground for studying the implications and dynamic forces of autonomy as well as the meaning and dimensions of the “local”. The present paper therefore seeks to understand what factors limit and extend the potential of the studied initiative to increase the autonomy of the local level in terms of its power to deal with social/spatial injustices; what dimensions and definitions of the “local” emerge in the initiative’s intervention logic.

Entretiens semi-directifs, focus groups et observations (participantes ou non participantes) ont assuré ici l’essentiel des données mobilisées. Nous avons pu ainsi explorer comment l’initiative a opéré pour améliorer certains aspects des injustices sociales et/ou spatiales, et dans quelle mesure celle-ci a contribué à l’« empowerment » du niveau local pour l’aider à affronter ce type d’enjeux[2]. Ce travail s’appuie de plus sur l’examen de différents documents portant sur les politiques concernées, mais aussi sur les débats qui ont accompagné à l’échelle européenne et nationale la mise en œuvre du DLAL. Il accorde enfin une place importante à la littérature académique dédiée à l’autonomie et à la justice spatiale.

Semi-structured expert interviews, focus-group discussions and (participatory and non-participatory) observations provide the bulk of the information that help explore how the studied initiative works on improving various aspects of social/spatial injustice, and to what extent it “empowers” the local level to address those issues.[2] In addition, the study draws on a review of relevant policy documents, documentation of national and European debates on deploying CLLD, as well as academic literature on autonomy and spatial justice.

Après avoir dressé un bref aperçu de nos principaux points de départ conceptuels, nous présenterons ensuite la « trajectoire » de l’initiative, c’est-à-dire ses deux projets successifs, puis la ville de Kotka, c’est-à-dire l’environnement local dans lequel elle s’inscrit. Seront ainsi abordées des données essentielles sur les contextes de la justice spatiale, le « champ d’action » social et institutionnel, les parties prenantes, ainsi que la chronologie simultanée des étapes clés. Enfin, l’analyse s’attachera à identifier les caractéristiques de l’initiative et du contexte dans lequel elle a émergé pour les mettre au contact de notre hypothèse de départ – qui articule justice spatiale et autonomie – et in fine apporter des réponses aux questions posées.

Following a brief outline of the main conceptual starting points, the “story” of the initiative implemented via two consecutive projects and Kotka, as its local setting, are presented below. This is done in order to communicate the important facts regarding contexts of spatial justice, the social and institutional “action field” and stakeholders as well as the timeline of relevant concurrent processes. The analysis relates various features of the initiative and its context to the conceptual points of departure, i.e. intricacies of spatial justice and local autonomy in order to formulate responses to the initial enquiries.

 

 

Points de départ conceptuels : articuler la localité, l’autonomie et la justice spatiale

Conceptual starting points connecting locality, spatial justice and autonomy

L’approche adoptée dans cet article repose essentiellement sur une perspective multiscalaire, mais surtout multidimensionnelle, des relations socio-spatiales (dont les apports ont déjà été soulignés in Jessop et al., 2008 ; Jessop, 2016). Sur le plan conceptuel, cette perspective présente en effet l’avantage d’établir un lien entre d’une part, l’ensemble des dynamiques à l’oeuvre au sein de la justice spatiale ; de l’autre, les sources de pouvoir et les formes d’autonomie du local dans des contextes de gouvernance multi-niveaux. L’approche multi-dimensionnelle a par ailleurs fait ses preuves sur le plan empirico-analytique. La réglementation territoriale, le déploiement multi-scalaire des financements (ex. le DLAL), et l’exercice de compétences administratives sur un lieu donné (ex. Kotka) sont en effet indissociables des « soft spaces » – définis par des imaginaires multiples, flexibles et constamment négociés de la spatialité (Servillo, 2019 ; Allmendinger et Haughton, 2009) – mais aussi des réseaux qui, créés et animés dans le cadre de l’initiative par différents acteurs (locaux ou autres), contournent les échelles.

This paper has an essentially not only a multiscale but a multidimensional approach to sociospatial relations (recognising its advantages as proposed in Jessop et al., 2008; Jessop, 2016). On the conceptual level, this perspective helps to achieve the ambition to link the framing of spatial justice dynamics with theories about the sources of power and different types of autonomy of the local level within a multi-level governance setting. Furthermore, the multidimensional approach is justified also on an empirical-analytical level. Territorial rules and multiscale deployment of (e.g. CLLD) funding and the administrative jurisdiction of places (e.g. of Kotka) closely intertwine with the “soft spaces” of various, flexible and negotiated spatial imaginaries (Servillo, 2019; Allmendinger and Haughton, 2009) and scale-jumping networks constructed and pursued by different actors (on local and other levels) in the story of the studied initiative.

Ce travail fait appel au concept de « localité », développé par Madanipour et al. (2017) à la suite d’auteurs tels que Lefebvre, Harvey ou encore Massey. Par ce biais, il s’agit d’appréhender les inhibiteurs et les promoteurs qui interviennent dans le cadre de l’initiative, lorsque celle-ci cherche à améliorer la justice spatiale pour renforcer l’autonomie locale. Selon cette approche, les localités constituent « des éléments poreux et interconnectés, inscrits dans des contextes plus larges », au « centre d’une série de forces qui participent aux (in)justices spatiales et à la légitimité démocratique ». Elles doivent donc être analysées « dans une perspective critique et la plus ouverte possible » (Madanipour et al., 2017, p. 77). De nombreux processus sociaux et économiques contournent de fait la territorialité politique des instruments de financement, lesquels sont définis par des niveaux spatio-administratifs distincts aux limites rigides de compétence territoriales. En plus d’établir des hiérarchies qui peuvent être source de déficit démocratique et de déséquilibres de pouvoir, les relations verticales peuvent en outre faciliter une redistribution top-down des ressources en faveur des lieux qui se trouvent en situation d’« injustice » au niveau régional, local ou « infralocal » (ex. le quartier ou la communauté). La diversité des flux ainsi que les relations de concurrence entre villes et régions créent en effet des disparités en matière de développement socio-économique. Il existe néanmoins des formes horizontales de coopération et de coordination qui peuvent réduire les déséquilibres engendrés par des hiérarchies verticales et ce type de relations. Celles-ci peuvent en outre venir compléter des politiques top-down qui défendent un développement local fondé sur les lieux. Par ailleurs, les hiérarchies et les réseaux sont marqués par des relations transversales qui franchissent ou contournent les échelles. Enfin, les localités sont elles-mêmes des sites traversés par « le multiple, la variation, la diversité », lesquels possèdent leurs propres modèles et dynamiques internes en matière de justice spatiale. Les territoires, les lieux, les échelles et les réseaux sont interconnectés ; les localités ne sont pas figées, pas plus qu’elles ne se suffisent à elles-mêmes. Evaluer les ressources, les compétences et les pouvoirs mobilisés par une localité pour améliorer la justice sociale et spatiale implique par conséquent de s’attarder tout d’abord sur ces trois dimensions.

In order to describe inhibitors and promoters of the studied initiative’s ability to strengthen local autonomy in advancing spatial justice, this study employs the approach by Madanipour et al. (2017) to the concept of “locality”, which is in turn inspired by, for instance, Lefebvre, Harvey and Massey. Localities are “porous and interlinked parts of wider contexts”, and the nexus of a range of forces that contribute to spatial (in)justice and democratic legitimacy”, and thus are to be analysed “from a critical and open perspective” (Madanipour et al., 2017, p. 77). Many social and economic processes surpass the political territoriality of the funding instruments of distinct spatial-administrative levels with fixed territorial limits of competence. Vertical relationships, besides establishing hierarchies that may be the source of democratic deficit and power imbalances, may also facilitate top-down redistribution of resources in favour of places in “unjust” positions at the regional, local (and “sub-local”, e.g. neighbourhood and community) scales. Various flows and competitive relationships between cities and regions create disparities in socio-economic development. However, horizontal forms of cooperation and coordination have the potential to reduce imbalances generated by these relations as well as vertical hierarchies. They may also complement top-down policies that promote place-based development. In addition, hierarchies and networks are interconnected with transversal relations cutting across and jumping scales. Finally, localities themselves are sites of “multiplicity, variation and diversity” with their own internal patterns and dynamics of spatial justice. Therefore, territory, place, scales and networks are interconnected, and localities are not fixed neither self-contained. Consequently, the assessment of resources, capacities and powers of the locality to pursue its own ends in achieving improved social and spatial justice needs the recognition of all these dimensions.

Cette initiative soulève d’autre part la question des relations entre société, espace et exclusion. Ces interactions, qui traversent la notion de justice spatiale (Lefebvre, 1974, Harvey, 1973/2009, d’après Rawl, 1971 ; Soja, 2010) peuvent être comprises comme l’« ensemble des relations entre dynamiques spatiales et justice » (Morange et Quentin, 2018, p. 2). En raison du contexte décrit plus haut, à la fois multi-dimensionnelle et multi-acteurs, il est en effet impossible d’ignorer l’influence des différentes expériences et perceptions de l’injustice sur l’action publique, lesquelles sont fonction d’échelles et d’acteurs qui participent aux « politiques de cohésion », de l’Europe à l’individu. Subir des injustices spatiales (distributives) et leurs rouages, mais aussi les définir, a pour effet de motiver et d’orienter la formulation de réponses concrètes – en d’autres termes, de mesures de correction. Dans ce sens, il n’est pas surprenant que la normativité et la relativité de la justice (ibid.) se situent au point d’intersection de ses aspects distributifs et procéduraux.

Furthermore, the local initiative presented in this paper revolves around the relationship between society, space and exclusion that is, interactions expressed by the concept of spatial justice (Lefebvre, 1974, Harvey, 1973/2009 inspired by Rawls, 1971; Soja, 2010), the “ensemble of relations between spatial dynamics and justice” (Morange and Quentin, 2018, p. 2). In light of the multidimensional and multi-actor setting discussed above, it is impossible to ignore the possibility that policy actions are influenced by the different experience and perception of injustices on the various levels and by diverse stakeholders in “cohesion policies” from Europe to the individual. Since the experience and definition of the existence and the patterns of (distributive) spatial injustices motivate and direct the formulation of the actual responses (corrective processes) to those, the relativity and normativity of justice (ibid.) lie certainly at the heart of the interconnectedness of the distributive and procedural aspects of justice.

La notion de justice spatiale gagnerait donc à prendre en compte les connexions qui en articulent les dimensions distributives et procédurales (suivant par exemple Rawls, 1971), afin de mieux saisir les facteurs, les objectifs et les résultats de l’action étudiée. Au lieu de hiérarchiser et de comparer différentes lectures de la justice, appréhendées en termes de « résultats » ou de « processus », il est en effet possible d’explorer les connivences qu’elles entretiennent, en prêtant attention aux processus qui affectent les pouvoirs au niveau local. Les situations (in)justes réelles ou perçues – qui sont aussi le produit de relations et de processus socio-spatiaux – témoignent de la présence ou de l’absence, concrète ou imaginée, de ressources et d’opportunités qui permettent d’améliorer les relations et les « processus », lesquels peuvent en effet générer dans la localité et sa population un empowerment « procédural », mais aussi une conjoncture « distributive » plus favorable. La stigmatisation spatiale ou territoriale, dont la localité a fait l’expérience sous une forme modérée, montre bien que les éléments de la chaîne « processus-résultat-processus » de l’injustice spatiale ne peuvent être appréhendés séparément. Pour cette raison, lutter contre la stigmatisation spatiale implique de combiner des politiques sociales réfléchies, qui émanent autant des pouvoirs publics que d’un milieu associatif et militant bien structuré (Slater, 2015, p. 25).

Therefore, in order to better understand the drivers, objectives as well as achievements of the action in focus, the idea of spatial justice is opened up in terms of the connections between the distributive and procedural aspects of justice (based on e.g. Rawls 1971). By this, any prioritisation and contrast between justice understood as “outcome” or “process” can be played down and instead, their interaction be explored offering an insight into processes that affect the powers of the local level. Existing and/or perceived (un)just situations (that are also results of sociospatial relations and processes) mean the actual or perceived existence/lack of resources and opportunities for the improvement of relationships and “processes” that could bring about the “procedural” empowerment and improved “distributive” situation of the locality and its people. An example for the inseparability of the elements in the process-outcome-process chain behind spatial injustice is the phenomenon of spatial or territorial stigmatization (a mild form of which has been experienced in the locality in focus of this paper). That is why the elimination of spatial stigma requires a combination of thoughtful social policies by the public sector and well-organized community activism (Slater, 2015, p. 25).

Enfin, à côté de cette approche dynamique, qui conçoit la justice spatiale à l’articulation interactive de ses volets distributif et procédural, l’autonomie locale est conceptualisée à partir de deux principes de pouvoir qui ont d’abord été élaborés d’après la conception (plus étroite et constitutionnelle/légale) qu’en a donné Clark (1984), avant d’être évoqués dans des travaux plus récents (par ex. Pratchett, 2004 ; Ladner et al., 2016). Deux ensembles inextricables de facteurs (re)distributifs et procéduraux sont à l’oeuvre en ce qui concerne l’empowerment local à Kotka (voir ci-dessous). Il s’agit d’une part de comprendre comment le « pouvoir d’initiative » est exercé et exprimé au niveau local, lequel fait écho aux savoirs du lieu, aux compétences et aux perceptions, mais aussi à la participation et aux partenariats locaux. De l’autre, il s’agit d’appréhender comment les niveaux supérieurs de gouvernance confèrent à la localité son « pouvoir d’immunité » ou à l’inverse le restreignent (et comment le niveau local peut agir pour le renforcer). En d’autres termes, comment garder une certaine liberté d’action sans contrôle (excessif) des échelons supérieurs, sans pour autant ignorer l’emboîtement de la localité dans une gouvernance  multi-niveaux dont elle est aussi dépendante. Il faut ici souligner que le cadre conceptuel a initialement été inspiré par des structures de pouvoir légales et formelles/institutionnelles, selon lesquelles le local (c’est-à-dire un gouvernement local institué) jouit d’un certain degré d’autonomie. Cet article étend l’usage de cette théorie pour venir englober une appréhension plus large, et non institutionnelle, de « l’action autonome » par les acteurs locaux. Il s’agit par ce biais d’aller explorer ce qui se passe « sous » et « derrière » le niveau de gouvernance local pour englober l’initiative d’acteurs informels et associatifs, et ainsi comprendre dans quelle mesure, et par quels moyens, cette dernière peut conférer à la localité un degré d’empowerment qui lui permette de lutter contre les injustices spatiales.

Finally, linked to this dynamic approach in understanding spatial justice as an interactive combination of its distributive and procedural aspects, local autonomy is conceptualised in terms of the two principles of power, elaborated first in relation to (a narrower, more constitutional/legal understanding of) local autonomy by Clark (1984), but also evoked in more recent work on the subject (e.g. Pratchett, 2004; Ladner et al., 2016). Two inextricable sets of various (re)distributive and procedural factors in local empowerment are examined in the Kotka case below. One is the ways how the “power of initiative” is expressed and exercised locally. These evoke ideas of place-based knowledge, capacities and perceptions, as well as participation and local partnerships. The other is the ways higher levels grant or limit the locality’s “power of immunity” (and how the local level may strive to enhance such power). This regards the degree of freedom to act without (too much) control of higher tiers of government, yet not ignoring the locality’s embeddedness in and dependence on, European multi-level governance. It has to be noted that the original conceptual framework is inspired by legal and formal-institutional power structures in which the local (that is, the institution of a local government) exercises a certain level of autonomy. This paper extends the use of the theory in order to match a broader and non-institutional notion of “autonomous action” by local actors, too. This is done to be able to go “below“ and ”behind” local government and study the initiative of informal, grassroots actors in order to understand whether and how it eventually has the potential to empower the locality as a whole, in its dealing with spatial injustice.

 

 

Kotka et l’action locale

Kotka and its local initiative

Kotka et la justice spatiale

Kotka and spatial justice

 

 

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Emplacement de Kotka dans la région de Kymenlaasko et en Finlande ; emplacement des quartiers de Hovinsaari et de Karhuvuori dans la ville de Kotka, caractéristiques spatiales du taux de chômage dans la ville de Kotka (par code postal). Source : Statistics Finland, base de données Paavo, 2014/2015 (d’après Fritsch et al., 2019).
The location of Kotka in Finland and Kymenlaakso region; the locations of the Hovinsaari and Karhuvuori neighbourhoods within the city of Kotka, spatial patterns in the share of unemployment in labour force within the city of Kotka (by postal districts) Source of data: Statistics Finland, Paavo database, data from 2014/2015. (Based on Fritsch et al., 2019).

Ville de taille moyenne du sud-est de la Finlande (voir Figure 1), située au bord du Golfe de Finlande dans la région du Kymenlaakso, à 130 km d’Helsinki, Kotka a longtemps souffert des changements structurels qui ont affecté ses principaux secteurs d’activité : l’exploitation forestière traditionnelle et son port international. La récession, au début des années 90 puis à partir de 2008, a eu pour effet d’amplifier l’impact délétère de la restructuration sur l’économie locale, dont a résulté l’augmentation du chômage, notamment longue durée, et chez les jeunes. Bien qu’en la matière, Kotka soit loin d’être un cas exceptionnel en Finlande (les problèmes qu’elle rencontre sont en effet répandus dans les régions est et sud-est), une partie des habitants et certains quartiers éprouvent par rapport au reste du pays un fort sentiment de mal-être (défini ici par opposition aux conditions qui délimitent le bien-être au sens large, sur le plan physique et social). Le taux de morbidité, l’abus de substances psychoactives et les problèmes de santé mentale sont en effet plus élevés que la moyenne (nationale), et ont par conséquent un impact négatif sur l’atmosphère ambiante, l’estime de soi et la perception externe du lieu. A Karhuvuori, l’émergence de la stigmatisation spatiale est palpable, avec le risque de voir se reproduire une situation socio-économique défavorable. Il est d’ailleurs tout à fait admis que des efforts intégrés (menées par différents secteurs, internes et externes) doivent être entrepris pour y remédier. Certes, par rapport au reste de l’Europe et du monde, même les quartiers les plus « défavorisés » de Kotka et ses habitants les plus vulnérables jouissent d’un environnement protégé et d’une bonne qualité de vie. Néanmoins, l’appréciation d’une vie difficile reste une expérience normative, à la fois objet et résultat de perceptions de soi et des autres. Les injustices sont bien réelles et doivent être combattues.

Kotka, a medium-sized city in Southeast Finland (Figure 1), located on the Gulf of Finland (130 km east of the capital Helsinki, in the Kymenlaakso region), has for long suffered from the structural changes in its economic base: traditional forest industry and an international port. Recessions in the early 1990s and since 2008 have amplified the adverse effects of restructuring in the local economy and led to increased, especially long-term and youth unemployment. Although Kotka is not exceptional in Finland with such problems (which are particularly common in the eastern and south-eastern regions of the country), in a national comparison, certain groups of its residents and some of its neighbourhoods are exposed to significant levels of unwell-being (i.e. conditions opposite of broad understanding of social- and health-wise well-being.) Higher (than national) levels of morbidity, substance abuse, mental health problems have been recorded, which in turn have negative impacts on the overall atmosphere, self-esteem and external perception of the place. The emergence of a negative spatial stigma is observable in Karhuvuori, posing a risk of socio-economic disadvantage being reproduced; it is generally understood that its removal requires integrated efforts (external and internal, and by different sectors). On the one hand, objectively, one could note that in a European, and especially global, comparison, even the most “deprived” parts of Kotka or most vulnerable groups of its residents have a relatively secure and high quality of life and environment. On the other hand, one needs to remember that disadvantagedness is a normative experience and is the object as well as result of, self- and external perceptions. Injustice does exist and calls for treatment.

La municipalité de Kotka : autonomie et promotion de la justice spatiale

Kotka’s autonomy as a municipality and its role in promoting spatial justice

Du point de vue administratif, Kotka est une municipalité qui s’inscrit dans le cadre du système politique unitaire finlandais. Bien établie et bien organisée dans le pays, l’administration municipale fonctionne de manière relativement ouverte, inclusive et participative. Ceci lui permet en général de créer des institutions hybrides et des interfaces communes qui allient le secteur public et le secteur privé et/ou les associations issues de la société civile. Les communes assurent une grande variété de missions et de compétences dans le domaine des services publics, tels que prévus par la loi : l’éducation, la santé, les affaires sociales, et les services culturels et techniques (c’est-à-dire deux tiers du total des services publics). La prestation des services municipaux, qui s’appuie sur une base législative solide, est financée grâce aux taxes municipales, à des transferts de l’Etat central et à d’autres frais de services (Kuntaliitto, 2018).

In terms of administration, Kotka is a municipality within the Finnish unitary system of government. A well-established and well-functioning system of municipal governments works in this country already in a relatively open, inclusionary and participatory fashion, generally allowing for hybrid institutions and interfaces between the public sector and private/civil society organisations. Municipalities have a wide range of functions and responsibilities, providing welfare services based on national legislation, such as education, social services, health care, cultural as well as technical services (currently two thirds of public services). Municipal service provision has a strong legislative base and is financed by municipal taxes, central government transfers as well as service charges (Kuntaliitto, 2018).

En raison de la place importante et des ressources dévolues aux communes, la ville de Kotka occupe une position de choix pour contribuer à la réduction des problèmes socio-économiques. À cette fin, un ensemble de politiques, de programmes et de projets locaux, soutenus par une stratégie à l’échelle de la ville, doit permettre de lutter directement contre la marginalisation. Ces stratégies locales ont (par convention) une approche sectorielle plus que spatiale, qui en général ne cible pas des quartiers spécifiques et n’investit donc pas dans le développement localisé d’infrastructures et de services (ex. école, bibliothèque, équipements sportifs). La ville reconnaît cependant que certains quartiers ont des besoins spécifiques. Dans les quartiers les plus en difficulté, la ville a également créé un service de soutien sur mesure, grâce à la venue d’un certain nombre de professionnels de santé et de travailleurs sociaux, lesquels ont permis d’établir un lien direct avec les habitants concernés.

Due to this strong and resourceful role allotted to municipalities, the City of Kotka is in a key position in mitigating socio-economic problems. This is done by addressing marginalisation directly through local policies, programmes and projects supported by citywide strategies. Although these local strategies have (conventionally) sectoral rather than spatial approaches, and do not usually target specific neighbourhoods, via investments into the development of place-bound infrastructure and services (e.g. new school, library and sports facilities, etc.) the City acknowledges the particular needs of specific areas and improves their situation. The City has also provided tailor-made support services in form of placing a number of professionals from the health and social sector in more deprived neighbourhoods in order to establish direct links to the resident population in need of such services.

Il faut noter par ailleurs qu’un « tournant participatif » marque l’approche globale de la ville en termes de développement local. Un nouveau Plan stratégique pour la ville de Kotka, dont la période d’application s’étend jusqu’à 2025, a ainsi été publié récemment (mai 2018). « Agir ensemble », mais aussi participer et permettre aux habitants de prendre part aux décisions, sont les nouveaux mots d’ordre de cette orientation. L’un des quatre axes du Plan stratégique proclame justement : « Kotka en commun – une ville où agir ensemble, une ville de belles rencontres ». Désormais bien consciente du rôle que peuvent jouer les organisations du tiers secteur dans la lutte contre la marginalisation sociale, la municipalité est ouverte à des formes de collaboration pour remédier aux effets des injustices socio-spatiales dans la ville.

There is also a visible “participatory shift” in the City’s overall approach to local development. This is indicated by the recently (May 2018) published new City Strategy of Kotka with a timeframe until 2025. “Doing things together”, participation and giving residents the opportunity to influence decisions appear to be at the centre of this new strategy. In fact, one of the Strategy’s four pillars is “Our shared Kotka – A City of doing things together and jolly encounters”. In this spirit, the City recognises even more than before the role of third-sector organisations in tackling social marginalisation, and shows openness to co-operation with them in activities that mitigate the effects of socio-spatial injustices in the city.

Des projets locaux mais emboîtés :  processus et structures des échelons supérieurs de gouvernance

The local projects and their embeddedness into higher-level structures and processes

Dans ce contexte, les associations de la société civile – portées par l’association Leader Sepra Ry (désormais : Sepra) et soutenues par les autorités municipales et régionales – ont plébiscité une mesure proposée par le programme opérationnel du Fonds structurel finlandais, consacrée au développement local par l’action citoyenne (Priorité 5 du PO 2014-2020, voir Figure 2). Cette mesure est elle-même une variante nationale du concept de développement local mené par les acteurs locaux (DLAL). Forgé par l’UE, cet instrument de la politique de cohésion a pour but de permettre un développement intégré et  fondé sur les lieux. Financée par le Fonds social européen (FSE), la Priorité 5 représente un outil de choix pour Sepra et ses partenaires locaux et/ou régionaux : elle leur permet en effet de renforcer la coopération au profit des populations en difficulté qu’ils entendent représenter.

Against this background, civil society organisations led by the association “Leader Sepra ry” (from here on, Sepra), with the backing of the City and Regional Administration, decided to implement the civil-action-based local development component of the Finnish Structural Funds Operational Programme (Priority 5 of the OP 2014-2020, see Figure 2). This is a national variant of deploying the European concept of community-led local development (CLLD), which has recently been taking shape as a Cohesion Policy instrument of the EU for integrated place-based development. Sepra and their local-regional collaborators have found Priority 5 financed from the European Social Fund (ESF) adequate for strengthening their co-operation for the ultimate benefit of the disadvantaged groups they wished to represent.

Par ailleurs, le Kymenlaakso – où Kotka est située – est l’une des rares régions de Finlande où le conseil régional, en complément de la Priorité 5 du PO menée à l’échelle nationale, a choisi d’appuyer les initiatives locales d’action citoyenne par le biais d’une aide financière préparatoire à petite échelle. Un document, intitulé Plan d’action régional pour le développement par la société civile à Kymenlaakso 2014-2020, devrait à cette fin être rédigé conjointement  par Sepra et une association similaire du nord de la région (Kymen Kasvu), en concertation avec leurs municipalités respectives. L’existence de ce plan d’action a permis d’assurer une base solide aux propositions présentées au FSE par Sepra (et Kymen Kasvu) pour sa demande de financement.

Also, Kymenlaakso, where Kotka is located, is one of the few regions in Finland where, linked to the national-level instrument of OP Priority 5, the Regional Council has decided to support local civil-action-based initiatives with small-scale preparatory funding. As a result, a regional Action Plan for Civil Society Based Development in Kymenlaakso 2014-2020 could be prepared by Sepra jointly with a similar association from the northern part of the region (Kymen Kasvu), in consultation with their respective urban municipalities. The existence of this Action Plan offered a strong basis for the proposals Sepra (and Kymen Kasvu) submitted for funding under ESF.

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Calendrier de l’initiative : une évolution et des opérations simultanées et interconnectées à plusieurs niveaux de gouvernance (schéma de l’auteure).
Timeline of the initiative: simultaneous and interconnected developments and processes at various levels of governance (Author’s own elaboration)

En définitive, ce sont deux projets successifs qui auront été menés par Sepra depuis 2015 : Le développement local par les habitants à Kotka (2015-2017) et Le développement par les jeunes et la société civile dans le sud du Kymenlaakso (2017-2019). L’initiative en revient notamment à une association dont le rôle est d’appliquer le programme LEADER dans les zones rurales des environs (dans les municipalités voisines et « rurales » de Pyhtää, Miehikkälä, Virolahti et Hamina). Il n’est donc pas surprenant que l’initiative, dans son application concrète, ne se limite pas strictement au périmètre urbain de Kotka : la ligne de démarcation tracée entre le travail de « mobilisation » de Sepra en zones rurales et ses projets en ville est d’ailleurs volontairement floue. Sepra est connue en Finlande et en Europe pour sa contribution attentive et dynamique aux plateformes et discussions menées à l’échelle nationale et européenne sur la méthode du développement local par les acteurs locaux. Ces dernières, axées sur le développement rural, envisagent d’ailleurs depuis peu l’idée de créer un instrument de politique intégrée fondé sur des principes similaires.

Eventually, from 2015 onwards, two consecutive projects have been implemented by Sepra (“Residents-led local development in Kotka”, 2015-2016, and “Youth- and civil society-led local development in southern Kymenlaakso”, 2017-2019). Notably, the idea for this initiative comes from an association in charge of implementing the LEADER programme in the surrounding countryside (Pyhtää, Miehikkälä, Virolahti and Hamina being the surrounding “rural” municipalities). Hence, unsurprisingly, the initiative in its actual operations is not limited strictly to the urban part of Kotka – there is intentionally a blurry boundary between Sepra’s rural “activation” work and its projects in the city. Also notably, Sepra is known in Finland and Europe for being an interested and active participant in national and European-level forums and discussions concerning the community-led local development method, both related to rural development and the more recent idea of creating an integrated policy instrument centred on similar principles.

Inspiré de pratiques observées en milieu rural, un Conseil urbain est créé à Kotka sur le modèle des « groupes d’action locale » porté par le programme LEADER sur le territoire. Celui-ci est composé de membres issus d’associations de la société civile, du secteur éducatif local et de la ville de Kotka. Ce conseil, où siègent par ailleurs des représentants du coordinateur de l’initiative (c’est-à-dire Sepra), assure la mise en œuvre des deux projets mentionnés. Leur budget s’élève à environ 50 000 € par an, dont la majeure partie est dépensée en frais de gestion, et dont une proportion moindre est affectée à la mise en œuvre de divers événements, activités, excursions, etc. s’adressant à des habitants issus de groupes sociaux vulnérables.

Based on rural practice, a bit resembling the “local action groups” of LEADER areas, an Urban Board was set up in Kotka, composed of representatives of civil society associations, local education sector and also members from the City of Kotka. This Board, chaired by representatives of the initiative’s coordinator (Sepra), is at the helm of the implementation of the two consecutive projects. Their budget is around 50 000 euros annually, much of which is spent on management, while a smaller share is used for the implementation of various events, activities, excursions, etc. engaging residents from the vulnerable social groups.

 

 

Analyse : des processus et des compétences qui façonnent le pouvoir local d’immunité et d’initiative

Analysis: processes and capacities shaping local powers of immunity and initiative

Le pouvoir d’immunité

The power of immunity

De l’UE au Conseil régional du Kymenlaakso, en passant par les strates de gouvernement et/ou de gouvernance intermédiaires, la latitude dont disposent la localité et les habitants pour agir « comme ils le souhaitent dans les limites imposées par leur pouvoir d’initiative » est l’objet de négociations et d’influences (Clark 1984 : 198). La métagouvernance verticale ici à l’œuvre (Allmendinger et Haughton, 2009) se traduit par l’attribution de ressources au niveau local, mais aussi par la définition de priorités, de critères d’éligibilité et de modalités qui en conditionnent l’utilisation.

From the EU down to the Regional Council of Kymenlaakso, by multiple tiers of government/governance, the room for the locality and its residents to act “however they wish within the limits imposed by their initiative powers” (Clark, 1984, p. 198) is bargained and influenced. Part of this vertical metagovernance (Allmendinger and Haughton, 2009) is through the distribution of financial resources towards the local level, and part of it happens through defining priorities and setting eligibility criteria and conditions for the use of such funds.

Une initiative européenne pour autonomiser les acteurs locaux

EU initiative empowering local stakeholders

L’initiative étudiée prend appui sur un instrument spécifique de développement local mené par les acteurs locaux (DLAL), qui vise à « à impliquer les citoyens au niveau local pour répondre aux défis sociaux, économiques et environnementaux » auxquels sont confrontés les zones urbaines, tel que prévu aux articles 32-35 du Règlement portant dispositions communes (UE) n°1303/2013 (CE 2013) de la Commission européenne. Inspirée des pratiques menées dans le cadre du programme LEADER pour le développement rural mené par les acteurs locaux, cette approche doit permettre aux politiques de l’UE (et à leurs financements) d’atteindre une plus grande efficacité en ouvrant la voie aux communautés locales pour qu’elles puissent prendre part à l’élaboration et à la mise en œuvre de celles-ci (Commission européenne, 2014). Par ailleurs, l’UE a pour finalité d’appliquer l’approche DLAL aux quatre Fonds ESI et de les affecter au développement local, approche qui doit aboutir à l’autonomisation du niveau local dans la Politique de cohésion et encourager les stratégies de développement local intégrées et élaborées de façon participative. En ce sens, le programme LEADER est perçu comme un « modèle à suivre » dont les grands principes clés sont pris pour exemple : élaboration et mise en œuvre ascendantes des stratégies locales de développement par zone ;  partenariats publics-privés locaux et collaboration au sein des « groupes d’action locale » (GAL) ; actions intégrées et multisectorielles. L’objectif est plutôt ambitieux, puisqu’il s’agit d’obtenir le soutien simultané d’au moins deux des quatre fonds ESI pour une action unique (DLAL multi-fonds), et d’ainsi assurer un développement local intégré (site internet du REDR). Annonciateur d’un mode de gouvernance novateur, ce « modèle idéal » de développement par les acteurs locaux consiste à affecter des ressources financières au niveau infra-régional de prise de décision, à fixer quelles sont les conditions requises, et in fine à permettre l’autonomisation d’une multiplicité d’acteurs locaux ; en d’autres termes, leur donner voix aux chapitre quant aux décisions qui affectent la vie de leur « localité ».

The initiative under investigation is building on the wider EU scheme to build a community-led local development instrument (CLLD) “for involving citizens at the local level in developing responses to the social, environmental and economic challenges” in urban areas, laid down in Articles 32-35 of the Common Provisions Regulation (EU) No 1303/2013 (EC 2013) of the European Commission. Inspired by the community-led rural development practices under the LEADER programme, this approach is expected to raise the effectiveness of EU policies (and funding) by providing a route for local communities to take part in shaping the implementation thereof (European Commission, 2014). It appears that the ultimate aim of the European Union is to implement the CLLD approach in all four European Structural and Investment Funds (ESIF) for their deployment in local development, and thereby empowering the local level in Cohesion Policy and encouraging integrated local development strategies drawn up in a participatory manner. In this, LEADER, seen as a “success story”, is taken as an example with its key principles such as area-based local development strategies and their bottom-up elaboration and implementation, local public-private partnership and cooperation in “local action groups” (LAGs), and integrated and multi-sectoral actions. A rather ambitious objective is therefore, to have a single action supported by two or more of the four ESIF at the same time (i.e. multi-funded CLLD), and thus achieve integrated local development (ENRD website). This “ideal model” of community-led local development, promising a novel mode of governance, is about channelling financial resources to the sub-regional level of decision-making and setting such conditions for this funding that when fulfilled, empower a variety of local stakeholders: giving them voice in decisions that affect their lives in their “localities”.

Mise en œuvre finlandaise d’une politique européenne : quels effets sur la portée de l’initiative ?

Mise en œuvre finlandaise d’une politique européenne : quels effets sur la portée de l’initiative ?

Du côté finlandais, le ministère compétent (emploi et économie) s’était au départ prononcé contre le projet de la Commission, qui souhaitait étendre l’approche DLAL à tout type de régions (rural et urbain) et à l’ensemble des Fonds ESI. Il a finalement accepté de mener plusieurs formes d’expérimentation partielle du DLAL (Åström, 2015). Une des solutions proposées par la Finlande a consisté à instaurer, pour la période de programmation en cours, la stratégie « Une croissance et des emplois durables 2014-2020 » (soit un programme unique du FEDER et du Fonds FSE). Son l’objectif, décrit dans l’axe « Priorité 5 », vise « l’inclusion sociale et la lutte contre la pauvreté » pour « améliorer les compétences professionnelles et fonctionnelles de ceux et celles qui sont à l’écart de la vie active »[3]. Plus spécifiquement, ses buts sont les suivants :

The Finnish deployment of the EU policy affecting the scope of the initiative. Finland, the responsible ministry (Ministry of Economic Affairs and Employment) decided against the initial idea of the Commission to use the CLLD approach in all regions (both rural and urban) and in all ESIFs, but instead agreed on various ways of partial experiment with CLLD (Åström, 2015). One Finnish solution is that, in the present programming period, Finland’s structural funds programme “Sustainable growth and jobs 2014-2020“ (a single programme for both ERDF and ESF funds) includes in its 5th Priority Axis the aims of “Social inclusion and combating poverty”, to “improve the working and functional capacity of people outside working life”[3]. Its specific objectives are:

• renforcer l’inclusion sociale des personnes en grande difficulté et leurs compétences dans le domaine de la vie active, et formuler des mesures de prévention face au risque d’exclusion sociale, notamment chez les jeunes, les personnes âgées et les personnes en situation d’incapacité partielle ;

• Strengthening social inclusion and working life skills of the most disadvantaged as well as developing measures to prevent social exclusion, particularly where the young, ageing persons and people with partial working capacity are concerned;

• développer la coopération entre différents acteurs et services intersectoriels ainsi que les compétences correspondantes ;

• Development of co-operation between various actors and cross-sectoral services as well as the development of related skills;

• élaborer des approches et des services communs, centrés sur le citoyen, qui renforcent l’inclusion sociale (Fonds structurels de Finlande).

• Development of communal and citizen-centric approaches and services that enhance social inclusion (Structural Funds Finland).

En raison du caractère limité de cette « expérience DLAL », que vient d’ailleurs souligner son appellation officielle (« développement par l’action citoyenne dans les villes, ou  kansalaistoimijalähtöinen kehittäminen kaupungeissa, traduction de l’auteure, TEM, 2014), la Priorité doit permettre au minimum d’intégrer une partie des principes du « DLAL idéal » de l’UE : la coopération et les partenariats locaux ; l’inscription des habitants dans le développement local. En outre, un plan d’action (locale) doit être fourni par les demandeurs de financement, plus ou moins dans l’idée d’une stratégie de développement local par zone. Ces principes mettent en œuvre une approche ascendante, fondées sur les lieux, qui laisse une certaine marge de manœuvre aux parties prenantes au niveau local (et par extension aux habitants) pour décider comment les financements européens (ou du moins certains d’entre eux) pourront être employés. Enfin, si l’approche adoptée en Finlande porte sur la prévention et le traitement des injustices sociales et/ou spatiales, c’est qu’elle prête en particulier attention à l’inclusion et la mobilisation de groupes vulnérables, et permet donc l’empowerment des plus faibles pour qu’ils puissent participer au développement local.

Despite a limited nature of this “CLLD experiment” (underlined by calling it officially “civil-actor-based development in cities” – kansalaistoimijalähtöinen kehittäminen kaupungeissa; own translation, TEM, 2014), the Priority serves the incorporation of at least some of the principles of the EU’s “CLLD ideal”: local partnership and cooperation and the inclusion of residents in local development. Furthermore, a (local) action plan is required from the applicants for funding, somewhat in line with the idea of an area-based local development strategy. These enforce a place-based and bottom-up approach, giving some space for local-level stakeholders (and ultimately, local residents) in decisions on the ways (some) European funding is used. Moreover, the approach taken in Finland focuses specifically on the prevention and treatment of social/spatial injustices as it draws attention to the inclusion and activation of vulnerable groups in particular, meaning empowerment of the weakest to participate in local development.

Toutefois, le fait d’être financé par le seul FSE n’encourage pas une véritable approche multisectorielle (ni les partenariats publics-privés). Certains groupes d’acteurs locaux (comme les entreprises) en sont plus ou moins exclus – ou du moins leur prise en compte n’est-elle pas directement financée et soutenue, bien qu’ils en soient les bénéficiaires. L’initiative peut ainsi paraître limitée dans sa compétence (potentielle) à aborder les inégalités socio-économiques de manière plus intégrée, multisectorielle – et donc innovante (ce qui est intrinsèque au « modèle idéal » du DLAL). Il est pourtant possible de garantir au niveau local et infra-régional (c’est-à-dire à Sepra et aux acteurs associatifs de Kotka) un « pouvoir d’immunité » accru en les intégrant institutionnellement à la structure chargée de mettre en œuvre la politique de cohésion européenne (et son financement FSE) afin d’être au service des bénéficiaires finaux, i.e. les communautés locales, les jeunes chômeurs et autres groupes d’habitants vulnérables.

However, being funded by ESF alone, a truly multi-sectoral approach (and public-private partnership) is not encouraged, and some local stakeholder groups (e.g. businesses) are more-or-less excluded – or at least, their inclusion as beneficiaries is not directly promoted and funded. The initiative, therefore, can be seen as being limited in its (potential) capacities to address socio-economic inequalities in a more integrated, multi-sectoral – and so, a more innovative – manner (which is intrinsic to the “ideal model” of CLLD). Nevertheless, enhanced “power of immunity” is granted to the sub-regional and local level, Sepra and Kotka-based grassroots actors, by institutionally incorporating them to the structure that delivers European Cohesion Policy (its ESF funding) to serve the final beneficiaries, i.e. local communities, unemployed youth and other vulnerable groups of residents.

L’absence d’une véritable approche multisectorielle et intégrée, ici limitée, explique sans doute pourquoi une véritable focale spatiale fait défaut au travail de soutien mené par l’initiative auprès de groupes marginalisés, et ce malgré l’existence de zones visiblement problématiques dans la ville. En d’autres termes, l’initiative s’adresse à des jeunes chômeurs et à d’autres groupes vulnérables de la ville entière (car il serait peu logique de poursuivre une approche par quartier, déjà très restreinte). Tout d’abord, le Plan d’action (régional) et le descriptif des deux projets successifs ne définissent pas clairement le périmètre spatial de l’initiative menée à Kotka. Les « zones du centre de Kotka » fonctionnent comme terme spatial de référence pour désigner les zones de la ville qui ne sont pas « rurales » et qui n’entrent pas dans le cadre du programme LEADER mené dans le sud du Kymenlaakso. En ce qui concerne les zones du centre de Kotka, les documents relatifs à l’initiative et à ses projets ne font aucune mention de zones problématiques. Or, ces « zones sensibles », où une grande partie des associations partenaires mènent l’essentiel de leurs activités, suscitent l’intérêt soutenu des parties prenantes. On peut en effet supposer que les habitants et les communautés de Karhuvuori et de Hovinsaari bénéficient d’une attention particulière et que l’initiative assure une meilleure justice spatiale à leur attention.

A truly multi-sectoral and integrated method being constrained could be one of the reasons why a deliberate spatial focus on neighbourhoods is missing from the initiative’s work to support marginalised groups – despite the fact that there are some markedly problematic areas within the city. In other words, the initiative serves the activation of unemployed youth and other vulnerable groups generally in the whole city (as it would make little sense to further concentrate an already narrow sectoral approach to single neighbourhoods). To start with, the (regional) Action Plan and the descriptions for the two consecutive projects do not define clearly the spatial scope of the initiative in Kotka. The “central areas of Kotka” is the most used spatial reference, denoting those areas of Kotka municipality that are not “rural” and thus are excluded from the LEADER programme in southern Kymenlaakso. Concerning the central areas of Kotka, no specific mentions of the problematic areas are made in the documents related to the initiative and its projects. Nevertheless, stakeholders share a pronounced concern with social “hotspots”, and a number of participating third-sector organisations have a significant share of their activities in these places. Therefore, it can be assumed that in practice, residents and communities of Karhuvuori and Hovinsaari receive some special attention, and thus the initiative delivers improved spatial justice to them in particular.

Une autonomie municipale exercée et renforcée. Du point de vue administratif, la municipalité de Kotka s’inscrit dans le système politique unitaire finlandais et, nous l’avons vu, exerce un grand nombre de missions et de compétences, qui correspondent notamment aux domaines d’intervention de l’initiative. Le niveau local dispose d’une indépendance accrue pour utiliser les financements européens, et peut donc accueillir une action fondée sur le lieu, selon des modalités que les acteurs locaux estiment être les plus adéquates, qui sache répondre aux défis sociaux qui se posent sur place. Le fait que Sepra, soutenu par la ville de Kotka, ait pu négocier une mise en œuvre davantage basée sur le local et le tiers secteur, tout en maintenant son rôle de coordinateur et en assumant la responsabilité des projets, est d’ailleurs un bon exemple du degré d’autonomie locale qui a été atteint.

Municipal autonomy exercised and reinforced. In terms of administration, Kotka is a municipality within the Finnish unitary system, and as mentioned above, it has a wide range of functions and responsibilities, including those fields where the initiative in focus operates. The independence of the local level has been reinforced in terms of the utilisation of EU funding to host a place-based action dealing with local social challenges the way local stakeholders see fits best. An example demonstrating such local autonomy was when despite the Regional Council’s original idea of an action for the entire region of Kymenlaakso, Sepra backed by the City of Kotka could, through negotiations, insist on a more local and more third-sector-based implementation, maintaining their roles as coordinators and taking ownership of the projects.

Le pouvoir local d’initiative : des ressources locales pour des procédures correctives

Local power of initiative – own resources for corrective procedures

Pour comprendre ce que signifie l’« autonomie » en termes de « pouvoir d’initiative » dans le cadre de l’initiative et de ses objectifs, il faut tout d’abord distinguer deux niveaux de « localité ». Le premier rassemble les acteurs associatifs locaux qui travaillent en équipe sur les projets en question ; le second réunit la municipalité (c’est-à-dire le gouvernement local) et la ville de Kotka dans son ensemble. L’existence de ressources et de compétences (distributives) particulières permet à la localité (et à ses acteurs locaux) d’être plus autonome lorsqu’elle applique certaines mesures correctives aux injustices spatiales. Les actions qui en résultent défendent une meilleure justice spatiale, qui passe notamment par l’empowerment accru des organisations directement engagées auprès des populations à risque sur tout le périmètre de Kotka. Dès lors, dans quels cas le niveau local s’est-il emparé de son pouvoir d’initiative pour assurer la mise en œuvre de l’action en question, menée par la société civile ? Dans quelle mesure le niveau local en a-t-il tiré parti ? C’est ce que nous verrons plus en détail dans les paragraphes suivants.

To understand “autonomy” in terms of the “power of initiative” in relation to the studied intervention and its objectives, one can differentiate between two levels of “locality”. One is that of grassroots actors teaming up for the projects in focus, and the other is the City (local government) and Kotka municipality as a whole. Furthermore, the existence of particular (distributive) resources and capacities empower the locality (and its local stakeholders) to apply some corrective procedures to spatial injustice, and their resulted actions promote better spatial justice especially by way of further empowerment of the organisations directly engaged with social groups at risk, and Kotka as a whole. In the following, first more detail is offered on what instances of its initiative power are harnessed by the local for the successful implementation of the civil-society driven initiative. After comes a discussion on how the local has been enriched in its power of initiative as a result.

L’association Sepra, instigatrice et coordinatrice locale du projet, possède les ressources et les compétences nécessaires pour lutter contre les inégalités sociales et spatiales à Kotka. Ceci grâce à (ou malgré) l’expérience qu’elle a acquise au fil d’activités similaires développées dans l’arrière-pays rural de la ville. Elle possède non seulement l’expérience et l’expertise nécessaires à la mobilisation communautaire et à la coordination de projets, mais aussi un réseau actif de contacts dans le domaine du DLAL rural en Europe (porté par le programme LEADER). Elle a en outre accès direct aux informations relatives aux dernières évolutions des politiques nationales et européennes en ce qui concerne  l’extension du dispositif à des contextes urbains (le débat « DLAL »). Les axes thématiques des deux projets successifs ont en outre suscité la mobilisation de plusieurs organisations locales du tiers secteur, dont : un centre multiculturel, une association de centres de service communautaires à but non lucratif, les représentants locaux d’une ONG dédiée à l’enfance ainsi que la paroisse locale. Leur contribution se traduit non seulement par une connaissance fine des différents types d’injustice sociales et/ou spatiales à Kotka, mais aussi par les liens directs qu’elles ont tissés avec des quartiers, des familles ou des personnes vulnérables. Son savoir-faire (pratique et ancré localement), sa proximité et ses liens quotidiens avec des groupes sociaux à risque permettent au coordinateur, déterminé et inventif, de proposer des idées et une lecture inédites de la situation, issues de son engagement dans des réseaux à différentes échelles (qui passent du rural à l’urbain dans la région, ou du niveau national à international).

The association Sepra, the local initiator and coordinator, holds relevant resources and represents in itself an important capacity in dealing with social and spatial inequalities in Kotka. This is not only despite but also helped by the fact that this organisation has much relevant experience based on similar activities in the rural hinterland of the city. It owns expertise and experience about community activation and project coordination, and has active network connections related to the rural forms of CLLD in Europe (supported by the LEADER Programme), as well as direct access to information on current national and European policy developments related to its extension to urban contexts (i.e. the “CLLD” debate). Furthermore, consistent with the thematic foci of the two consecutive projects, several local third-sector organisations, including a multicultural hub, an association of non-profit community service centres, local representatives of an NGO supporting children, and the local parish are mobilised. These contribute with their own special knowledge related to various kinds of social/spatial injustices in urban Kotka, and with their direct links to vulnerable individuals, families and neighbourhoods. In sum, locally embedded and practical know-how and proximity and everyday connection to the social groups at risk is paired with a resourceful and committed coordinator who can offer fresh ideas and understanding gathered from its engagement in various networks on multiple scales (crossing from rural to urban in the region, as well as on the national and international levels).

Une autre composante du pouvoir local d’initiative concerne celui de la municipalité de Kotka, et de Kotka dans son ensemble. L’engagement de la ville est motivé par sa précédente coopération avec Sepra, mais aussi par le « tournant participatif » qui marque désormais son approche du développement local. C’est ce que reflète d’ailleurs le nouveau Plan stratégique pour la ville de Kotka, paru récemment (mai 2018), dont la période d’application s’étend jusqu’à 2025. « Agir ensemble », participer, permettre aux habitants de prendre part aux décisions : ces mots d’ordre semblent bien être au centre de cette nouvelle stratégie.

Another element of the local power of initiative is that of the City and Kotka, and Kotka as a whole. The City’s involvement is motivated by previous cooperation with Sepra, and it is in line with the current “participatory shift” in its own approach to local development, also reflecting the recently (May 2018) published new City Strategy of Kotka with a time frame until 2025. “Doing things together”, participation and giving residents the opportunity to influence decisions appear to be at the centre of the new Strategy.

Le pouvoir local d’initiative : retombées locales des procédures correctives

Local power of initiative – local outcomes of corrective procedures

Concernant les résultats des projets locaux sur l’aspect « initiative » de l’autonomie locale, trois niveaux de bénéficiaires peuvent être distingués en matière d’amélioration des procédures et des compétences dans la lutte contre l’injustice spatiale. Ils sont présentés ci-dessous par ordre d’importance : les associations participantes, premiers bénéficiaires ; et les groupes cibles d’habitants, bénéficiaires indirects du travail renforcé des associations. L’intervention de la ville de Kotka pour remédier à ces problèmes sociaux et promouvoir la justice spatiale est complétée par de nouveaux outils et perspectives, qui bénéficient à la localité dans son intégralité.

Concerning the outcome of the local projects regarding the “initiative” aspect of local autonomy, three levels of recipients can be distinguished of improved procedures and capacities to battle spatial injustice. The sequence in which they are discussed below reflects the order of significance: the participant associations are the immediate recipients; their target groups of residents are the indirect beneficiaries of the enhanced work of these organisations. Kotka City’s own interventions to solve social problems and promote spatial justice are supplemented with new tools and perspectives, and thus the locality benefits as a whole.

Premièrement, la réalisation la plus importante est celle de l’empowerment du tiers secteur local. Les organisations en question, dont les capacités financières sont limitées, ont développé une approche « douce » pour accompagner des groupes sociaux vulnérables. Elles utilisent des outils tels que l’organisation d’événements pour informer et sensibiliser, parler de l’engagement social, du travail bénévole, du soutien par les pairs, etc. Elles peuvent ainsi apporter une « dimension humaine » à ceux qui se trouvent en situation d’isolement ou de détresse, en raison de circonstances défavorables (chômage, handicap, immigration). Or, ce type de travail est la plupart du temps discret, seulement visible des groupes particuliers auxquels il s’adresse, isolé du reste de la société, et mené à trop petite échelle pour être remarqué des acteurs formels et des autorités locales. A la lumière de cette analyse, et compte tenu des ambitions qui sous-tendent la promotion du « développement mené par les habitants ou la société civile », il semble impératif que le Conseil urbain mis en place dans le cadre de l’initiative puisse servir de plateforme commune aux associations et aux militants, pour renforcer les partenariats et leur impact collectif.

Firstly, the most important aspect of outcomes is the empowerment of local third-sector. These organisations, having limited financial capacities, support vulnerable social groups with a “soft” approach. They use tools such as organising events for information, awareness raising and social engagement, volunteer work and peer-support, etc. They can offer the “human touch” to those who are often isolated and distressed due to their particular disadvantage (as unemployed, immigrant or disabled). This kind of work, however, often stays low-profile, visible only to the particular target groups, staying isolated from the rest of the society and too small to be noticed by formal stakeholders, local executives. In light of this, as well as considering the ambition of promoting “residents – or civil – society-led development”, it is important that the Urban Board set up within the initiative provides a common platform for these different associations and individual activists, strengthening their partnership and joint impact.

S’ils partagent des valeurs communes en matière de « justice sociale et/ou spatiale », les  organisations et les militants du tiers secteur impliqués se distinguent néanmoins en fonction des perspectives, des manières de faire et des groupes vulnérables auxquels ils s’adressent. Le Conseil facilite la collaboration et la coordination de ces organisations au profit de l’ensemble de leurs publics respectifs. Les projets et le Conseil urbain permettent aux associations et aux militants de Kotka d’échanger idées et bonnes pratiques, de planifier de nouvelles activités (communes) et plus globalement, de contribuer à l’élaboration d’une approche collective des problèmes (sociaux) particuliers qui se posent à eux et des solutions qui peuvent y être apportées. Sous l’égide de Sepra, elles font également interface avec des organisations et des activités comparables développées dans les zones rurales des environs ; elles rendent ainsi possible la mise en commun de ressources dispersées (notamment sur le plan humain, des connaissances et du capital social). Par ailleurs, le Conseil soutient dans une certaine mesure les échanges et les formes d’apprentissage mutuel entre la ville et les habitants. Enfin, Sepra se voit réaffirmée dans son rôle déjà bien établi de « noyau d’experts », qui possède le potentiel nécessaire pour intégrer des perspectives européennes, nationales et locales en matière de développement local et communautaire. A bien des égards, l’initiative étudiée (à comprendre ici surtout comme des projets emboîtés dans les multiples niveaux de gouvernance de la politique de cohésion) confère donc aux organisations impliquées des capacités et des ressources accrues (sur le plan non-matériel plus que financier). Elle contribue par conséquent à renforcer le pouvoir d’initiative commun de ces organisations, qui bénéficient ainsi d’une plus grande marge de manœuvre pour lutter contre les problèmes socio-économiques de Kotka et pour promouvoir la justice sociale et/ou spatiale.

The participating third-sector organisations and activists, despite sharing common values on “social/spatial justice”, represent different vulnerable groups, perspectives, priorities and ways of doing things. The Board facilitates collaboration and co-ordination between them for the benefit of all their respective target groups. The projects and the Urban Board serve for exchanging ideas and good practices between associations and activists from Kotka, planning new (shared) activities, and in general, it helps to formulate a joint understanding of particular (social) problems and their solutions. Led by Sepra, they also offer an interface towards comparable organisations and activities in the rural surroundings, a possibility for pooling dispersed resources (mainly human, knowledge and social capital). In addition, to some extent, the Board supports exchanges and mutual learning between the city and its residents. Finally, the role of Sepra is strengthened as a well-established “expert node” with significant potential for integrating European, national and local perspectives on local and community development. In these many ways, the studied initiative (here especially in the sense of the projects embedded into multi-level governance of cohesion policy) empowers the local civil society organisations involved in it with increased capacities and (more non-material than financial) resources. Consequently, it enhances their joint power of initiative and offer them greater leverage to address local social-economic problems and promote social/spatial justice in Kotka.

Deuxièmement, la mobilisation des habitants fait aussi partie des réalisations présentées. Il faut tout d’abord signaler que la participation des citoyens aux processus de décision, liée à l’initiative proprement dite (à ses objectifs et à son périmètre), a été assurée pendant la phase de préparation, c’est-à-dire lors de l’élaboration des volets concernant Kotka dans le Plan d’action pour le Kymenlaakso. Pour ce faire, elle s’est appuyée sur les conclusions présentées par les forums d’habitants et les sondages d’opinion qui ont respectivement organisés par les associations coordinatrices et la ville de Kotka. Toutefois, les processus de participation directs et formels (consultations, sondages) comme les liens plus étroits mis en place avec les habitants au sujet des besoins locaux et de leurs solutions potentielles ont témoigné d’une certaine asymétrie lors de la phase de préparation.

Secondly, activation of residents is among the achievements, too. To begin with, the participation of individual citizens in decisions related to the initiative itself (its objectives and scope) was ensured during the preparation phase, i.e. the development of the Kotka-relevant aspects of the Action Plan for Kymenlaakso. This was done by incorporating the results from resident fora organised by the coordinating associations and from citizen opinion polls arranged by Kotka City. Such more direct and formal participation processes (hearings, polls) and close interaction with residents on local needs and potential solutions, however, appear to have been lop-sided towards this preparation phase.

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Organisation des activités du second projet (2017-2019) (schéma de l’auteure)
Activities organised by the second project (2017-2019) (Author’s own elaboration)

Néanmoins, le nombre élevé de manifestations et d’activités organisées avec et pour les publics cibles donne autant d’occasions de formuler et de discuter des besoins et des solutions. Le plus souvent, les événements impliquant directement les habitants (soit un peu plus de la moitié des événements recensés, ex. le second projet présenté Figure 3), organisées dans des centres de jeunes, des centres socioculturels et des associations, ont pris la forme de rencontres destinées à les informer sur les différentes perspectives amenées par le projet. D’autres types d’activités – événements pédagogiques, accompagnement à la recherche d’emploi pour les « jobs d’été » – ont également été proposées. En parallèle, ont eu lieu des événements de plus grande taille, auxquels ont participé des personnes issues des différents groupes cibles. Il a ainsi été possible de rencontrer les personnes les plus en besoin de soutien, de les informer et de les inciter à prendre part à la vie de la communauté locale. Si la mobilisation ne débouche pas nécessairement sur un engagement individuel dans les « décisions locales » à l’échelle de la ville, elle donne cependant une assise solide à la participation et s’avère potentiellement capable de susciter des échanges locaux et des idées novatrices, une plus grande confiance, et de nouvelles formes de coopération entre les individus.

Nevertheless, the increased number of events and activities organised with and for the target groups provide much opportunity to voice and discuss such needs and solutions. Events directly engaging residents (a bit over a half of all reported events, see the example of the second project in Figure 3) most often took the form of meeting them at youth centres, community houses or at different associations’ premises with the purpose of informing them about the possibilities offered by the project. Other types of activities included, for instance, educational events and assistance in finding summer jobs. Some bigger events have also been held that brought together people from multiple target groups. Those individuals are reached, informed and activated to take part in the life of the local community that need such support probably the most. Although this activation does not imply their direct engagement in “local decisions” on the city-level, it provides good foundations for such participation, and has the potential to generate local exchanges, fresh ideas, increased trust and new cooperation between individuals.

Troisièmement, bien que le Conseil urbain soit composé d’organisations et de militants issus de la société civile, il compte parmi ses membres actifs un représentant de la ville (du département qui s’occupe du soutien à la jeunesse) ainsi qu’un enseignant travaillant dans un établissement de formation professionnelle, lesquels ont eux aussi participé aux activités et aux échanges recensés ci-dessus. Également, il existe bien une forme de collaboration société civile/ville, et tiers secteur/secteur public. Bien que son rapport aux prises de décisions locales soit plutôt indirect et son impact intangible, cette forme de collaboration s’ajoute aux échanges et forums (in)formels existants que se partagent localement ces deux secteurs. Ce qui pourrait en retour contribuer à améliorer Kotka (en tant que localité), mais aussi les savoirs et la boîte à outils dont elle dispose pour lutter contre les injustices spatiales.

Thirdly, although the Urban Board is composed mainly of civil-society organisations and activists, it also includes an active representative of the City (from its department dealing with the support of youth) as well as a teacher from Kotka’s vocational school, as participants of the above listed activities and interactions. As such, there is civil-society-to-city or third-to-public-sector collaboration, too. Although the connection to local decision-making is rather indirect and its impact intangible, it adds to other existing formal and informal forums and exchanges shared locally between these two sectors. This, in turn, may strengthen Kotka, as a locality in its knowledge and toolbox to treat spatial injustice.

Le fonctionnement de l’initiative, par certains aspects, témoigne en effet de la complémentarité et de la coopération à l’œuvre entre le secteur public et les associations locales en matière de ressources, de capacités et de compétences. L’administration de la ville peut tirer profit d’une collaboration avec ces initiatives issues du tiers secteur (ou d’initiatives similaires). La société civile semble davantage en mesure de proposer une lecture et un savoir moins « rigide », plus nuancé, des processus sociaux à l’origine des injustices spatiales, et témoigne aussi d’une compréhension « procédurale » plus fine des problèmes sociaux, qui sont de fait plus visibles lorsqu’il y a contact quotidien avec des publics vulnérables spécifiques. La municipalité possède de son côté les ressources financières nécessaires pour soutenir une approche « distributive » plus simple, et sans doute plus conventionnelle, de l’intervention – ex. investissements infrastructurels dans les quartiers en difficulté, aides sociales et subventions. Ces deux modes de perception et d’intervention peuvent tout à fait être combinés. Les centres socioculturels de la ville qui se situent dans l’aire urbaine mettent ainsi à disposition des espaces pour les activités  associatives, dont certaines ont d’ailleurs lieu dans le cadre des projets décrits. En d’autres termes, le Conseil urbain propose un espace d’interactions entre une conception formelle (municipale) et une conception informelle (grassroots) de (la manière « forte » et la manière « douce » de lutter contre) la marginalisation sociale et l’exclusion dans les zones urbaines de Kotka. Le développement de ses compétences permet par conséquent de renforcer le pouvoir d’initiative de la ville entière dans sa lutte contre la marginalisation et l’injustice spatiale.

Indeed, there are elements in the deployment of the initiative that indicate complementarity and cooperation between the public sector and the grassroots in terms of resources, capacities and competences. The City administration can benefit from working together with this (and similar) civil-sector-driven initiatives. Civil society is more likely to own the “soft” and more nuanced perception and knowledge of processes behind spatial injustice and a more intricate “procedural” understanding of local problems as these tend to arise from everyday contact with specific vulnerable groups. The municipality, on the other hand, has the financial resources backing up a more straightforward, maybe more conventional “distributive” intervention approach, e.g. infrastructural investments to problem neighbourhoods, social aid and subsidies. These two perceptions and ways of intervention can be well combined. For instance, the community houses at various locations in urban Kotka provided by the City offer the physical space for third-sector activities, including some arranged by the projects at hand. To sum up, the Urban Board provides space for the interaction between the formal (municipal) and informal (grassroots) understandings of (respectively, “soft” and “hard” ways of preventing) social marginalisation and exclusion in urban Kotka. Therefore, it develops capacities and strengthens the power of initiative of Kotka as a whole in its dealing with marginalisation and spatial injustice.

Toutefois, les projets pilotés par Sepra sont sans doute trop modestes pour être identifiés par les autorités et les décideurs locaux comme un exemple de bonne pratique dans le cadre de la mise en œuvre du « volet participatif » du nouveau Plan stratégique. En outre, les militants du tiers secteur n’ont cherché aucun moyen direct pour influer sur les décisions locales (ou leur préparation) prises par l’administration de la ville. Ce qui limite la capacité de l’initiative à œuvrer en faveur de l’autonomie locale sur ce point précis. Il faut également souligner que le secteur privé local n’est pas impliqué dans l’initiative. Il aurait été pourtant faisable, pour multiplier et diversifier les points de vue, d’inviter ses représentants à rejoindre le Conseil. Même indirecte (c’est-à-dire sans qu’ils en soient les bénéficiaires directs), leur participation aurait en effet permis d’adopter une approche un peu plus globale pour promouvoir la justice spatiale. Les PME locales, les créateurs de start-up, les incubateurs et autres structures similaires pourraient constituer une importante ressource à mobiliser, d’autant que le niveau insuffisant d’insertion professionnelle et d’accès égal à l’emploi (jeunesse, immigration, handicap) représentent un facteur central des inégalités sociales et spatiales à Kotka. Les entrepreneurs locaux et les employeurs potentiels sont également des acteurs de choix, qui constituent eux aussi une ressource à mobiliser plus attentivement en faveur d’une démarche plus spatiale, c’est-à-dire axée sur les quartiers en difficulté. Selon nos interlocuteurs, les petites et très petites entreprises ne remportent pas un franc succès à Kotka ; l’esprit d’entreprise, notamment chez les jeunes, s’avère d’ailleurs plutôt faible comparé à la moyenne nationale. Quant au nombre peu élevé d’établissements d’enseignement (professionnel) partenaires, il signale tacitement que l’initiative a échoué à intéresser les acteurs du secteur privé à la coopération intersectorielle. Un accès réel aux parties prenantes concernées, ainsi qu’aux ressources et aux compétences qu’elles représentent, permettrait au Conseil urbain et à ses projets de renforcer davantage le pouvoir d’initiative au niveau local.

Still, the projects led by Sepra appear to be too small to be noticed and used by the local public authorities and decision makers, for instance, as a potential good practice in implementing the “participatory dimension” of the new City Strategy. Also, no direct ways were sought by the third-sector activists for influencing the (preparation of) local decisions by the City administration. These limit the initiative’s capacity to increase local autonomy in this particular sense. It is also important to point out that the local private sector is not engaged by this initiative. Their representatives could also have been invited to the Urban Board, in order to include a greater diversity of perspectives. Even their indirect involvement (i.e. not as direct beneficiaries) would help achieve a bit more comprehensive approach to promoting spatial justice. Local small and medium-sized businesses, start-up mentors, incubators and similar organisations would be an important resource to mobilise particularly since key aspects of social and spatial inequalities in Kotka include insufficient levels of employability and equal opportunity for jobs (of youth, immigrants and disabled). Also, for a more spatial approach, i.e. a focus on problematic neighbourhoods, local entrepreneurs and potential employers could be relevant actors as well as resource to mobilise more consciously. Interviewees in fact suggested that small and micro-sized enterprises are not entirely appreciated in Kotka; and entrepreneurial spirit, especially among youth is also rather low in this city in national comparison. Besides, assumedly, the weak presence of (vocational) education institutions as a partner in the initiative can be also the result of it having failed to attract private sector stakeholders into cross-sectoral cooperation. Genuine access to these relevant local stakeholder groups and the resources and capacities they represent would help the Urban Board and their projects further enhance the power of initiative at the local level.

Avant de conclure, il faut signaler que ce sont surtout Sepra et les associations partenaires qui sont conscients du caractère expérimental « LEADER urbain » des activités décrites plus haut. Les habitants en général et l’administration en particulier restent quant à eux peu, voire pas informés. C’est ce que confirment également plusieurs entretiens réalisés en dehors du « noyau dur » de l’initiative, de même que n’apparaissent ni au niveau symbolique (logo, titre) ni dans les explications directes – par exemple sur les brochures et les documents d’information relayant les événements – la mention des financements européens et du programme finlandais « Une croissance et des emplois durables ». Il s’agit sans doute d’une stratégie délibérée de la part de Sepra, qui a sans doute intérêt à élargir ses activités LEADER à des contextes urbains au lieu de promouvoir une « nouvelle méthode » de gouvernance locale pour améliorer la cohésion et la justice spatiale. Au fond, les projets de l’initiative ne cherchent pas à promouvoir auprès des habitants et des acteurs locaux les principes et les valeurs véhiculés par une forme ascendante de développement local fondé sur le lieu, sans même parler de « développement local mené par les acteurs locaux ». Non seulement les participants potentiels se retrouvent légèrement exclus des débats nationaux sur le DLAL, mais l’initiative rate aussi l’occasion de rendre les politiques, les discussions et les dilemmes européens plus proches des « gens ».

As a final note, it is interesting to mention that it is basically Sepra and its immediate partner associations who are aware that the above-described activities are actually part of an “urban LEADER” experiment. Local residents at large or public administration are little, if at all, conscious of this. This is confirmed by several interviews outside the initiative’s local core group, too, and it is also signified by the fact that neither on a symbolic level (logo, title) nor as direct explanation do the notions of the EU funding, the Finnish “Programme for Sustainable Growth and Jobs” appear, for instance, on information sheets and brochures advertising these events. This can be a conscious strategy by Sepra, as this association may have its own interest in extending its LEADER activities to the urban context rather than promoting a “new method” in local governance for improved cohesion/spatial justice. Anyways, the projects of this initiative do not try to directly “advertise” to local residents and stakeholders’ values and principles of place-based and bottom-up local development, let alone those of “community-led local development”. This somewhat excludes potential participants from national debates on CLLD and makes the initiative miss out on the chance to bring European policy, discussions and dilemmas closer to the local level and the “people”.

 

 

Remarques finales

Concluding remarks

L’objectif de cet article, donc l’analyse porte sur un cas empirique précis, est d’apporter une contribution aux débats théoriques en articulant la question de la justice sociale à celle de l’empowerment, et par ce biais d’œuvrer pour une compréhension plus large de l’autonomie locale. Il démontre d’une part que les processus et les sources d’empowerment sont indissociables de la relation dynamique dans laquelle s’inscrivent les aspects distributifs et procéduraux de la justice spatiale, et d’autre part que l’ensemble de ces interactions se trouve encore compliqué par le fait qu’elles se situent à de multiples niveaux, quand elles ne les franchissent pas, et qu’elles s’appuient sur une conception fluide et imprécise de la « localité ».

Analysing a specific empirical case, the paper aims to contribute to conceptual debates by relating spatial justice to empowerment, and through that, to a broader understanding of local autonomy. It is revealed how processes and the sources of empowerment are tightly intertwined with the dynamic relationship between the distributive and procedural aspects of spatial justice, and how their interactions are complicated further by the fact that they occur on and across multiple levels and operate with an indefinite, fluid concept of “locality”.

Le récit qui est fait de cette initiative locale et de sa trajectoire, de l’idée de départ et de son élaboration à la mise en œuvre, est fortement emboîté dans une série de relations verticales, horizontales et transversales, ce qui en fait un objet d’étude particulièrement intéressant pour le présent article (Figure 4). L’adoption d’une approche multiscalaire, mais surtout multidimensionnelle, des relations socio-spatiales et du concept de « localité » permet ici d’appréhender ce qui se joue « sur le terrain » pour les politiques de cohésion finlandaise et européenne.

The fact that the narrative of a local initiative, through its entire course from idea through preparation to deployment, is highly embedded in various vertical, horizontal and transversal relations makes it an especially interesting subject of study for the purposes of this paper (Figure 3). The not only multiscalar but also multidimensional approach adopted in this paper to sociospatial relations, and to the concept of “locality” itself, has helped to get a grasp on what is happening “on the ground” to European and national cohesion policies.

L’autonomie locale – qui fait ici référence au degré d’empowerment de la société civile et des groupes vulnérables au niveau local, mais aussi à l’échelon le plus bas du gouvernement et à la ville dans son ensemble – peut être considérée à la fois comme un moyen et une fin pour promouvoir la justice spatiale. L’autonomie locale d’action face aux injustices sociales et/ou spatiales, bien qu’indéniablement détournée et contrôlée par les plus hautes sphères de gouvernance (Clark, 1984 : 195), peut pourtant tirer parti des financements et des idées qui transitent « par le haut » à travers une même structure verticale, et par d’autres canaux et connexions qui, quant à eux, se jouent des échelles. L’autonomie locale fait en outre l’objet d’usages, d’expressions et d’améliorations en fonction des interactions multidimensionnelles à l’œuvre dans le cadre de la trajectoire de l’action décrite plus haut.

Local autonomy – understood both in terms of the level of empowerment of local civil society and particular vulnerable groups and as the lowest tier of government, the city as a whole – can be seen as both a means and an end to, the promotion of spatial justice. This local autonomy to act upon social/spatial injustice, undeniably compromised and overseen by higher tiers of governance (Clark, 1984, p. 195), is also taking advantage from funding and ideas channelled through the same vertical structure “from above”, as well as from other dimensions and connections that cut across scales. Moreover, this local autonomy is used, expressed and improved through multidimensional interactions during the course of the action detailed above.

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Emboîtement de l’initiative étudiée et du caractère multidimensionnel de la localité (schéma de l’auteure)
The embeddedness of the initiative and its multidimensional locality (Author’s own elaboration)

Quels sont les facteurs qui limitent ou multiplient les possibilités d’accroître l’autonomie du niveau local en termes de pouvoir face aux injustices sociales et/ou spatiales ? Quelles sont les dimensions et les définitions du « local » qui émergent à travers la logique d’intervention de l’initiative ? En réponse à ces questions de recherche initiales, l’analyse présentée plus haut permet de faire au moins deux observations majeures. Premièrement, les interactions entre aspects distributif et procédural de la justice spatiale sont étroitement entremêlées aux dynamiques d’empowerment interscalaires ; deuxièmement, la définition que donnent du « local » les acteurs de l’initiative est (par conséquent) très flexible, ce dont elle a par ailleurs besoin.

In response to the initial research questions, i.e. “what factors limit and extend the potential of the studied initiative to increase the autonomy of the local level in terms of its power to deal with social/spatial injustices…” and “what dimensions and definitions of “local“ emerge in the initiative’s intervention logic”, the analysis above leads at least to two major observations. One is that the interactions of the distributive and procedural aspects of spatial justice interweave with cross-scale dynamics of empowerment, and the other is that (hence) the definition of the “local” by the intervention and its various actors is very flexible, but actually, it needs to be.

La « localité » et les parties prenantes de l’initiative s’inscrivent dans un écheveau de structures et de processus administratifs et financiers, marqués par une verticalité et une multiplicité de niveaux, de même que dans des relations horizontales et transversales. Cet emboîtement dans des structures et des réseaux de gouvernance multi-niveaux s’explique à la fois par les fonds qu’elles reçoivent du FSE, et par les liens qu’elles entretiennent avec des réseaux de pratiques, établis ou émergeants, qui portent sur différentes formes de DLAL (et sur les débats qu’elles suscitent). En dépit de certaines limites (ex. l’interprétation étroite et peu intégrative du DLAL par l’État finlandais), cet emboîtement paraît constituer une source d’empowerment (grâce à des moyens à la fois distributifs et procéduraux) plus qu’une entrave à l’autonomie (et à l’immunité) des acteurs locaux.

The stakeholders and “locality” of the initiative are set in a multi-layered vertical of administrative-financial structures and processes as well as horizontal and transversal relations. Their embeddedness into the European multi-level governance structures and networks is due both to their receiving funding from the European Social Fund and their linkages to existing and emerging networks of (and debates on) CLLD-type of practices. Despite some of the limitations (e.g. a narrower, not so integrative interpretation of CLLD by Finnish authorities), this embeddedness seems to be more of a source of empowerment (both by distributive and procedural means) than the impediment of the autonomy (immunity) of local actors.

Les divers exemples d’« empowerment » présentés ici établissent un lien entre d’une part,  les structures, les processus, les intérêts et les ressources multi-niveaux, et de l’autre les parties prenantes et les bénéficiaires impliqués dans la réduction de la marginalisation et des injustices sociales et/ou spatiales à Kotka. Les facteurs qui limitent ou démultiplient la capacité de l’action à accroître son autonomie au niveau local, afin de lutter contre les problèmes évoqués, doivent non seulement être recherchés dans sa propre logique d’intervention, mais aussi parmi les multiples niveaux qui la « gouvernent » en dépit de son caractère « ascendant ». Ces relations illustrent bien le caractère multidimensionnel de la localité quand il s’agit d’évaluer ses sources (ou son pouvoir) d’autonomie.

Various instances of “empowerment” are presented above, linking multi-level structures, processes, interests and resources with stakeholders and beneficiaries involved in reducing marginalisation and social/spatial injustice in Kotka. The factors that expand and limit this action’s potential to increase the autonomy of the local level in addressing these problems are to be sought not only in its own intervention logic, but also across the multiple levels that “govern” the intervention despite it having a distinct “bottom-up” nature. These relations represent the multidimensionality of locality when it comes to assessing its sources (powers) of autonomy.

Certes, plusieurs aspects des solutions qu’incarne l’initiative, fondées sur le lieu, exigent des parties prenantes locales qu’elles fassent des choix. C’est ce dont témoigne par exemple le fait d’employer, pour les zones urbaines de Kotka, une expérience de travail menée en zones rurales, mais aussi de connecter et de combiner les deux contextes et les solutions qui en émanent. Par ailleurs, les projets n’ont pas cherché à se rapprocher du secteur privé, qu’ils pouvaient pourtant mobiliser comme une ressource. Rien ne montre non plus qu’il y ait eu volonté de s’associer plus directement et formellement à l’élaboration du Plan stratégique de la ville ; d’où le caractère, ténu et peu palpable, du lien qui continue à unir l’initiative et les organisations de la société civile impliquées aux processus de décision locaux. Ces « chemins non empruntés » pourraient sans doute permettre de renforcer l’autonomie (ses deux sources de pouvoir) des acteurs du tiers secteur et de Kotka dans son ensemble lorsqu’ils abordent la question de la justice spatiale. Néanmoins, si certains aspects sont présents, ou au contraire manquent à l’appel, c’est parce qu’ils ont été facilités, édictés ou écartés à un échelon plus élevé. L’existence concrète d’opportunités en matière de financements européens et/ou nationaux signifie que des ressources supplémentaires peuvent être consacrées localement à des objectifs adaptés aux besoins du lieu. Bien préparée et accompagnée, notamment grâce à son expérience « relationnelle » et à ses liens en matière de coordination de projets sur la base de fonds européens, Sepra – l’association coordinatrice – pourrait tout à fait s’emparer de ce type d’opportunités, sans avoir non plus à se soucier excessivement des limites posées dans le même temps par ces mêmes structures de financement quant au périmètre et à l’orientation de ses activités.

It is true that some part of the place-based solution that the initiative embodies is a matter of choice by the local stakeholders. Examples are the instances of bringing into urban Kotka the experience from work in rural areas, and connecting, combining these two contexts and their solutions. In addition, the projects do not make efforts to reach out to the private sector and use it as a resource. There neither is any evidence for an ambition to get more directly and formally engaged in the formulation of the City Strategy, keeping the initiative and the participant civil-society organisations in a loose and less tangible connection to local decision-making. These “paths not taken” could assumedly lead to strengthened autonomy (regarding both sources of its power) of the third-sector participants as well as Kotka as a whole, in dealing with spatial justice issues. However, some elements are there or missing because they were facilitated/dictated or ruled out by higher tiers. The actual existence of a European/national funding opportunity means additional resources to be spent locally on objectives well-fitting with place-based needs. The coordinating association, Sepra, helped and prepared, for instance, by their “relational” connections and experience regarding EU-funded project coordination, could utilise this opportunity, not minding so much the limitations posed meanwhile to the scope and orientation of activities by the same funding structures.

Enfin, il faut souligner que la notion de « localité » reste approximative au regard de l’action étudiée. Compte tenu des différentes perceptions normatives des (in)justices spatiales, le local peut en effet faire référence à deux types d’espaces : les quartiers où les activités organisées dans le cadre des deux projets ont le plus d’impact – ceux qui concentrent le plus de personnes exposées au risque de marginalisation sociale, préoccupation centrale des acteurs associatifs « sur le terrain » – et la ville de Kotka dans son ensemble, qui aspire quant à elle à améliorer son image globale et l’attractivité du lieu – et donc à empêcher l’émigration des jeunes et la baisse de l’assiette fiscale. Si l’on considère que les projets ne sont pas explicitement et uniquement axés sur des zones relativement « défavorisées », alors la localité où a lieu l’intervention correspond sans doute bien aux « zones urbaines » de Kotka. Cela concorde également avec la définition qu’en propose l’outil de financement – la Priorité 5 financée par le FSE – et c’est aussi ce que traduisent l’implication des agents de la ville et l’idée de Conseil urbain, dont les membres, issus de Kotka, planifient et coordonnent des activités concrètes destinées à soutenir et à mobiliser des groupes vulnérables.

As a final remark, the vagueness of the notion of “locality” regarding the studied action can be noted. From the perspective of various normative perceptions of spatial (in)justice, the local may be defined either as the neighbourhoods where the activities organised by the two projects have the greatest impact (i.e. those with the highest concentration of people at risk of social marginalisation, a key concern of activists “on the ground”), or as Kotka as a whole, striving to improve its overall image and attractiveness as a place to live (to prevent further youth outmigration and shrinking of tax base). Considering that the projects do not explicitly focus only on the relatively “deprived” areas, maybe the locality of the intervention is actually “urban Kotka”. This fits with the definition by the funding instrument (Priority 5 funded by ESF), and is in line with the involvement of representatives of the City and the idea of having an Urban Board with Kotka-based members to plan and coordinate concrete activities for the engagement and support of vulnerable groups.

Cette définition n’en soulève pas moins quelques doutes, dans la mesure où Sepra, le principal acteur de l’opération, reste avant tout « local ». Mais intégrer des pratiques rurales et urbaines de développement menées par les acteurs locaux ou les habitants pourrait sans doute lui permettre d’ « atteindre » à terme le niveau infra-régional. Ceci tient en grande partie au positionnement de l’association et à l’intérêt particulier qu’elle suscite, voire à l’agenda stratégique qui la sous-tend. Sepra assure depuis longtemps une mission de développement rural et de répartition des fonds sous l’égide du programme LEADER. Elle tire désormais sa légitimité et ses ressources d’un autre instrument politique, financé par l’UE, pour étendre son travail (ou du moins des activités proches, réunies par un même principe) aux zones urbaines du même territoire. Faut-il ici y voir le moyen de se composer un portefeuille multi-fonds à partir de trois fonds différents de l’UE (Fonds européen agricole pour le développement rural, FSE, FEDER), afin de mener dans le sud du Kymelaakso des activités de type « développement local mené par les acteurs locaux » ? Ces fonds n’étant pas intégrés au niveau national, les acteurs locaux ne peuvent pas remplir une partie des conditions que requiert le « modèle idéal » du DLAL. Néanmoins, le travail réalisé sur le terrain témoigne d’une intégration fonctionnelle, menée par zone, qui doit non seulement son existence au tiers secteur mais est aussi facilitée, bien qu’involontairement, par les échelons supérieurs de gouvernance.

Still, this delineation raises some doubt in view of Sepra being the main “local” agent of this initiative: the level of actual intervention may eventually “rise” to the sub-regional level, integrating rural and urban practices of community or resident-led development. This is mainly due to this association’s position and special interest or even underlying strategic agenda. Sepra has for long been in charge of rural development work and distribution of funds under the LEADER programme, and it uses now resources and legitimation coming from another policy instrument financed from ESF to extend that work (or at least comparable activities, driven by a common principle) to the urban centre of the same area. Could actually one interpret this in a way that Sepra is compiling its own multi-fund portfolio for carrying out community-led local development type of activities across South Kymenlaakso from three different EU funds (the rural development fund, ESF, and ERDF)? These funds are not integrated on the national level, so in this case the local actors cannot fulfil some of the structural requirements of the ideal model of CLLD. Nevertheless, work on the ground indicates a functional area-based integration driven by a third sector partnership and facilitated, though not so intentionally, by upper tiers of governance.

Pour conclure, plusieurs spatialités et localités sont en effet à l’œuvre dans ce récit où « l’autonomie locale rencontre la justice spatiale » dans la ville de Kotka. Cependant, loin d’être incompatibles ou préoccupantes, elles permettent aux divers niveaux et acteurs qui œuvrent dans les domaines de la gouvernance et de l’action publique d’en produire des interprétations flexibles et fructueuses, et de faire fonctionner la coopération.

In conclusion, there are various spatialities and localities present in the story of “local autonomy meeting spatial justice” in Kotka. However, instead of being incongruous or disturbing, these allow for flexible and productive interpretations by and cooperation across diverse levels and actors of governance and policy-making.

[1]. La recherche sur laquelle s’appuie ce travail a été menée dans le cadre du projet international RELOCAL – Resituating the Local in Cohesion and Territorial Development (octobre 2016 – septembre 2020). RELOCAL est financé par le programme européen de recherche et de l’innovation Horizon 2020 (Grant Agreement no 727097).

[1]. This paper is partly based on empirical research conducted in the framework of the project “RELOCAL. Resituating the Local in Cohesion and Territorial Development”. This latter has received funding from the European Union’s Horizon 2020 research and innovation program under Grant Agreement no 727097.

[2]. Entre décembre 2017 et novembre 2018, 25 entretiens individuels ont été menés avec des acteurs du projet, la plupart du temps en face à face, sinon par téléphone ou par Skype. L’échantillonnage des enquêtés s’est appuyé sur les résultats d’une cartographie préliminaire (grâce à un entretien collectif ad hoc réalisé avec les principaux acteurs du projet) et sur l’effet continu de la méthode dite « boule de neige ». Plusieurs observations participantes ont été menées à l’occasion d’événements et d’ateliers nationaux consacrés au DLAL au printemps et à l’automne 2018. Enfin, un focus group d’une durée de trois heures a été organisé à Kotka avec un ensemble d’acteurs choisi parmi les membres de la  société civile, de la ville de Kotka et les partenaires régionaux et nationaux. L’objectif était de discuter des résultats et d’approfondir la compréhension de l’action menée (20 novembre 2018).

[2]. During the period between December 2017 and November 2018, 25 individual interviews were carried out with stakeholders, mainly face-to-face, and a few via phone and Skype. Recruiting interviewees relied on the results of preliminary mapping (by way of a dedicated initial group interview with key stakeholders) as well as continuous “snowballing”. Participant observation was carried out also at several national events and workshops concerning CLLD in the spring and autumn of 2018. To discuss findings and deepen understanding, a final three-hour long focus-group discussion was held in Kotka (20th November 2018) with selected key civil-society actors, Kotka City, and relevant regional and national stakeholders.

[3]. Seuls quelques pays de l’UE ont adopté l’approche DLAL, et rares sont ceux à s’être aventurés jusqu’à appliquer ses instructions à la lettre (Servillo, 2019). La Finlande est à ce titre un cas intéressant, car si elle s’est approprié certains de ses aspects essentiels, c’est avec un « filtre national » sélectif. Depuis, la Finlande a décliné le concept sous différentes formes pratiques dans un grand nombre de villes et de quartiers (mais pas partout). Le type d’initiative présenté dans ce travail – grassroots et sur projet – n’est aujourd’hui qu’une solution parmi d’autres en Finlande. Celle-ci remplit-elle les conditions requises ? Cet aspect mérite en effet d’être interrogé, car il s’agit d’une structure mono-fonds – par exemple, Servillo ne la classe pas en 2019 parmi les vrais cas de DLAL multi-fonds. Si cet article se penche en effet sur certaines lacunes relatives du mono-financement, il émet surtout l’hypothèse que cette classification peut être examinée sous un jour différent.

[3]. Only a few countries of the EU have decided to introduce the CLLD approach, and even fewer examples exist that have ventured as far as to implementing it literally following the EU’s proposal (Servillo, 2019). Finland is interesting for the fact that it has adopted some of the basic elements of the CLLD principle, but with a selective “national filter”. What is more, Finland has since deployed the CLLD concept in several different practical forms in many (but not all) cities and urban neighbourhoods. Project-based grassroots initiatives such as the one presented in this study is but one of the currently existing solutions in this country. Its qualifying for CLLD may be questioned on the basis of its mono-fund structure (e.g. Servillo does not list it among the genuine, multi-funded CLLD examples in 2019). This study, besides pointing out some of the relative shortcomings attributable to the mono-funded nature of this approach, is also developing an argument that can put this classification into a different light.

Bibliographie

References

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